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Chapitre 3 ~ À l'Extérieur

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Première partie : Dehors

Chapitre 3 : À l'Extérieur

Mes paupières sont lourdes lorsque je reviens à moi et quand j'inspire la première fois, mes poumons brûlent littéralement ce qui me fait suffoquer et tousser sans pouvoir m'arrêter. Mes muscles se raidissent, mes nerfs se bloquent et j'ouvre les yeux brusquement. D'abord, la lumière m'aveugle, ce qui me fait plisser les paupières. Autour de moi, tout semble blanc, totalement blanc, comme s'il n'y avait rien.

Et je tousse encore et encore, jusqu'à en cracher du sang sur un sol vert qui me gratte les avant-bras. Je serre les étranges brindilles entre mes doigts et me relève sur les genoux. Je ne sais pas où je suis, ni comment j'ai atterri là. Je me souviens juste avoir quitté l'institut, la tête lourde, la bouche pâteuse... certainement à cause de la piqûre.

Quand ma toux se calme, je peux enfin relever la tête et regarder autour de moi, ma vue s'est habituée à la clarté, je découvre enfin à quoi ressemble dehors.

Et c'est désastreux.

Ce n'est pas ce à quoi j'imaginais. Je ne pensais pas que le ciel était gris, je pensais au soleil et à sa chaleur. Je n'imaginais pas le sol froid, ni l'air brut et brûlant. Et le paysage... il est catastrophique. Autour de moi, il y a des immeubles, mais la plupart sont détériorés, il n'y personne et d'étranges machines sont abandonnées dans les rues.

Je suis seule.

Comme je l'ai toujours été.

Je me relève sur mes jambes fébriles, j'ai mal aux cheveux, mal aux yeux, mal au cœur. J'ai envie de vomir, de pleurer, de hurler et de me recroqueviller dans un coin pour ne plus jamais en sortir.

Au fond de moi, je suis terrifiée, pourtant j'ai terriblement envie de découvrir dehors, même s'il me semble tout aussi vide que l'institut.

Je déambule, les bras ballants et les pieds nus sur le sol dur, je peux sentir toutes sortes de textures sous la plante de mes pieds. C'est étrange, mais plaisant, ce n'est plus le carrelage glacé de l'institut, c'est des petits bouts de bois, des brindilles, de la terre, des insectes, du béton... tout cela sous mes pieds. C'est comme découvrir un nouveau monde. Je me sens tellement dépaysée, tellement perdue et pourtant, je reste fascinée.

C'est donc cela, le monde dans lequel je grandis depuis des années ?

Pourquoi est-il si pauvre ? Si sombre ? Il semble vaste, mais triste. Je reste la seule patiente de ce monde rempli de secrets. Comment me débrouiller ? Où vais-je aller ? Je suis partie sans réfléchir, sans avoir de plan dans ma tête et je ne sais donc pas où je peux aller pour me réfugier, où je peux me nourrir, me laver, dormir si j'en ai envie.

J'ai toujours du mal à respirer, mais je continue de marcher sans savoir où je vais. Je suis le béton, ce chemin qui semble vouloir me mener quelque part. Parfois, je jette des coups d'œil derrière moi lorsque j'entends des bruits suspects. Peut-être me suivent-ils ? Est-ce que j'en ai envie ? J'aimerais me sentir importante, mais d'une manière différente. J'aimerais qu'on m'aime, pas simplement pour ma maladie, qu'on m'aime pour ce que je suis.

Quand Alfred me racontait des histoires, je m'imaginais moi, dans une belle maison près de l'Océan dans lequel je me laissais flotter parfois. Je m'imaginais vivre avec d'autres personnes, mes "parents" comme Alfred me l'a appris. Je n'ai jamais réussi à imaginer leur visage, comme si c'était trop dur. Je sais juste que j'en ai, sinon je ne serais jamais venue au monde.

Je ne me souviens pas de mon enfance, je ne sais pas mon âge, ni combien de temps ça fait que je suis dans l'institut.

Je chantonne, tout en tenant en équilibre sur le bord d'un trottoir, les bras tendus, j'avance et je murmure une chanson que j'invente, un air mélancolique doux et à la fois sombre.

ANNAOù les histoires vivent. Découvrez maintenant