4. Maddie, obscurité et passé

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Tâtonnant, et pestant contre toutes les marques de piles que je connais, je cherche mon frère fébrilement. Je le trouve enfin, à ma droite, et me redresse. Mais je sens alors des ongles s'enfoncer dans mon dos, accompagnés par des cris stridents en norvégien, assez forts pour couvrir le vacarme de la tornade. Je comprends que c'est le petit garçon, et m'empêche de crier plus fort que lui. Maturité, maturité Maddie.

Eirik me l'arrache en s'exclamant :

-Mais tu vois bien qu'il a peur du noir !

-Et qu'est-ce que tu veux que je fasse ? Je ne suis ni baby- sitter, ni électricienne !

-Je sais pas, tu peux lui parler...

-Ah oui, c'est vrai que je parle couramment norvégien !

-Maddie...dit-il dans un soupir.

Je lève les yeux au ciel, bien qu'il ne puisse pas me voir, mais je suis soudain interrompue par un bruit anormal. Non, pas un bruit, un silence anormal. La tornade semble s'être éloignée, sauf qu'il fait noir comme dans un four et que la moitié du bâtiment s'est sûrement écroulée sur nous. Je fourre ma main dans ma poche, cherchant machinalement mon téléphone avant de me rappeler qu'il est dans l'appartement, sur le plan de travail.

-Tu crois que c'est fini ? je murmure.

-Je ne sais pas, mais il n'est pas question de bouger tant que nous n'avons pas de lumière.

Je sers les lèvres, ravalant par la même occasion la remarque acerbe qui me brûlait les lèvres. Soudain, un bruissement à ma gauche me fait sursauter. Je sens une respiration régulière sur mon épaule, et me fige. Si Eirik est à ma droite avec l'enfant, qu'est-ce qui peut bien être à ma gauche ?

Déglutissant nerveusement, je tâche de rester calme. Et, inspirant un grand coup, je lance mon poing dans le noir. Une exclamation étouffée retentit alors, rapidement suivie d'une volée de jurons en norvégien. Eirik pousse un cri, de surprise sûrement, tandis qu'une lumière s'allume brutalement, nous aveuglant.

Elle provient d'une puissante lampe torche, tenue par une jeune fille, de mon âge probablement, sur la joue de laquelle une ecchymose commence à se former. Je ne peux m'empêcher de sourire, ces quelques leçons de karaté suivies à douze ans finissent donc par me servir.

La fille, d'un style punk, a des cheveux d'un blond presque blanc, et me regarde d'un air mauvais. Elle s'exclame soudainement, avec un fort accent :

-Pourquoi tu souris ? Tu es aussi ridicule avec ta rivière de sang sur la tête !

Paniquée, je tâte mon crâne et sens effectivement du sang couler depuis l'arrière. C'est donc ça qui coulait sur mes lèvres. Eirik murmure, pas du tout surpris par la présence de la fille. :

-C'est ouvert, on devrait mettre quelque chose.

-J'ai que ça. répond la punk, extirpant de son sac un petit carré de couleur que je ne reconnais que trop bien.

Je regarde mon frère d'un air menaçant :

-Si tu me mets ça sur la tête Eirik, je ne te parle plus jamais.

-Pourquoi ? rétorque-t-il d'un air goguenard, attrapant la serviette hygiénique.

Il allait l'ouvrir mais je lui arrache des mains, la rendant à la fille :

-Merci quand même, heu

-Anja.

-Merci Anja.

-Au fait, je peux savoir ce que tu faisais dans ma cave ? demande enfin Eirik.

-Je passais dans la rue quand j'ai entendu des gens crier « Tornado ! Tornado ». Alors, je suis rentrée dans l'immeuble, j'ai foncé au sous-sol et je suis allée le plus au fond possible.

Maddalena, alias MaddieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant