Ma soeur Lucie *COMPLÉTÉ*

Chapitre 15: La malédiction du Temps

Média: Lucie de dos.

Je reste perplexe encore quelques temps. Lucie affiche un sourire en coin, fière de la stupéfaction qu'elle vient de me causer. Je m'approche un peu plus tout en restant prudente. C'est ce que Dale m'a demandé de faire... Ah! Mais qu'est-ce que je fais à penser à lui?? Le sourire de ma soeur s'élargit un peu plus. D'après ce qu'on m'a dit, Lucie serait invincible. Aurait-elle le pouvoir de lire les pensées?

- Alors? Tu viens méditer? demande-t-elle. En échange, je promets de te dire tout ce que tu souhaites sur la malédiction.

Elle sait comment faire du chantage, je dois l'avouer. Et peut-être est-ce enfin ma chance ? Peut-être mes questions seront enfin répondues? Je m'approche alors d'elle et m'assoit à ses côtés. Alors que mes genoux dépassent la falaise, une roche dégringole jusqu'en bas et met un certain temps avant de cogner contre le sol. Je déglutis, imaginant mon corps frêle faire cette chute. La main de Lucie se détache de sa prière et se pose sur mon genou. Je tressaille.

- Il faut se calmer et trouver la paix en soi pour parvenir à calmer sa peur du vide, dit-elle paisiblement.

J'avais littéralement l'impression de me retrouver dans un film. Prenons Star Wars par exemple. Lucie serait Yoda et je serais Luke. Mais je chassais toutes ces pensées stupides de ma tête malgré que je ricanais intérieurement. J'avais l'impression de me sentir de nouveau parmi une famille. Sam, Dale, moi et ma soeur, une famille? Ce serait super, mais la menace des chasseurs est toujours aussi pesante. Pourtant, depuis que j'ai retrouvé ma soeur, j'ai l'impression que plus rien ne peux m'empêcher de la perdre, que plus rien n'est dangereux. J'ai l'impression de reprendre peu à peu une vie un tout petit peu normal. Je repense à mon appartement hors de prix pour mon salaire pitoyable de serveuse et de monitrice en été. Je me demande ce qui est arrivé à tout les gens que je côtoyais, ce qui est arrivé à Janie, ma meilleure amie. Et, en quelque sorte, je m'ennuie incroyablement de cette vie qui était mon quotidien.

- Si tu veux que ça fonctionne, fais la paix avec toi-même ou fais le vide dans ta tête, mais c'est beaucoup plus difficile à réussir, ajoute Lucie.

Elle reprit sa drôle de position, paumes vers le ciel, poignets collés et ferma de nouveau les yeux.

- À quoi ça sert? Les mains, à quoi ça sert de les positionner ainsi? demandai-je.

- Oh, c'est une sorte de façon de canaliser son énergie. Si tu réussis à faire le vide, tu réussiras à oublier tes bras qui sont dans les airs.

C'était assez étrange comme explication mais j'acquiesçai de la tête avant d'admettre que rien depuis la mort de mon père n'avez été normal. Ce que disait Lucie était maintenant quelque chose de normal pour moi. Enfin, je devrais depuis tout ce temps...

Je me positionna exactement comme Lucie. J'essayais de laisser mes bras en suspension comme elle, mais finalement la douleur me prit et je dû les baisser. Je ne comprenais pas comment Lucie faisait donc je le refis encore quelques fois, sans y parvenir. Je pensais sans cesse à Jani à mes amis, à mes collègues de travail, à mes grands-parents encore en vie, à tout ceux que j'avais laissés derrière moi pour retrouver Lucie. Se demandaient-ils où j'étais? Cela fait quand même un certain temps que je suis partie. Peut-être un mois ou deux, j'ai perdue la notion du temps. J'ai disparue d'un jour à l'autre, est-ce que je leur manque? Et puis, vais-je les revoir un jour? Si jamais la réponse était non, je n'aurais pas eu le temps de leur dire adieu, de les serrer dans mes bras et de leur dire à quel point je les aimais. Mes bras tombent encore une fois de fatigue alors que des gouttes de sueur perlent sur mon front. Je sens soudainement des larmes, subites, emplir mes yeux. Ils me manquent énormément. Je pense aussi à mon père. Si je retourne dans ma ville - car Dieu sait où je suis présentement - ce ne sera plus pareil. Mon père ne sera plus là pour me téléphoner à des heures tardives de la nuit.