Double front - Partie 4

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Au même instant, à Stohess

Marion se pencha par la fenêtre de sa chambre, recherchant désespérément une bribe d'air frais. Son regard se dirigea machinalement vers le haut. Wow, souffla-t-elle. Quelle vue...

Le ciel était parfaitement dégagé, étendant ses mille et une étoiles en un tableau majestueux. Son cœur se serra légèrement. La dernière fois qu'elle avait vu une nuit aussi claire, c'était au bord de la mer, accompagnée de ses amis.

Comment ont-ils réagi à ma disparition ? se demanda-t-elle soudainement. Un petit sourire triste se dessina sur son visage. Je suppose qu'ils s'en sont remis. Je n'étais pas un pilier du groupe non plus. La police a dû arrêter les recherches, et mes parents...

Elle grimaça. Mes parents, hein... Elle revit leurs expressions embarrassées, la veille de son épreuve au baccalauréat. Arrête. N'y pense pas. Ça sert à rien, y a des enjeux bien plus importants. Mais déjà son esprit galopait, incontrôlable, parmi des dizaines de souvenirs douloureux.

Putain... Elle se prit la tête dans les mains. Ses cheveux, fraîchement coupés, retombèrent devant son visage crispé. Allez, ferme-la. Je t'en supplie, casse-toi de mon cerveau...

Mais une voix familière emplit son crâne, débitant sans pitié un flot de paroles incessantes. Tes parents t'ont envoyé en enfer, hein ? Tu le savais, après tout, qu'ils avaient un souci avec toi. Comment auraient-ils pu rater tes tendances suicidaires, tes crises de larmes dans ton lit, tes déprimes incessantes... ? Mais, à qui la faute ? Une personne en moins, et ils auraient bien mieux vécu...

La jeune fille frappa le mur, les dents serrées. « Tu es cinglée, ma pauvre », ricana-t-elle. « C'est leur problème, s'ils sacrifient une vie humaine – d'autant plus si c'est leur propre fille. Qu'est-ce que je devrais en avoir à foutre ? Quand tout ça sera fini, je les traînerai devant le tribunal, et ils comprendront leur douleur. »

Quand tout ça sera fini ? Tu penses que tout ça aura une fin, et que tu t'en sortiras vivante ? L'adolescente s'immobilisa, les yeux écarquillés. Allez, avant de finir bouffée par un titan... Tu peux encore choisir une meilleure mort...

Elle regarda la fenêtre un moment, et manqua de s'en approcher, mais elle secoua la tête. « Ne te fous pas de moi. Je n'ai aucune raison de faire ça. J'ai dit que je me battrai, et c'est pas une pauvre conne comme toi qui va changer quoi que ce soit. Allez, barre-toi de là, va harceler quelqu'un d'autre. »

Le silence se fit enfin dans son crâne. Elle s'écroula au sol, le cœur battant. Que ce soit pour des retrouvailles larmoyantes ou une bonne raclée, je retournerai chez moi. La respiration sifflante, elle se releva avec peine et sortit de sa chambre.

Des courbatures la firent grimacer. Sous ordre du commandant, elle suivait chaque jour un bout d'entraînement des soldats des Brigades. Ce n'était pas une partie de plaisir, mais ses muscles commençaient déjà, à sa grande surprise, à se dessiner légèrement sous sa peau.

Erwin, encore une fois, supposa-t-elle. Seule, elle était sans défense ; or, après la tentative d'assassinat menée contre elle, ce fait, jusque-là négligeable, était devenu quelque peu embarrassant. Le major souhaitait sûrement qu'elle apprenne quelques techniques de combat.

Elle entra dans le réfectoire désert, situé en sous-sol. Elle poussa un soupir de soulagement ; la température venait de descendre de cinq bons degrés. Elle se faufila dans les cuisines et se servit un verre d'eau, qu'elle but cul sec. Une fraîcheur agréable l'envahit.

Elle s'en servit un second et remonta les escaliers menant à sa chambre, lorsqu'elle entendit un petit clapotement. Elle baissa les yeux ; une goutte de sang se mêlait au liquide incolore de son verre, formant un beau précipité pourpre.

ᴘʀᴇᴍɪᴄᴇꜱ - ᴀᴛᴛᴀᴄᴋ_ᴏɴ_ᴛɪᴛᴀɴ&0.7 ⌜ᵗᵒᵐᵉ ¹⌟Où les histoires vivent. Découvrez maintenant