Alive - Tome 1 - Edité aux éditions HLab

21. Need to breathe

- Va te faire voir, Ayden.

Résolument décidée à l'ignorer, je dégage mon épaule de son emprise et fixe un point à l'horizon. Ce que je viens de dire  n'est pas vraiment professionnel, mais tant pis. Il semble réfléchir, je ne perçois aucun mouvement derrière moi. Je l'entends soupirer.

- S'il te plait, écoute moi.

- Je ne veux rien entendre. Et je n'ai rien à te dire.

Je croise les bras sur ma poitrine, comme pour me protéger. Je ne veux pas qu'il brise la carapace toute fraîche que je viens de me forger.

Il vient tout à coup se planter devant moi. Surtout, ne pas le regarder. Je reste immobile, bien décidée à l'ignorer, en imaginant mon frère Jules en train d'essayer de me faire rire pour ne pas céder.

- Je comprends que tu ne veuilles pas me parler. Je suis désolé d'avoir été un connard.

Au moins, il le reconnaît. Je crois qu'il n'a toujours pas compris que cette fois, ça ne suffirait pas... Son ton suppliant ne marchera pas. Pas maintenant que je sais jusqu'où son mépris peut aller. Délibérément, j'adopte une voix aussi dénuée d'émotions que possible malgré la colère qui bat dans mes veines :

- Tu peux l'être. Et maintenant, tu peux aussi  retourner t'occuper de ta copine ? J'étais tranquille, là. 

Je n'ajoute rien. Peut-être qu'il va enfin me foutre la paix ? Apparemment, j'en demande trop. Il fronce les sourcils et lève la voix, agacé :

- Je suis désolé ! Je me fous de cette fille, j'avais juste un truc à vérifier !

C'est la réponse la plus bizarre qu'on m'ait jamais faite. Est-ce que ce mec est fou ? Je me pose maintenant sérieusement la question. 

Je reste silencieuse et me décale légèrement sur ma chaise pour échapper à son regard. C'est le moment qu'il choisit pour se rapprocher de moi et amener son visage à quelques centimètres du mien. Quand il se penche vers moi, son regard me vrille. J'ai le réflexe de ramener mes genoux sous la chaise pour que ses jambes ne viennent pas malencontreusement me toucher. Il se radoucit à nouveau :

-Je m'en veux. Je ne voulais pas te faire de mal. Je te le répéterai jusqu'à ce que tu le comprenne. 

Sa voix est douce, empreinte de mélancolie. Je note avec amertume que c'est la première fois qu'il s'adresse à moi sans aucune trace d'agressivité. Dommage que ce soit pile au moment où il a franchi les limites à ne pas dépasser. 

L'intensité dans son regard me fait baisser les yeux. Le feu qui se déclenche dans mon ventre est insupportable. Je recule brusquement ma chaise et me lève d'un bond en lui rétorquant sèchement :

- Tu as fini pour ce soir, en tout cas.

Il se redresse, surpris. Je ne lui laisse pas le temps de réagir, et je rentre sans me retourner.

Ouf, j'ai réussi à ne rien lâcher. J'ai repris le contrôle, en dépit de mon corps qui semble décidé à me plier à ses quatre volontés... J'ai l'impression qu'un rouleau compresseur m'est passé dessus à force de lutter contre l'envie de l'écouter. Je suis complètement vidée.

Juste avant que j'atteigne notre table, Erin m'attrape par le bras, essoufflée et échevelée. Sa peau est luisante de sueur, signe de l'énergie qu'elle a dépensé ce soir. Son maquillage a coulé. Sa voix, qui monte dans les aigus, me transperce douloureusement les tympans. 

- Mais où  t'étais ? Ça fait un quart d'heure que je te cherche partout !

Ses bras s'agitent dans tous les sens en même temps qu'elle me parle.