Chapitre 9

110 5 6
                                    


Nous atteignons bientôt la fin du mois d'Astign. Cydestelle était une contrée très verdoyante et belle. La brise tiède me réchauffait les joues et le soleil m'éblouissait. Il n'y avait presque aucun nuage dans le ciel azur. C'était des conditions très agréables pour marcher. Des cours d'eau sillonnaient tout le royaume, me permettant ainsi de remplir ma gourde chaque jour. La végétation se plaisait à Cydestelle et pour mon plus grand bonheur j'arrivais à remplir ma besace de divers fruits. Depuis mon départ d'Eldoras je n'avais eu aucun problème avec les humains et la faune, pourvu que ça continue. Eldrensil n'était pas très causant et c'était toujours moi qui essayais d'avoir une conversation. Lui parler n'était pas forcément plaisant mais ça passait le temps. J'empruntais parfois les chemins mais je veillais à garder mon visage dissimulé sous mon capuchon. J'avais trouvé pour ce soir une caverne où je pourrais me reposer, bien que dormir sous les étoiles n'était pas un problème par ici. Je m'enfonçai jusqu'au fond de la grotte pour vérifier si j'étais bien le seul occupant. Vide. Très bien je pourrais dormir tranquille sans m'inquiéter du retour d'un charmant ours deux fois plus grand que moi. La grotte était profonde et assez grande, de nombreuses fissures la parcouraient, particulièrement au sol mais il n'y avait pas de quoi s'inquiéter. Je m'installais pour la nuit quand Eldrensil se mit à parler.

-Je n'aime pas cet endroit.

-Je n'en ai que faire de ton avis Eldrensil.

-Va dormir ailleurs.

-Non je suis très bien ici merci et n'essaye pas de prendre contrôle de mon corps.

-De notre corps.

-Certainement pas.

Depuis ma rencontre avec l'âme il n'avait jamais réussi à reprendre contrôle du corps. Je me concentrais en permanence pour que ça n'arrive pas mais c'était épuisant. Et je ne pouvais dormir que sur une oreille chaque nuit. Eldrensil avait essayé de prendre plus d'une fois le dessus mais c'était un échec à chaque fois. Il disait qu'un jour, lorsque je serais concentré sur autre chose il passerait à l'attaque et je ne pourrais rien faire. C'était amusant de se dire que je partageais ma vie et mon corps avec un psychopathe qui voulait prendre contrôle de moi.

Une fois installé je me couchai sur le dos. Je regardais grâce à la lumière du feu les fissures du plafond. Certaines ressemblaient à s'y méprendre à des gravures. Je plissai les yeux pour mieux voir. C'était vraiment étrange, je pouvais presque lire une histoire avec les formes des fissures. Je suivais le cours des imperfections de la grotte vers la droite. Un cheval, une armée, un faucon... J'étais presque certain de les voir, mon imagination me jouait sûrement des tours. Une écriture ? Oui je croyais pouvoir voir un mot. Je me levai, soudainement en proie au doute. Je devais regarder ça de plus près. Le plafond était trop haut je devais trouver un moyen de m'en rapprocher. Je confectionnai rapidement une torche et aperçus un petit tas de pierre sur le côté. Je le positionnais de telle sorte que je puisse m'élever grâce à elles. Un pas après l'autre je me rapprochais de mon but. Mon tabouret de fortune avait un équilibre très incertain mais j'étais trop préoccupé par ma découverte pour y faire attention. J'approchais enfin suffisamment pour y voir quelque chose. Je tendis ma torche en avant pour illuminer les fissures étranges. Par tout les dieux, c'était de réels dessins, pas des fissures. Et là c'était un mot. Oui mais j'étais encore trop loin pour discerner les lettres, il fallait juste que je m'approche encore un peu. Je me mis sur la pointe des pieds et me penchai en avant. J'y étais presque. Encore un effort. Soudain un bruit d'éboulement retentit. Je me sentis perdre l'équilibre et tomber vers l'avant. La torche s'échappa de mes mains et je vis le sol venir très vite. Je me protégeai le visage de mes avant-bras et attendis le choc. Il vint très vite mais alors que je pensais m'écrouler lourdement au sol je continuai ma chute. Je venais de traverser le sol ! J'aurais dû faire attention à ces foutues fissures ! Bon sang j'allais m'écraser comme un vulgaire insecte. Je ne voyais toujours pas le fond, c'était totalement noir. Je tombais sans fin dans les ténèbres. La peur s'emparait de moi et je sentais Eldrensil tenter de prendre le contrôle mais je sentais aussi sa frayeur. Nous étions deux âmes paniquées qui voyaient leur fin arriver. J'allais vraiment mourir comme un idiot ! A quoi cela avait-t-il servi que je survive à tout ça si c'était pour mourir comme ça ?! Saloperie de Destin je n'aurai jamais dû te faire confiance. Tu n'as fait que de me trahir depuis le début. Je ne voyais toujours rien, tout mon corps était tendu. Je m'apprêtais à m'écraser à tout moment. À sentir mes os se casser d'un instant à l'autre. Le pire était de ne pas savoir quand. J'essayais tant bien que mal de ne pas avoir la tête la première, j'allais mourir, peut-être, mais il était hors de question que mon visage finisse en pâté pour Rizkal. Le choc fut soudain tout comme mon cri de surprise. J'atterris dans ce que je pensais être de l'eau. De l'eau gelée ! Je pris une respiration. Sous l'eau. L'eau entra dans ma gorge et je voulus tousser mais c'était impossible. Je ne savais pas nager ! Je devais réussir à remonter coûte que coûte ! Je battis des bras et des pieds malgré le souffle qui me manquait et l'eau qui s'infiltrait dans mes poumons. Je ne montais presque pas et ma vision se brouillait. J'étais en train de perdre la partie. Tout devenait noir et je n'arrivais plus à bouger. Mon corps glissa doucement vers le fond. Je perdis connaissance... Ou la vie.

Vous avez atteint le dernier des chapitres publiés.

⏰ Dernière mise à jour : Apr 17, 2017 ⏰

Ajoutez cette histoire à votre Bibliothèque pour être informé des nouveaux chapitres !

Condamné à VivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant