Partie sans titre 39

173 13 8
                                    

-Pas trop stressé?

Castiel tire sur la manche de sa tenue de scène, passe la main dans ses cheveux et regarde vers la porte.

-J'en rêve depuis que je suis gosse, pourquoi je serais stressé?

Je grimace en voyant qu'il est limite paniqué. Il a travaillé si dur ces dernières années pour réussir à atteindre cet objectif. Le groupe part sur scène dans une vingtaine de minutes, moi je pourrai rejoindre les spectateurs par le passage des VIP pour profiter du concert comme une authentique groupie que je suis.

Je n'étais pas trop sure que ce soit une bonne idée d'être dans la loge avec eux. Le voir aussi anxieux me retournait l'estomac, et j'avais plus l'impression d'être dans les jambes de tout le monde qu'au bon endroit.

Le batteur assis dans un des fauteuils faisait tourner ses baguettes, le bassiste craquer ses doigts. Lysandre observait son reflet dans la glace, puis fermait les yeux en inspirant calmement, sans doute en train de se concentrer ou de se remémorer les paroles de la première chanson. Castiel lui tournait en rond comme un lion en cage.

-Je peux même pas fumer une clope, ça me ferait pourtant pas de mal..

Il passe une main du côté de l'oreille où il pose d'ordinaire sa cigarette de secours. Moi je restais assise sur une table, une position que je n'avais pas quittée depuis mon arrivée malgré le côté inconfortable. J'essayais de me faire aussi petite que possible.

-Tu veux un câlin?

Ses potes gloussent et Castiel sourit en leur faisant un fuck bien sentit.

-Putain ouais!

Il s'approche et me serre à m'étouffer. Le regard des autres ressemblerait presque à de la jalousie. Je resserre mes bras autour de sa taille, ferme les yeux pour les oublier et me gorge de son parfum.

Je sens sous son t-shirt toute la tension qui l'habite. Ses muscles sont noués et contractés. Je glisse mon nez vers son oreille.

-Embrasse-moi.

Il ne se le fait pas dire deux fois. Ses lèvres s'écrasent sur les miennes brusquement puis il semble se rappeler qu'il y a quelqu'un de l'autre côté et il se fait plus doux. Je glisse ma langue contre la sienne, l'embrasse jusqu'à ce que sa respiration soit moins hachée, et les muscles de ses épaules moins crispés.

Quelqu'un frappe à la porte et annonce cinq minutes. Les garçons se lèvent et franchissent la porte un à un, le batteur se tourne vers nous avant de sortir.

-On peut pas commencer sans toi Cast, lâche ton doudou.

Il se marre en se barrant. Castiel pose ses mains sur mes joues, dépose un dernier baiser.

-Il faut que j'y aille.

-Tu va tout déchirer.

Il dirige ses pas vers la porte et je l'arrête juste un instant.

-Donne tout ce que tu a bébé.

Le sourire qu'il me fait quand je l'appelle comme ça me fait frissonner. C'était sortit sur un coup de tête, je me disais que ça le détendrai surement mais c'est comme si la tension était montée d'un cran.

-C'est ce que je fais toujours. A tout à l'heure.

Et le voilà partit rejoindre les autres dans les coulisses puis sur scène. Moi je suivais le chemin que l'on m'avait indiqué pour rejoindre la foule des spectateurs. Je me faufilais entre les gens pour m'approcher un peu plus. Je ne voulais rien rater mais en même temps je me sentais mal d'être entourée d'autant de monde.

Les concerts et les foules en délire, c'est pas vraiment mon truc. Je ne suis là que pour soutenir Castiel et voir ses premiers pas sur scène. En ce qui me concerne, je trouve la musique plus claire dans des écouteurs. Le brouhaha ambiant, les cris, les sifflements, les flashs des appareils photos ou des téléphones. Tout ça c'est un peu trop pour moi.

Un battement régulier s'élève, la foule se calme un instant et je tourne mon regard vers la scène ou le rideau se lève révélant le batteur en train de taper sur l'un de ses tambour. La lumière est dirigée uniquement vers lui mais on peut distinguer les silhouettes des autres dans la semi obscurité.

Un part un, les musiciens sont éblouis par des spots et je retiens ma respiration quand Castiel se trouve sous la lumière. Celle-ci éclaire enfin Lysandre, le micro à la main qui jette un regard à chacun de ses camarades. Il accueille son public tandis que les garçons entament une mélodie assez monocorde, comme pour lui faire un fond sonore le temps de son speech d'intro.

Lorsqu'il demande si nous sommes prêts à vibrer au son de leur musique, je cris en cœur avec les autres, captivée moi aussi par le charisme qu'il dégage.

La musique change alors de rythme, presque imperceptiblement et le concert débute vraiment. Ils sont époustouflants. J'ai l'impression en les observants sur scène de voir un autre Castiel et un autre Lysandre. Je ne connais pas encore assez les autres membres de leur groupe pour savoir si cette différence est aussi flagrante chez eux.

Castiel a les yeux qui brillent, un sourire que je ne lui ai jamais vu et il fait corps avec son instrument, les autres musiciens et le publique. Lysandre ne se contente pas de chanter, il bouge sur scène, ponctue les paroles de ses chansons de mouvements de bras, emporte le publique avec lui.

J'arrive à détacher mon regard de la scène pour observer la foule qui se presse autour de moi. Ils bougent, dansent, répètent les paroles et crient tous à la fois. La seule chose qui les unis et les portent, c'est ce regard qui ne quitte pas la scène.

J'avais sous les yeux un aperçu de la folie qui lie des musiciens et chanteurs à leur public. Un univers entier s'offrait devant le groupe et je me sentais d'un coup à part, comme en décalage. Je n'étais pas un membre du groupe, je n'étais pas la foule en délire, j'étais juste Marie, la petite-amie de Castiel. Celle qui partirait un jour sur les mers pour poursuivre son rêve d'observer les micro-organismes sous-marins et peut-être qui sait, découvrir une espèce de poulpe gigantesque inconnu.

Je me sentais d'un coup oppressée, comme lors de mes crises d'agoraphobies de mon adolescence. Je me frayais un chemin jusqu'à l'accès VIP, montrant mon badge pour qu'on me laisse sortir. Je parcourais les couloirs désormais déserts, évitant de me prendre les pieds dans les câbles qui trainaient.

J'arrive enfin jusqu'à une sortie de secours. J'ouvre la porte et prends une grande bouffée d'air glacée, me mettant à respirer plus confortablement. Ce n'est pas mon univers.

Je me demande comment on va pouvoir gérer nos vies avec Castiel s'il continue sur sa lancée et que je continue sur la mienne. Est-ce qu'un jour nos chemins seront si éloignés l'un de l'autre que nous nous perdrons?

J'ai la nausée et je vomis tout ce que mon estomac pouvait contenir entre deux poubelles comme un ivrogne un soir de beuverie. J'entends dernière moi la porte que j'ai prise grincer un instant avant de claquer super fort. Je m'essuie la bouche puis me retourne pour constater qu'il n'y a pas de poignées de ce côté.

Je peste en sortant un mouchoir de ma poche pour m'essuyer la bouche, cherchant ensuite mon portable avant de réaliser que celui-ci ainsi que mon portefeuille et mes autres affaires sont restées à l'intérieur. Je me colle dos au mur en me cognant doucement l'arrière du crane. Ce que je peux être bête quand je m'y met....

Un tour vite fait du bâtiment et je constate que je ne peux pas y rentrer malgré mon pass VIP qui lui était heureusement resté accroché sur le devant de mon t-shirt. Les portes sont fermés puisque le concert a débuté depuis longtemps.

La fille banaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant