Le ciel gris est devenu noir

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Maëlla se souvient du départ de Valentine il a maintenant six mois. Comme si c'était hier. Six mois de moqueries, de menaces, rires. Elle n'a plus la force de répondre, elle se laisse faire, laisse les larmes couler. Elle n'en peut plus. Mais depuis trois jours, elle ne peut même plus aller au lycée. Un mal de ventre terrible lui ronge les entrailles et la cloue au lit. Maëlla est un peu soulagée de ne pas devoir y aller, mais elle a encore peur. Et si demain elle devait y retourner ?

Chaque jour elle a écrit dans le carnet où figurait sa première lettre à l'intention de ses camarades de classe, le remplissant de ses pensées noires. Mais ce matin, elle n'a même plus la force d'écrire. Lever son crayon est au-dessus de ses capacités.

Sa chambre est devenue son antre secrète, elle y reste enfermée, ne sort qu'un jour sur trois pour aller au lycée, pour aller affronter la réalité. Ce matin elle n'a pas pu. Demain elle devra y aller.

L'idée lui a déjà traverser l'esprit. Mettre fin à ses jours. Elle s'était vite reprise. Mais ce matin, elle est seule dans l'appartement, sa mère au travail, Iris aussi. Personne pour la sauver. Lui tendre une main chaleureuse. Elle est seule, étendue sur son lit dans la faible lumière que ses volets fermés laissent passer. Et elle pense à cette perspective de mettre fin à ses jours. Sans peur, juste avec curiosité.

Les rires qu'elle n'entend pas et les moqueries dont elle se souvient la blessent. Elle se recroqueville encore un peu plus sur elle-même. Elle ne pleure plus. Ça ne sert à rien.

Si tu pouvais revenir
Comme dans mes souvenirs

Tout serait plus simple
Tout serait moins dur

Finalement, elle a réussi à écrire. Écrire rend les choses plus vraies, plus réalistes et elle sent encore plus mal. Mais étonnement, ça lui fait du bien. Elle préfère se faire du mal en écrivant qu'avec la mutilation. Le sang la dégoûte. Si elle se suicide, ce sera proprement.

Ses pensées la dégoûte un moment, mais finalement, elle n'a rien à perdre. Alors elle continue.

Je suis quelqu'un d'égoïste
Qui a une vie trop triste
Je me suis trop attachée
Et je laisse les autres me briser

Je m'étais juré d'être forte
Mais on s'en fout, j'suis déjà morte.

Ta Maëlla qui n'enverra jamais cette lettre. Parce qu'elle a trop mal. Parce que tu ne réponds plus. Et parce que je ne sais pas à qui l'envoyer. Sûrement à toi

Valentine.

Encore et toujoursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant