HARRY
Le courage.
Parfois il faut juste savoir se retirer. Ne pas faire de scandale. Ne pas crier, ne pas hurler, ne pas pleurer. Ne rien dire et puis partir. Et c'est ce que j'avais fait sept ans plus tôt. Est-ce que cela m'a rendu plus fort ? Je ne pense pas.
J'étais revenu, à Galway.
Comme si j'avais espoir que cet endroit allégerait mes souffrances, comme une douce capitulation. Mes parents considéraient ce voyage comme complètement absurde et masochiste. Ils faisaient leur deuil à leur façon, c'est à dire chacun de leurs côtés. Maman se levait chaque nuit pour aller pleurer dans la salle de bains, le visage écrasé dans une serviette-éponge afin d'étouffer ses sanglots.
Papa, lui, se la jouait beaucoup moins mélodramatique en épongeant les verres de bourbon jusqu'à pas d'heure. La mort de Gemma n'avait pas fragilisé notre famille mais l'avait divisé. Comme le résultat de 4-1=3.
- N'hésitez pas à m'appeler si vous êtes intéressé pour le lait. M'avait indiqué Beth avant de partir
Ma compagne de voyage m'avait déposé quelques heures plus tôt en haut de cette colline. J'étais surpris de voir que peu de choses avaient changé en sept ans si ce n'était les quelques maisons qui avaient poussé dans le lotissement. Le quartier semblait plus verdoyant qu'à l'époque.
J'eus un petit hoquet de surprise quand je découvris notre maison complètement recouverte par la brousse environnante, elle avait l'air d'être une maison abandonnée mais en réalité c'est exactement ce qu'elle était. La peinture blanche craquelait le long du portail de l'entrée et le lierre avait poussé le long des pierres murales, cette maison était aussi en deuil.
Les battants rouillés du portail en bois grincèrent quand je l'ouvris ce qui m'arracha un mince sourire car ce portail avait toujours crissé, comme à l'époque. Et puis ce fut au tour d'ouvrir la porte d'entrée, je fus envahi d'un étrange frisson quand je pénétrais à l'intérieur de la bâtisse. Une sale odeur d'humidité mêlée à la poussière m'avait prise de plein fouet et fait toussoter.
- Putain, ça pue la mort là dedans. M'étais-je exclamé écoeuré
Tout le mobilier était recouvert de vieux draps tachés et l'absence de luminosité rendait le lieu une once glauque. Je m'empressais de déployer les volets et d'ouvrir en grand toutes les fenêtres du rez-de-chaussé pour aérer les pièces avant de mourir asphyxié. Je fus soulagé de voir que l'électricité fonctionnait toujours.
Pour le moment j'évitais de m'attarder sur certains détails de la maison me faisant me remémorer de précieux souvenir comme par exemple cette liseuse en bois dans le salon où Gemma avait l'habitude de lire ses bouquins d'intellos le soir. Je détestais la voir faire ça devant mes parents, quand elle récitait ses poèmes de chieuse amoureuse, ça la rendait plus intelligente que moi. Et merde, oui, qu'elle l'était.
Je passais une main nerveuse à travers mes cheveux avant de retourner chercher ma valise dans l'entrée. J'avais besoin d'une douche après ma séance de sudation dans l'avion. Avec le peu de force qu'il me restait, je trainais les roulettes de ma valise jusqu'au premier étage et je me dirigeais aussitôt vers ma chambre. C'était complètement con de penser qu'elle aurait pu être différente que lorsque je l'avais quitté il y a sept ans, c'était la même.
Les même posters bidons accrochés au mur, mon plaid de lit Batman que ma mère m'avait offert lors de mes dix ans et je savais secrètement que ma collection de brochures porno était toujours cachée sous mon lit dans une boite à chaussures. Mais le problème était que j'avais l'impression d'être étranger à cette pièce, peut-être parce que j'avais vingt-quatre ans.
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GALWAY GIRL│H.S.
Fanfiction- Tha gaol agam ort. « Clare m'avait adressé ces derniers mots en gaélique. Et sans une parole de plus, elle m'avait ensuite regardé quitter : Galway, sa ville natale, son pays, sa culture mais par dessus tout ; sa vie. » Fan-fiction française écri...