Si prêt du but

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J'expire un bon coup et entre dans la pièce. Elle est là, comme toujours, recroquevillée dans son coin. Elle ne fait aucun bruit, elle doit dormir. J'hésite à la laisser se reposer mais je ne peux pas, pas si prêt du but. Elle va craquer, je le sais, un jour ou l'autre elle finira bien par craquer.

Je tape du poing sur la porte espérant que le bruit la réveille. Elle ne bouge toujours pas. Je m'approche lentement de son corps inerte et tente de la prendre dans mes bras. Elle retombe comme un pantin désarticulé. Ce n'est pas possible, non, non, je ne peux pas la perdre, pas encore, je ne pourrai pas. J'essaie de sentir son pouls mais ne ressens rien. Plus aucun souffle ne s'échappe de cette jolie fille aux cheveux rouges.

Je la prends dans mes bras et, dans la panique, la porte jusqu'à ma voiture.

C'est la seule solution, je ne peux pas la laisser mourir, pas maintenant, elle ne peut pas être morte.

Je l'allonge sur les sièges arrières et fonce jusqu'à l'hôpital le plus proche, ayant dans l'idée de l'y déposer et de venir la chercher quand ils l'auront soignée. C'est la seule solution, la seule qui tienne la route. Je suis peut-être fou, mais pas au point de perdre ma petite Bérénice une nouvelle fois.

Je grille quelques stops, passe aux feux rouges, et accélère, accélère, accélère.

Mais je ne contrôle plus la voiture, encore une fois, je ne contrôle plus rien.

Et le scénario se répète telle une malédiction. Je vais la perdre,je vais la perdre, je vais la perdre. La voiture s'envole sur le bas côté et tourne sans s'arrêter. Elle s'écrase maladroitement contre un arbre et ne bouge plus. "Bérénice ! Bérénice !". Elle ne répond pas. J'essaie difficilement de me retourner, elle n'est plus dans la voiture. Mon dieu, qu'est ce que j'ai fait. C'est de ma faute, tout ça est de ma faute.


Je détache ma ceinture et sors du véhicule. Je tente de me relever et titube, plié de douleur. Je l'aperçois à quelques mètres de moi et avance vers elle le plus rapidement possible. Je m'allonge à côté d'elle et lui caresse les cheveux en chuchotant son nom. Elle est couverte de sang, bien plus que lorsqu'elle était avec moi, tellement plus. Je ferme les yeux une seconde, le poids de la culpabilité sur mon corps. J'ai échoué, tout est fini. Je l'ai perdue une seconde fois. Tout est fini. Elle ne rouvrira plus jamais les yeux. Et moi non plus. 

BéréniceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant