~3~

366 17 0
                                    

La matinée est enfin finie. Le cours de maths m'a paru durer trois heures... Mais comme d'habitude, j'ai adoré le cours d'Allemand. Je suis vraiment passionnée des langues étrangères et du français. Donc forcément, c'est un plaisir pour moi d'aller à ces cours.

Le reste de la journée est plutôt calme, rien de spécial ne se passe, juste des cours et des rires avec Sara. Adrien était beaucoup avec le reste de notre groupe d'amis. Et je n'avais pas trop envie d'être avec eux aujourd'hui, je voulais juste être tranquille. Je ne sais pas pourquoi.

☆☆☆

C'est l'heure de sortir du lycée, Sara et moi prenons le chemin inverse de celui de ce matin, comme chaque jour.

-Oooh j'ai trouvé cette journée si ennuyeuse... Rien ne s'est passé, c'était long...

Elle souffle longuement.

-Pareil pour moi, demain sera peut être une meilleure journée.

-Peut être...

Puis durant tout le reste du trajet, aucune de nous deux ne parle. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive aujourd'hui mais je veux être vraiment seule.

-T'es sûre que ça va?

Je lève mon regard du sol pour le planter dans le sien.

-Oui oui, ça va bien. T'inquiète. Je sais pas, j'ai juste envie d'être seule. Et puis tu sais, le lycée ça a commencé depuis peu. Et faut que je m'habitue à tous ces changements, heureusement que toi et Adrien êtes encore là....

Je souffle puis continue.

-Et puis j'ai l'impression qu'il manque quelque chose à ma vie, et je ne sais pas quoi. J'ai un sentiment de vide permanent.

Elle se tait. Elle ne sait pas quoi répondre et je la comprend.

-Louise, je ne sais pas quoi te dire, c'est pas que je veux pas t'aider mais je ne sais pas ce que je peux rajouter.

Je regarde par terre.

-Tu ne peux rien rajouter.

Tu ne sais rien et ne sauras jamais rien... Désolée. Ce n'est pas contre toi mais... je... je ne peux pas.

On arrive finalement en face de chez moi. Je m'arrête devant ma porte, dis rapidement au revoir à Sara, qui a d'ailleurs l'air d'être un peu perdue. Mais ce n'est pas grave, je ne veux pas me poser trop de questions.
Ce soir, je ne sais pas pourquoi, mais je ne cherche que de la solitude.

Ouvre cette putain de porte, n'ai pas peur, rien ne peut t'arriver.

Je pose ma main tremblante sur cette poignée froide en fer.
J'ai peur. Je ne sais même pas de quoi exactement.
Mais j'ai peur. Tous les soirs ce même rituel...

Je pousse donc la porte, lourde.
Et rentre dans cette atmosphère pesante.
Et cette odeur.
Cette odeur.
Je la sens.
Et ressens.
Je ne voudrais pas qu'elle me soit aussi familière. J'ai l'impression que chaque jour elle s'intensifie.
Elle pénètre ma bouche, ma gorge, mes poumons, mon nez, mon coeur, mon corps.
Elle est en moi.
Dans ma vie.
Je voudrais tout effacer et enfin oublier cette forte senteur me donnant mal à la tête.
Cette senteur faisant parfois pleurer ma mère mais la mettant aussi dans un état second, parfois.
J'ai envie de pleurer.
Je n'en peux plus, je n'ai aucun échappatoire. Je ne veux pas rester ici, c'est trop pesant et j'en ai envie de vomir.

Et je vois ma mère, assise, là, à lui crier d'arrêter.
Lui hurler encore et encore d'arrêter de foutre sa putain de vie en l'air, de lui gâcher la sienne et en même temps la mienne.
Lui crier de partir et de ne jamais revenir.
Puis elle croise un court instant mon regard froid et humide. Elle arrête de parler brutalement.

-Louise!

Je suis sourde. N'essaie même pas de me parler, je ne laisserai aucun sentiment me franchir.

Qu'est-ce que tu fais encore ici, hein? Pars.

Telles sont mes pensées. Sans attendre plus longtemps je me retourne et ouvre cette porte et la claque en sortant. J'entends encore ces cris de fureur provenant de ma mère. Aujourd'hui ce ne sont pas des cris de tristesse.
Au moins, la routine n'existe pas vraiment, ah? Autant le prendre à la dérision tant tout cela est pathétique.

Je sens enfin l'air frais, débarrassé de cette odeur. Le vent passe dans mes cheveux, il fait un peu froid, mais cela me rafraîchit le visage et empêche les larmes de couler... Je suis forte, je n'ai pas besoin de montrer ma tristesse.

Et maintenant, je vais où, hein? Je réfléchis deux secondes avant de penser à un endroit...
Le Hangar.

☆☆☆

Je marche d'un pas assuré et dynamique vers mon refuge. Le vent frappe ma peau et le froid l'agresse. Toutes mes pensées sont mélangées dans ma tête, je ne sais plus quoi penser. Je vois ma mère, seule, pour l'affronter. Je suis si égoïste... Mais je n'en peux plus, je ne supporte plus cette situation, je vais juste péter un plomb si je ne trouve pas un moyen pour m'en sortir.

Je regarde par terre, je ne veux pas voir le monde autour de moi pendant un moment. Je veux un esprit vide... Mais je n'y arrive absolument pas.

L'automne est là et je le sens bien, il n'est pas très tard et pourtant les étoiles sont déjà présentes.

Après avoir marché seule un bon moment, j'arrive enfin à mon recoin secret...
Voir cette eau couler sereinement, ces belles étoiles briller et les gens rire me remonte le moral. J'essaie de trouver un endroit le plus éloigné possible.
Je vois là bas un coin éclairé uniquement par la lumière lunaire et décide d'y aller. Je m'assois sur la rambarde, mets mes jambes du côté de l'eau ruisselante et regarde les étoiles.

C'est trop tard, je suis faible de nouveau... Une larme tiède a roulé sur ma joue, et c'est tout.
C'est tout.
Cette perle de sel n'a pas ouvert la marche à ses compagnes, heureusement.
Avant que je pleure devant quelqu'un, faudra attendre longtemps..
Je ne sais même pas ce que je fais ici, je suis si perdue... Je ne sais plus rien. Tout est brouillé.

Je réfléchis a tout ce qu'il se passe dans ma vie depuis ma naissance.
Et puis, au final, je me résigne... Ça va juste me donner le cafard.
Je préfère admirer le reflet de la lune sur ce fleuve, ça me calme. Je pense à, "Qui, un jour, pourra donc me comprendre, sentir mes sentiments?"
Dites moi qui...
Sans doute personne.

Je reste ici, sans parler, l'esprit divaguant en ces eaux et mes pensées.

J'ai eu ce que je voulais pour ce soir.

La solitude.

☆☆☆

Il Suffit D'un RegardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant