Perdue dans le noir - Part1

Chapitre 8

Je ne saurais dire combien de temps j'étais restée devant la porte de ma chambre à l'écouter pleurer. Le courage me faisait défaut pour l'affronter. J'aurais dû me précipiter, sécher ses larmes et la prendre dans mes bras.

Mais le voulait-elle ?

- Anna, appela Camille.

Cette fois j'entrais, nerveuse. Elle était assise dans mon lit. J'avançais doucement et allais m'asseoir à ses pieds.

- Toi aussi ? Tu es comme moi ? demanda-t-elle des trémolos dans la voix.

- Un vampire, oui.

- Pourquoi nous ?

Combien de fois m'étais-je posée cette question ?

- Je suis désolée. J'aurais dû te prévenir.

- Oui, il fallait me le dire !

- Pardon Camille...

- J'ai tué cette femme, souffla-t-elle, la voix chevrotante. Et j'ai aimé ça. Elle se débattait, elle suppliait mais c'était plus fort que moi. J'aimais le goût de son sang, j'en voulais plus !

Entendre ces mots me fît froid dans le dos, mais je connaissais cette sensation. Je ne savais pas quoi lui dire. Il n'y avait rien que je puisse faire pour ramener cette femme d'entre les morts. Malgré mon impuissance, je pouvais au moins être là, pour elle.

Camille s'allongea et posa sa tête sur mes genoux. D'une main tremblante je lui caressais les cheveux. Comme quelques années plus tôt lorsque nous nous étions retrouvées seules au monde après la mort de nos parents. Encore une fois, notre univers s'écroulait et nous n'avions aucun contrôle sur les événements.

Après de longues minutes, elle s'endormit. Je rabattis la couverture sur elle et sortis de la pièce sans faire de bruit. Adam était absent, tout comme le cadavre dans la cuisine. Cette maison, qui avait abrité ma famille et nos moments de joie, n'avait plus rien du foyer que j'avais connu. Je ne m'y sentais plus en sécurité. Surtout maintenant, alors qu'il y avait du sang partout.

Parce qu'il fallait que je m'occupe l'esprit et le corps, j'entreprenais d'effacer les traces du carnage. À genoux sur le sol, je frottais de toutes mes forces, je voulais que l'odeur de la mort disparaisse. Mais, comme je savais que je n'oublierai jamais tout ce que j'avais vu ces derniers jours, je compris que cette odeur resterait ancrée.

Adam rentrait après la tombée de la nuit. Camille dormait toujours, je vérifiais régulièrement qu'elle était toujours dans son lit. Le vampire était trempé et couvert de boue. Je l'observais, il avait l'air furieux. Nos regards se croisèrent, le sien était plein de colère. Mais elle n'était pas dirigée contre moi. Sa seule cible, c'était lui-même.

- Elle dort, dis-je à voix basse.

- Ne la quitte pas des yeux. Si elle s'en prend encore à quelqu'un, le prochain corps que j'enterrerai sera le sien, menaça-t-il.

- Elle était seule, comment voulais-tu que ça se passe ? m'énervais-je.

- Elle a pratiquement décapité cette femme avec ses dents Anna, avec ses dents ! insista-t-il.

- J'ai tué une humaine à l'atelier, pourquoi suis-je toujours en vie ? le provoquais-je.

- Parce que c'est moi qui l'ai tué. J'ai appuyé sur la détente.