CHAPITRE 2

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CLARE

Différent.
Voilà ce que c'était. Différent.

Tout semblait différent à deux. Ce n'était plus une, mais deux brosses à dent. Le parfum des oreillers en coton n'était plus le même et était désormais agrémenté d'une pointe de son eau de Cologne. Mon panier à fruit regorgeait de kiwis alors que je détestais ça, c'était dans le jargon du concubinage ce qu'on appelait des concessions.

Niall et moi venions d'emménager il y a quelques jours dans un charmant petit trois pièces dans le centre ville de Galway, non loin des rues passantes. L'odeur acre de la peinture fraiche était encore omniprésente et Niall devait s'occuper de monter la commode mais le plus gros était fait. J'avais insisté pour m'occuper de la décoration de l'appartement mais pour une raison qui m'échappait je n'avais encore rien entamé. Peut-être car je ne savais pas encore quelle note donner à cet appartement.

Le soleil venait de se lever et les premiers rayons du soleil vinrent m'éblouir à travers les stores de notre chambre. Comme une vieille routine, je fis retomber mollement mon avant-bras contre les omoplates de mon mari encore endormi. Ce dernier grogna avant de se retourner pour me faire face, les yeux encore clos, je fis glisser la pointe de mes doigts le long de ses tempes. Sans attendre, je sentis ses deux mains robustes agripper fortement mes flancs pour me glisser contre son buste brulant. Ces matins avaient un goût de bonheur.

- Laisse-moi me lever, Niall. Grognai-je en riant

- Restez avec moi, Madame Horan. Se plaignit Niall en souriant

Les tonalités rauques et accentuées de sa voix firent balancer mon cœur par dessus bord. Niall était marin, enfin plutôt pêcheur. Embauché par une société fluviale irlandaise, il allait pêcher la truite, le brochet ou encore le saumon quand la saison s'y prêtait sur les mers de Galway. Il m'arrivait de grogner quelque fois quant à son odeur de poiscaille d'après travail mais il était doué dans ce qu'il faisait. Il débutait chaque journée de travail peu de temps après le déjeuner et rentrait tard le soir après la traite des poissons péchés.

- Je vais être en retard. Susurrai-je encore endormie

- Ces buveurs de lactose peuvent bien attendre un peu. Railla le blond

J'étouffais un rire à travers le tissu de mon oreiller. Niall n'avait pas totalement tord, mais j'appréciais être ponctuelle. Mon job consistait à distribuer chaque matin des bouteilles de lait fraîches à bord de mon vélo aux habitants qui le souhaitaient. Je passais ensuite mon après-midi à la supérette qui faisait l'angle près du port en tant qu'employée polyvalente. Ça n'avait rien d'extravagant, mais j'aimais ma vie.

Niall m'embrassa une dernière fois au sommet de mon front puis effleura sensiblement mes lèvres avant de me laisser partir. Comme chaque matin, je dégustais mon café crème en fixant le soleil se dessiner à travers les toitures de Galway. J'enfilais un veston de saison ainsi que mon béret fétiche. Niall me disait que je ressemblais à un garçon manqué quand je le portais, mais je m'en fichais. C'était le béret de mon père, il avait donc une valeur sentimentale.

- A ce soir, Niall ! M'écriai-je avant de claquer la porte

J'étais heureuse de pouvoir dire ce genre de petites phrases qui paraissent sans importance à première vue mais finalement s'avèrent plus que nécessaire. Les mains enfouies à l'intérieur de mes poches, je marchais à travers les rues encore silencieuses en direction du dépôt. J'aimais d'une certaine façon le job que je faisais même si ce n'était pas le plus gratifiant qu'il existait, cela me permettait de ne pas être enfermée toute la journée dans un bureau. Je n'étais pas conditionnée pour être devant un écran à taper des choses insensées sur un clavier, il me fallait un job ou je pouvais être au contact d'autres personnes.

GALWAY GIRL│H.S.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant