Chapitre 5 : Deux gouttes d'eau

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Le couloir était étroit, et s'étendait sur plusieurs dizaines de mètres. Même si j'étais pressée, je ne pouvais m'empêcher de détester le contact forcé de la tôle brunie par la rouille et sa peau. Tant de saleté m'écœurait. Mais ce n'était pas la première de mes pensées : j'étais avant tout préoccupée par le sort de ma sœur. Si mon agresseur avait eu l'audace de me kidnapper, je me doutais qu'il n'aurait pas plus d'état d'âme pour Sophie. Et cela m'effrayait : je ne pourrais pas supporter que quelqu'un lui fasse de mal.

Elle était trop fragile...

"Deux sœurs..."

La voix du robot était de retour. Je serais volontiers devenue sourde pour ne plus avoir à l'entendre.

"Deux jumelles..."

Cette façon saccadée de prononcer ces phrases me perturbait.

"Comme à travers un miroir..."

"Qu'est-ce qu'elle me fait ?" me demandais-je, alors que cette voix commençait à lui faire avoir des frissons dans le dos.

"Comme deux copies parfaites..."

Derrière cette froideur de l'intelligence artificielle, se cachait autre chose, je le sentais. Une pointe de sadisme.

"Comme deux gouttes, deux gouttes..."

Je vis le bout du tunnel.

"Deux gouttes d'eau !"

Sur ces derniers mots, le robot avait changé de voix : ils avaient été comme assénés, lâchés pour faire mal. Ils faisaient mal. J'avais été choquée par la nature révélée du programme, en même temps que j'apercevais un dispositif : une grande cuve de verre incrustée dans un mur en béton. Mon cœur manqua un battement : dans la cuve se tenait Sophie ! Elle avait de l'eau jusqu'aux genoux, et semblait endormie pour le moment. Elle ne tenait debout que grâce à des anneaux métalliques qui enserraient ses bras et son torse.

M'approchant davantage,je courus jusqu'à la cuve : je remarquai, placés sur la cuve, trois manettes de métal noires, mais je ne voulais pas y toucher. Au sol se trouvait une grille de fer percée de nombreuses ouvertures, identique à une deuxième, placée sous les pieds de Sophie. Exception faite que celle de ma sœur n'était pas ouverte.

Dernier détail, très inquiétant : un mince filet d'eau tombait continuellement dans le compartiment de ma sœur. Le niveau d'eau s'élevait donc, lentement mais dangereusement.

Le robot fit alors son retour :

"Félicitations, candidate Marie. Vous avez retrouvé votre proche. Ma base de données indique que vous pouvez encore la sauver. Pour ce faire, vous devrez triompher d'une épreuve. Placez-vous sur la grille pour stopper l'arrivée d'eau."

La voix tranchée et sans émotion m'insupportait, mais je me résolus à rester calme et à obéir. Je plaçai sans attendre mes deux pieds sur la grille ouverte. Aussitôt, une cuve de verre en demi-lune s'éleva du sol, pour rejoindre le plafond dans un bruit de succion.

Surprise, je me retournai, frappai la vitre de mes paumes, sans résultat : j'étais piégée. Le "programme d'aide" revint me harceler :

"Vous disposez de trois manettes. Votre survie dépendra de la façon dont vous les gérez. A la fin de cette explication, l'eau coulera de nouveau, avec un débit augmenté. Une cuve se remplit en trente secondes exactement.

De gauche à droite.

La première manette permet de vider votre propre cuve.

La deuxième permet de vider la cuve qui vous fait face.

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