ANNA

Prologue

Le jour où j'ai ouvert les yeux, ne fut pas le même jour que vous.

Non, je n'ai pas pleuré, je n'étais pas reliée à ma mère par un cordon ombilical. Je n'étais pas non plus un petit être visqueux, ridé et plein de petits plis.

Le jour où j'ai ouvert les yeux, je n'ai vu qu'une lumière blanche qui m'a donné mal à la tête, elle a ébloui mes yeux avant que je ne m'y habitue progressivement.

Puis j'ai entendu ce son régulier, monotone et agaçant qui suivait les battements de mon cœur.

J'étais en vie, pourtant, au fond, j'étais persuadée d'être morte.

Respirer m'a paru nouveau. Au début, j'ai suffoqué avant qu'on ne m'aide à inspirer puis expirer normalement jusqu'à ce que ça ne devienne un mécanisme. L'air m'a semblé toxique la première fois, mauvais pour moi, et j'ai cru sentir mon sang bouillir dans mes veines alors que j'avais froid.

« Où suis-je ? » me souviens-je avoir demandé d'une voix étrange un jour, comme si ce n'était pas la mienne. C'est à cet instant qu'une femme m'a expliqué que j'étais dans un institut de soin et qu'ils s'occuperaient de moi.

Mais qui étaient-ils ?

Pourquoi étais-je ici ?

Que fallait-il soigner ?

Ce fut ainsi durant quelques années, j'étais coincée dans un bâtiment aux murs blancs, aux plafonds blancs, au sol blanc, aux lits blancs.

Tout était blanc.

Et moi, moi... je restais amnésique.

En plus de n'avoir aucun souvenir, je ne savais pas ce que c'était dehors.

Est-ce que c'était grand ? Petit ? Dangereux ? Magnifique ? Jamais je n'avais touché dehors, jamais je n'avais effleuré dehors, je n'avais même pas pu poser le pied sur dehors.

J'étais ignorante.

Ignorante de ma propre identité.

Ignorante du monde dans lequel je vivais.

Je n'étais qu'une fille, une patiente dans un institut blanc qui ne me laissait pas découvrir dehors.

Si on me posait la question, si on me demandait qui j'étais.

Ma simple réponse serait ...

Je m'appelle Anna, et je suis malade.

Mais un jour, dehors m'appartiendra.