7.

61 16 18
                                    

Le lendemain, je sonnai chez Elodie accompagnée des enfants. Je ne savais pas pourquoi, mais j'avais peur de les laisser avec Tom. Elle vint rapidement m'ouvrir dans une robe à fleurs bleue qui mettait son teint mate et son ventre en valeur. La voir enceinte fit monter une légère vague de bonheur en moi. Je me jetai donc dans ses bras avant qu'elle nous invite à entrer.

L'appartement de Kevin et Elodie se trouvait place de la Bastille. Il était lumineux, spacieux et décoré avec goût, Elodie savait faire son travail. Les enfants s'empressèrent de courir dans la cuisine, elle leur avait préparé un petit goûter.

— Lavez-vous les mains avant, les enfants ! dis-je depuis le salon.

— Tu veux boire quelque chose ?

— Une bière, si tu as.

— Je dois bien en avoir une qui traine.

Elle disparut dans la cuisine et au même moment, Camille et Quentin, les enfants de Kevin, rentrèrent chargés de sacs de courses. L'adolescent, que je n'avais pas vu depuis longtemps, me dépassait maintenant d'une bonne tête et sa petite sœur avait perdu ses joues de bébé. Ils me firent la bise avant de rejoindre les autres dans la cuisine. J'entendis Elodie confier la surveillance des enfants à Quentin puis elle revint avec ma précieuse et une bouteille d'eau sur un plateau. Elle prit la petite que j'avais entre les mains et m'invita sur la terrasse côté cour afin que nous puissions discuter tranquillement.

— Alors, que se passe-t-il ?

— Plein de choses.

Je sentais à nouveau ce poids sur mon cœur. Cette lourdeur que je trainais avec moi m'épuisait, m'enlevait l'envie de tout. Je me sentais si vide et fatiguée, épuisée. Et sans que je puisse expliquer pourquoi, je me mis à pleurer. Elodie vint immédiatement me prendre dans son bras libre. Je lui rendis son étreinte et continuai à pleurer silencieusement.

Une fois calmée, elle disparut et revint avec une boîte de kleenex.

— Ça me rappelle des souvenirs, me dit-elle en désignant la boîte de son doigt.

— Madame kleenex ?

— C'est tellement cliché ! railla-t-elle.

— Ils auraient dû nommer leur truc cleenext. Allez, nettoie-toi le visage et passe à autre chose.

— Ça me rappelle aussi que, normalement, je suis la pleureuse du groupe...

Je restai silencieuse, le bout de mes chaussures étant devenu subitement intéressant. Elle posa une main sur mon épaule et m'obligea à la regarder.

— Que se passe-t-il, Jess ? Où est passée la fille forte qui me disait de tenir bon quand tout allait mal ?

— Arrête, dis-je au bord des larmes. Je n'ai pas besoin de ça.

— Qu'est-ce que tu veux alors ? Passer ton temps à pleurnicher ? Ça ne te ressemble pas.

Jess est étrange. Jess a changé. Ça ne te ressemble pas... Mais que savaient-ils réellement de moi ? Pourquoi n'aurais-je pas le droit de pleurer ?

— Tu crois vraiment que ça plairait à tes enfants de te voir pleurer tout le temps ? Ils n'ont pas besoin d'une maman dépressive.

Son ton était doux mais ferme. Et dit ainsi ça pouvait paraître dur mais elle avait raison. Voilà ce que j'aimais chez elle : sa franchise. Contrairement à moi, Elodie ne se gênait pas pour dire ce qu'elle pensait, même si parfois ça lui ramenait des problèmes. Et contrairement à moi, elle ne souhaitait pas faire plaisir aux gens qui l'entouraient, elle se contentait d'être elle-même, pour son bien, et pas pour faire le bonheur des autres. C'est donc d'une petite voix que je lui avouai :

FEMMEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant