Chapitre 7

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« - Vous n'avez pas tué Lothaire, alors pourquoi venir embaumer mon bureau de votre puanteur? »

Athénaïs était dos aux adolescents, elle se tenait bien droite devant une immense baie vitrée. Sa robe grise métallique était semblable à un torrent argenté cascadant le long de son dos et de ses jambes. On aurait dit une statue épiant chaque parcelle de la ville qui s'étalait devant elle. Toutes les couleurs vives à l'extérieur dénotaient avec le gris des murs de la pièce et des rares meubles présents. L'endroit était baigné dans une ambiance étrange que les aventuriers ne savaient comment définir.

Renard posa la main sur son blaster et le retira de sa ceinture d'un geste lent et posé. Il braqua son arme vers la grande femme immobile, à quelques mètres de lui. Son doigt était posé sur la gâchette mais il attendit avant de presser la détente. Non pas qu'il ait peur, car il avait fait cela des centaines de fois, mais il laissa quelques secondes à sa victime.

Elle savait que les minutes était comptées mais elle n'avait pas peur pour autant. Une femme de sa trempe n'avait pas une longue espérance de vie dans cette ville, les choses suivaient simplement leur cours. Elle était prête pour ce moment depuis bien longtemps. Alors, elle respirait calmement en observant son royaume de son regard de fer, pour la dernière fois. Ce qu'elle voyait la confortait dans l'idée qu'elle n'avait aucun regret et qu'elle n'avait pas à en avoir. Elle avait régné sur la ville durant plusieurs années, elle avait fait tout ce qu'elle pouvait pour servir à Alquilia moyennant quelques sacrifices qu'elle avait jugés nécessaire. Mairpork en faisait partie, mais on ne peut pas satisfaire tout le monde, même ses quartiers d'origines...

Un petit son étouffé surgit du canon pointé sur elle. Un éclair blanc l'aveugla puis tout devint noir.

Renard rangea son arme et jeta un regard entendu à Félicité qui se tenait à ses côtés. Le bruit d'un corps qui tombe sur le sol se fit entendre mais il n'y prêta pas attention. C'était sa routine, son acte ne lui faisait ni chaud, ni froid. Félicité n'était pas plus affectée alors ils rentrèrent dans l'ascenseur qu'il venait de quitter. Ils commencèrent à descendre tranquillement, la pression était retombée. La jeune fille soupira profondément en mettant les mains dans les poches de sa salopette kaki. Renard lui piqua une clé à molette que la jeune fille avait d'accrochée à sa ceinture et resserra un boulon de son blaster avec des gestes routiniers.

Ils étaient arrivés à mi-chemin quand l'ascenseur se stoppa net. Les deux adolescents posèrent directement leurs mains sur leurs armes respectives. Les portes s'ouvrirent sur un couloir vide les laissant complètement à découvert. De nombreux bruits de pas s'approchaient de leur position. Félicité tenta vainement d'appuyer sur le bouton désignant le rez-de-chaussée mais le système semblait désactivé. Renard sortit et ouvrit la première porte disponible. La pièce était pleine de bureaux devant lesquels travaillaient des hommes et des femmes, le visage figé sur une expression étrange. Quand les deux adolescents déboulèrent dans la salle, personne ne bougea. Ils pianotaient tous, sans relâche, sur leurs claviers holographiques. Les aventuriers n'en tinrent pas compte et coururent jusqu'à une seconde porte. Ils traversèrent plusieurs pièces exactement identiques à la première sans trouver d'escalier. Ils entendaient les gardes qui se rapprochaient dangereusement.

En sortant d'un bureau, un rayon de blaster effleura le pied de Renard suivit d'une exclamation de la part d'un de leurs poursuivants : « ils sont là ! ». Les deux enfants fermèrent la porte et se mirent à quatre pattes en se jetant derrière l'un des bureaux le plus éloigné de la porte. Ils bousculèrent l'employé qui y était assis mais ce dernier ne réagit pas. Il se replaça machinalement sur son siège et continua à pianoter, le regard vide.

Les gardes entrèrent dans la pièce et coururent vers la porte suivante sans réfléchir. Les deux adolescents purent constater qu'ils étaient au nombre de dix. Félicité fit un signe de tête à son coéquipier et ils levèrent leurs armes et tirèrent sur deux gardes différents, d'un seul mouvement. Les huit ennemis restants se retournèrent et commencèrent à tirer sur les intrus. Ces derniers se faufilèrent dans les rangs de bureaux disposés régulièrement dans la salle. Les tirs de blaster faisaient voler les ordinateurs, les papiers, les lampes, les bureaux derrière eux. La pièce, avant si calme et rangée, était maintenant un bazar sans nom dont les rares exclamations des employés étaient recouvertes par les sons des armes et des nombreux objets explosant par terre. Félicité évita de justesse une espèce d'ordinateur nouvelle génération qui allait lui tomber sur tête. Renard ne le remarqua pas et continua sa route entre les meubles volant en éclats. Un morceau de bois aiguisé lui égratigna le haut de la joue laissant quelques gouttes, d'un rouge vif, perler sur son foulard de la même couleur. Il n'y porta pas attention et se redressa furtivement au-dessus d'un bureau, visa à peine et appuya sur la gâchette de son arme. Il ne put qu'entendre un corps tomber sur sol dans un bruit sourd en se penchant de nouveau à couvert. Plus que sept. Félicité de son côté, rebroussa chemin toujours à quatre pattes, sa route étant barrée par un corps inerte devant un bureau éventré. Elle inspira un bon coup, serra son arme dans son poing et écouta attentivement chaque son provenant de ses ennemis. Elle se fit une rapide idée de l'endroit de chacun d'entre eux était placé, et se tourna sur le côté du bureau qui la dissimulait de manière à pouvoir ouvrir le feu sur les hommes armés qui n'avaient pas du tout essayé de se cacher. Elle tira deux coups avant d'être repérée. Un homme s'écroula sur le sol, un autre gémit et tomba à genoux. Renard le remarqua et l'acheva avec une grande facilité, d'un tir précis. Plus que cinq. Les deux adolescents étant à deux côtés opposés de la pièce, les tirs étaient plus répartis sur chacun d'eux. Le rouquin jeta un rapide coup d'œil pour repérer les deux hommes qui lui tiraient inlassablement dessus. Ils étaient incroyablement incompétents face à deux enfants. Renard continua de se faufiler, mais plus discrètement. Il arriva juste devant ses assaillants et les acheva de deux coups à bout portant. Plus que trois. Cependant, il relâcha son attention quelques secondes pendant lesquelles, un garde qui s'acharnait sur Félicité, se retourna contre lui et tira. Le jeune aventurier parvint à sauter sur le côté mais se prit le laser verdâtre qui venait de surgir du canon de son ennemi dans l'épaule gauche. Un craquement retenti dans son oreille avec violence. Il se cacha tant bien que mal et serra les dents pour retenir un cri de douleur. Félicité, de son côté, parvint à tirer sur l'homme qui avait détourné son attention d'elle et le tua sur le coup. Plus que deux. Mais, l'une des deux personnes la mitraillant sauta sur l'occasion et réussi à la toucher à la hanche. Elle porta, instinctivement, la main à sa blessure sanguinolente mais ne se remis pas à couvert. Quand les deux derniers survivants réalisèrent qu'il ne restait qu'eux, ils baissèrent timidement les armes et commencèrent à reculer vers la sortie. Renard se releva, ne prêta pas un regard à sa coéquipière et ils achevèrent les deux fuyards avant même qu'ils aient passé la porte.

Les deux adolescents observèrent le carnage autour d'eux. Tout était sens dessus dessous, des corps, ceux des employés et ceux des gardes, jonchaient le sol. Du sang s'écoulait lentement sur toute la surface du carrelage blanc. Félicité soupira et jeta un regard vers son ami qui essuyait le petit filet rouge qui coulait sur sa joue et continuait sous son foulard. Elle remarqua son épaule explosée qui dégoulinait sur ses vêtements et sur le sol, formant une flaque à ses pieds. Le rouquin l'invita à partir d'un coup d'œil.

Ils enjambèrent les cadavres et les débris pour atteindre une porte. Dans le bureau d'à côté, rien n'avait changé. Les gens travaillaient toujours, affairé sur leurs ordinateurs. Personne ne leva les yeux vers les deux enfants, couverts de sang, qui traversaient la salle en laissant des traces de pas rouges derrière eux. Ils continuèrent leur chemin, de salle en salle, toutes exactement identiques à la précédente.

Au bout de longues minutes à marcher entre les bureaux, les aventuriers arrivèrent enfin à un escalier de service. Ils le descendirent quatre à quatre en prenant soin de ne pas glisser sur leurs semelles pleines de sang. Félicité progressait avec un peu plus de mal que son ami, les mains toujours appuyées sur sa blessure. La descente fut longue, interminable même. Renard, dont la peau était d'une pâle diaphane, blanchissait à vue d'œil à chaque marche. Félicité lui tendit un bout de tissu qu'elle avait d'accroché à sa ceinture. Le jeune garçon lui prit le torchon noir de crasse que son amie utilisait pour entretenir les armes de la boutique et le pressa sur son épaule. La blonde le stoppa quelques instants pour nouer le morceau de tissu en un bandage de fortune. Ils continuèrent ainsi jusqu'à arriver dans le grand hall de la tour. L'endroit était désert, même la réceptionniste était absente. Ils vérifièrent rapidement aux alentours mais aucun danger n'était en vue. Personne à Alquilia n'avait cure de l'assassinat d'Athénaïs. Les quelques gardes envoyés pour les neutraliser n'étaient qu'une formalité, histoire de dire qu'ils avaient essayé de les arrêter. Maintenant, ils allaient partir, couverts de sang, et personne ne les regarderait et faire comme si rien ne s'était passé. La nuit suivante quelques silhouette habillées de noir, rasant les murs, iraient récupérer les corps et plus personne n'entendrait parler d'une femme qui avait habité la tour il y a longtemps. Peut-être qu'un jour un petit curieux ayant réussi à se faufiler dans les archives ultras sécurisées d'Alquilia pourrait trouver, dans un petit coin dissimulé, un papier relatant l'histoire de cette femme ayant régné sur la ville durant des années. Cette femme qui avait sacrifié tellement de chose pour faire marcher Alquilia et la hisser plus haut. Cette femme qui avait fait des erreurs aussi mais surtout, cette femme que tout le monde avait oublié dès le lendemain de sa mort.

Peut-être trouverait-il aussi l'histoire de ses assassins. Sur eux, il ne trouverait certainement pas grand-chose. Peut-être un ou deux rapports, ici et là, mais saurait-il seulement leurs noms. Saurait-il toutes leurs aventures, leurs vies pleines d'action et de rebondissements, pleines de joie et de peine ? Verrait-il l'horreur dans laquelle ils vivaient ? Connaîtrait-il toutes les personnes autour d'eux, toutes plus étranges les unes que les autres, qui, elles aussi ont tant d'histoires à raconter ? Non, sans doute qu'il ne les connaîtrait pas, mais vous si car, moi, je vais vous les conter. Rassurez-vous car il y a bien des histoires à raconter sur Mairpork et ses aventuriers !

~*~

Bien le bonjour! C'est la fin de cette première histoire des aventuriers de Mairpork mais il y en aura d'autre comme suggéré à la fin! Sans doute que ces dernières seront du point de vue d'un autre personnage comme Félicité, le patron ou même Athénaïs. La suite pourra aussi traiter de l'enfance de Renard ou d'une histoire en dehors d'Alquilia, ect. N'hésitez pas à faire des suggestions!
Tchuss!

Correction par Enamort (qui s'excuse d'ailleurs pour les fautes d'orthographe oubliées en chemin )

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 11, 2017 ⏰

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