Chapitre 3

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Willow était une nouvelle fois devant l'entrée du village. Durant la dernière semaine, elle avait été divisée entre deux choix. Soit elle restait prudente et sage, soit elle retrouvait la jeune fille et essayait de surprendre une nouvelle conversation afin de connaître l'état de ses soupçons. Cette deuxième solution l'avait malheureusement charmée. Elle savait que cela était dangereux, que c'était le meilleur moyen de se faire prendre, mais tant pis. Elle était trop curieuse, certes, mais c'était aussi une bonne chose. Elle pourrait savoir si elle avait besoin de s'inquiéter ou non. Du moins, c'était ce qu'elle se disait pour se convaincre de son choix. Alors, après sa décision prise, elle était sortie de la forêt habillée du même cuir noir que la dernière fois, et elle s'était dirigée vers le village jusqu'à parvenir à l'entrée. Au lieu de passer par la porte, elle y grimpa pour arriver jusqu'aux toits des immeubles les plus hauts, afin de ne plus être vue par les habitants. Sur les toits, elle aurait un meilleur champ de vision. Elle regarda le village d'en haut mais ne trouva pas la jeune fille blonde aux yeux bruns qu'elle avait heurtée à la bibliothèque et qui l'avait reconnue. Elle continua à se déplacer sans la trouver. Au bout d'une demi-heure, elle avait déjà fait le tour du village. Elle décida d'en entamer un second mais lorsqu'elle arriva au quatrième immeuble, elle vit des cheveux d'un blond pastel. C'était elle. De ce qu'elle pouvait apercevoir d'en haut, elle remarqua que son teint était aussi pâle que le sien. La jeune fille entra dans l'immeuble sur lequel Willow était. Celle-ci attendit quelques minutes. Enfin, elle s'aggripa à un tuyau qui se trouvait à l'arrière du bâtiment, pour que personne ne puisse la voir. Elle commença à descendre très lentement. À quelques centimètres d'elle se trouvait des fenêtres. Elle espérait voir celle de l'une des pièces de la jeune fille. Elle s'arrêta à la première observée. Il n'y avait personne mais, à côté de la vitre, se trouvait une photo d'une jeune fille aux mêmes cheveux blonds, aux yeux presque noirs et à la peau pâle en compagnie de deux autres fille du même âge. Willow était persuadée qu'il s'agissait des mêmes filles robotiques que l'inconnue avait pour amies. Elle décida d'attendre le retour de la jeune fille sachant que la pièce était sa chambre car elle pouvait apercevoir un lit, une armoire et un bureau. Au bout d'environ un quart d'heure, Willow était encore accrochée à son tuyau. Elle commençait à se demander si la jeune fille n'était pas parti, mais celle-ci entra dans la chambre à ce moment même. Elle ferma la porte de sa chambre. Elle était au téléphone et, apparemment, la discussion n'était pas des plus courtoises. Les yeux de la jeunes filles étaient colériques et ses joues, habituellement couleur opale, étaient désormais rougies par son mécontentement. Willow n'arrivait pas à entendre la conversation. Les murs devaient être bien isolés. Les seuls mots qu'elle arrivait à distinguer étaient « Je t'assure » et « De toute façon … jamais vue ». Peut-être que la jeune fille parlait d'elle. C'était ce qu'elle redoutait. Si la conversation était à son propos, cela signifiait qu'elle n'avait pas abandonné, qu'elle ferait peut-être des recherches, qu'elle la retrouverait. Elle ne devait pas la retrouver, elle ne pouvait pas. Ce serait la fin. La jeune fille raccrocha et jeta son téléphone sur son lit. Enfin, elle sortit de sa chambre. Willow se demanda si elle pouvait entrer. Cela pourrait peut-être l'aider. Elle essaya d'ouvrir la fenêtre. Il fallait qu'elle la fasse coulisser jusqu'en bas. Elle essaya plusieurs fois mais n'y parvint pas. La seule chose qu'elle avait réussie à faire était s'écorcher au mur de pierre. Le sang coulait sur son avant bras mais elle n'y prêtait pas attention. Elle y était habituée et n'avait jamais été sensible à la douleur. Alors, elle monta précautionneusement sur le rebord de la fenêtre. Elle y parviendrait peut-être mieux ici. Elle essaya une fois, deux fois, trois fois, quatre fois... enfin ! La fenêtre s'ouvrit en lui cassant un ongle. Elle la fit coulisser et entra à l'intérieur de la pièce, sa maigreur lui permettant d'y arriver aisément. Il fallait croire que les conditions de la vie en forêt pouvaient parfois servir. Juste en dessous de la fenêtre se trouvait le bureau de la jeune fille sur lequel elle avait pu observer, peu de temps auparavant, une photo. Elle y mit un pied, puis deux. Enfin, elle sauta à terre, après avoir fermé la fenêtre. Elle examina la chambre. Les murs et les meubles étaient couleur bois, celle des meubles étant un peu plus claire. Le plafond épousait la forme du toit et n'était donc pas droit. Willow décida de fouiller la pièce. Ce n'était pas quelque chose de bien ni d'honnête, mais il le fallait. On ne devait pas la découvrir. Elle devait être seule. Sinon, elle ne pourrait pas vivre. Elle commença par le bureau. Elle ouvrit tous les tiroirs, les vida et les rangea aussitôt car elle n'avait rien trouvé. Sa venue ne devait pas être remarquée. Le bureau fouillé, elle continua par le lit, défaisant les draps puis les replaçant car, encore une fois, elle n'avait rien trouvé. Elle regarda aussi en dessous du lieu de sommeil ; toujours rien. Elle poursuivit sa recherche par l'armoire. Elle l'ouvrit et regarda derrière les vêtements et la penderie. Elle ne fut pas plus avancée qu'avec ses dernières fouilles. Elle allait la fermer quand elle vit quelque chose de rouge dépasser de la partie intérieure d'une des portes du meuble. Elle retira les deux vestes qui la recouvraient et eut le plus grand choc de sa vie. Les amies de la jeune fille avait raison, elle était obsédée par l'histoire de Willow. Celle-ci contempla avec horreur ce qu'elle avait en face des yeux. L'inconnue qu'elle avait heurtée enquêtait sur elle. Sur l'une des portes son armoire se trouvaient des pages de journaux arrachées parlant de Willow, des photos d'elle, de sa mère, de son père. Il y avait même des photos qu'elle ne connaissait pas. Certaines photos et pages de journaux étaient reliées par du fil rouge. Comment la jeune fille avait-elle réussi à se procurer tout ça ? Les yeux de Willow s'arrêtèrent sur l'une des nombreuses photos. Ses yeux devinrent humides et ses mains tremblaient. Revoir cette petite image était comme revivre le pire moment de sa vie. Celui qui avait fait d'elle ce qu'elle était. Tout ce sang, ces jolis yeux bleu vif devenus vides. Elle referma les portes de l'armoire avec violence, bouleversée, prête à partir, quand elle entendit la poignée de la porte tourner. Mince, elle n'avait pas fait assez attention. Alors, avec une vitesse impressionnante causée par l'adrénaline, elle se glissa sous le lit de la jeune fille, sa maigreur l'aidant encore une fois. Des pas se firent entendre dans la chambre. Willow pouvait apercevoir des bottes à talons marrons. Elle reconnut la voix de la jeune fille grâce à ce qu'elle avait pu écouter lorsqu'elle avait surpris sa discussion avec ses amies robotiques. À moins que quelqu'un d'autre ne soit entré avec elle, elle ne pouvait parler à personne, son téléphone étant sur son lit. Willow espérait pouvoir tirer des informations importantes de ses paroles quand elle se rendit compte d'une erreur qu'elle avait commise. Elle avait oublié de ranger dans l'armoire, les deux vestes qui recouvraient l'enquête de la jeune fille. Celle-ci allait se rendre compte de sa venue.

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