Colocataires - t.k

Chapitre Un

"Je n'ai pas l'intention de partir," fit-il.

Rien, sur son visage, ne trahissait ce qu'il pensait. Il semblait complètement stoïque, comme si cette histoire ne le concernait absolument pas, qu'elle ne le touchait pas, qu'elle ne l'affectait pas. Et pourtant, dieu seul sait qu'il en est le principal protagoniste.

"Alors... Hyung, je compte sur toi pour prendre soin de moi."

Sur ces paroles, il se recourbe, et je suis sûr que si je sortais mon rapporteur, je pourrais mesurer 90 degrés pile. Urgh, trop parfait. Il me lance un dernier regard puis sort, en refermant silencieusement la porte.

Et à partir de maintenant, je vais devoir vivre avec cet être presque trop parfait pour être humain.

Mettez nous à côté et comparez nous donc, je vous en prie : vous allez constater de vous-même qu'on est vraiment trop différents. D'un côté, il y a lui et ses cheveux noirs parfaitement laqués et dont chaque mèche retombe sur son front de manière presque calculée, lui et son uniforme parfaitement repassé, sans aucun pli, lui et ses chaussures qui brillent comme si c'était la première fois qu'il les utilisait. De l'autre, il y a moi, les cheveux en pétard (mais ne vous y trompez pas, je passe énormément de temps chaque matin afin de leur donner cet aspect messy que j'aime tant), et un look vraiment décontracté que j'aime beaucoup (surtout parce qu'il est confortable).

Je n'ai pas l'intention de le jeter dehors, ni de le mettre mal à l'aise. Je veux qu'on ait une bonne relation de colocataires, et pourquoi pas, d'amis. Je ne le déteste pas, même si nos relations n'ont pas eu le meilleur commencement qui soit.

Jungkook est une des rares personnes que je détestais quand j'étais petit - et c'est tellement rare qu'il pourrait l'inscrire sur son CV et en être fier.

Nos parents se connaissent depuis bien longtemps : ils sont des amis très proches et se voyaient énormément, malgré les kilomètres qui séparaient les deux couples. Et ils nous entraînaient dans leurs rencontres, puisqu'on était trop jeunes pour rester seuls chez nous. Enfin, c'était le cas pour moi. Jungkook pouvait rester chez lui puisqu'il y avait son grand-frère, mais ses parents le ramenaient toujours quand ils apprenaient que j'allais venir.

Lorsque nous étions petits, il ne ressemblait pas du tout à ça. Enfin, si. Mais il a beaucoup maigri. Quand on était petits, il était plus enrobé. Rassurez-vous, ce n'était pas la raison pour laquelle je ne l'aimais pas - jamais je ne détesterai quelqu'un juste à cause de son physique, je suis quand même Kim Taehyung ! De plus, je le trouvais vraiment mignon, comme un petit chérubin qu'il fallait protéger. Non, franchement, si ça ne tenait qu'à une question de physique, je n'aurais pas eu de problème à le côtoyer.

Maintenant que j'y pense, je ne sais pas trop pourquoi je ne l'aimais pas. C'était peut-être sa manie de se cacher derrière la jupe de sa mère dés que j'arrivais ? Ou la manière dont il pleurnichait tout le temps ? Ça pouvait aussi être dû au fait que, dés qu'on jouait ensemble, si jamais il m'arrivait de faire quelque chose qui ne lui plaisait pas, il allait se plaindre à son grand-frère, qui venait me gueuler dessus, avant qu'on se dispute... plus ou moins violemment (oh, faites pas genre, on s'est tous bagarrés quand on était gosse. Tous, sauf peut-être Jungkook). Ou le fait qu'il m'ignorait beaucoup, même quand j'essayais de lui parler. Ou un mélange de tout ça.

Quoiqu'il en soit, j'ai rapidement appris à le détester et à l'ignorer, jouant principalement avec son grand frère, lorsque mes parents me traînaient de force chez les Jeon, ou qu'ils venaient chez nous. Ce qui n'était pas arrivé depuis si longtemps que je les avais presque oubliés.
Presque six ans ! Nos parents préféraient dîner dehors, maintenant que Jungkook et moi n'étions plus enfants. De toutes façons, même s'ils avaient remis les pieds chez mes parents récemment, je ne le saurais pas puisque j'avais quitté le domicile familial il y a de cela plusieurs mois, en juillet dernier.