Bérénice aux cheveux blancs

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Bérénice aux cheveux rouges lève la tête et jette un oeil furtif vers Bérénice aux cheveux blancs. Elle ne l'a jamais regardée plus de trois secondes à la suite. C'est une de leurs règles silencieuses.Ne jamais regarder une autre Bérénice trop longtemps. Peut-être ont-elles peur de perdre ce qu'elles entretiennent depuis tout ce temps en se contemplant ? Peut-être ont-elles peur de perdre leur survie ? Alors elles s'évitent du regard, c'est plus simple comme ça. Pas de question, pas de complicité, pas de contact. Ainsi, il leur est impossible de se transmettre leurs peurs.

Bérénice aux cheveux d'anges passe la plupart de son temps à attendre dans la peur. Elle ne fait rien, elle attend. Elle fixe inlassablement cette porte de métal et elle attend. Parfois il lui arrive de penser à son ancienne vie. Bérénice aux cheveux blancs vit toujours dans le passé, c'est rassurant, ca lui rappelle que le bonheur a déjà existé et qu'il peut revenir.

Bérénice aux cheveux blancs se met donc à se souvenir de son passé, de sa petite soeur et de son sourire ravageur, de son incroyable mère qui donnerait tout, jusqu'à son âme pour ses enfants. Elle se souvient de la balancoire dans leur jardin, de l'odeur des rosiers, et des livres dans lesquels elle se perdait. Mais le rêve se transforme toujours en cauchemar et la peur reprend ses droits.

Dans ses souvenirs du passé, elle se souvient aussi de son père, accro à la bouteille, souvent désabusé et violent. Elle se souvient d'elle regardant la même scène sanglante impuissante qui lui salit ses cheveux blancs. Elle aurait tellement aimé agir ce jour là,lui venir en aide, la sauver.

Mais Bérénice aux cheveux blancs n'est pas une battante, elle ne l'a jamais été. Elle s'est toujours cachée dans l'obscurité,attendant patiemment que quelqu'un vienne lui dire que tout cela est irréel, que ça n'existe pas, que tout redeviendra comme avant.Comme il est facile de se cacher derrière le mensonge. Comme il est facile de fermer les yeux.

Notre Bérénice n'est plus un ange depuis longtemps. Salie par la vie,elle salit son esprit à son tour et de petites mèches noires commencent lentement à pousser le long de ses cheveux blancs.



L'ombre pure observe les palais et les arbres,

La pitié, la colère et les danses macabres.

Les hommes se tuent violemment et se détestent,

leurs yeux scintillent d'une lueur de détresse.

La guerre et le sang coulent le long des murs de pierre,

Remplissant de tombes froides le cimetière.

-Est-ce cela la Terre ?, s'écrie le Soleil.

A quoi bon luire la chimère pulsionnelle.

-Les hommes sont nés dans la tempête incontrolâble,

Lui dit la Lune d'une voix inconsolable.

Sans toi, ils seraient dans la plus sombre amertume,

l'esprit frappé par un malheur qui les embrume.

Comprends-tu bien qu'ils ont besoin de ta lumière ?

Comprends-tu que tu sois le seul qui les éclaire ?

Je ne suis qu'une noirceur et obscurité,

Je ne suis qu'une excuse à leur méchanceté.

Montre leur que rien n'est mieux qu'une douce vie,

Montre leur l'étincelle de ta poésie.

Guide les sur le chemin rugeux du bonheur,

Et alors, ils oublieront leurs regards moqueurs.

Et le Soleil exposa sa clarté au monde,

Arrêtant toutes ces âmes vagabondes.

BéréniceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant