L'addiction

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07 h 00. L'heure que mon réveil affiche. Un rayon de lumière se promène sur mon visage, descendant sur mon corps privé de couverture. Il s'arrête sur mes genoux et laisse sur place un arc-en-ciel. Je me lève en arrachant à mes genoux le rayon repartit aussitôt qu'il était venu.

Je m'assois au bord du lit le temps de me préparer psychologiquement pour affronter mes parents et le lycée. Je sais que cette journée va être riche en émotions, ce qui rime avec rien de bon. Me plaçant devant mon miroir, je me déshabille tout en étant dégoûtée du corps qui se reflétait sur celui-ci.

Déjà le matin, enlever mes vêtements me fatigue, alors pour les mettre, casse tête ! Je m'assois sur mon siège de bureau et commence à cacher toutes les marques de faiblesse sur mon visage avec du maquillage. Tout y passe, fond de teint, correcteur,..

Je me lève, met mes bottes, prends la bretelle de mon sac, descend les escaliers de la maison tout en évitant mon père cassant le miroir de la salle de bain et ma mère lui criait dessus depuis la cuisine. Je me dirige le plus vite possible vers le garage.

En ouvrant la porte avec trop de précipitation, je me coupe au-dessus de ma main droite. Ce sang, il apparaît petit à petit, commence à prendre forme, roule sur mes doigts, fini à la fin de mon annulaire et goutte sur le béton froid du garage en laissant échapper un petit 'plaf'.

Je me secoue la tête et prends d'un coup sec le guidon de mon vélo. Je le chevauche aussi rapidement que possible et me dirige à toute allure vers le lycée.

Le portail, grand et imposant, est ce qui s'appelle pour certains d'entre nous, l'entrée des enfers ou tout simplement l'entrée principale du lycée Marie Curie. J'attache mon vélo, me fait une queue de cheval, repositionne ma chemise correctement et commence à avancer au milieu de ce troupeau d'adolescents.

" Lesbienne!"

" Maya la guine"

Petit message d'amour le lundi matin. La journée commence bien dit donc . Je les ignore et continue de marcher jusqu'à ce visage qui ressort de la foule.

Il me voit et commence à sourire. Pas le sourire qui fait plaisir, non le sourire du méchant qui veut te tuer. Oui ce sourire là. Et bien il est habité par cet être exécrable qui s'appelle Tom. Tom, ce garçon qui me haït depuis la nuit des temps et ce même garçon qui a lancé ces rumeurs ridicules.

Il se tourne vers son groupe d'amis, murmure des choses inaudibles pour les gens autour et des éclats de rires fusent de leur cercle. Ils me jettent tous des rapides coups d'œil. Les autres élèves rentrent dans l'enceinte du lycée tandis que le groupe de Tom et moi restons dans la rue.

Le groupe de Tom se tut, tous tournés vers moi, ils me regardent. Malgré cette situation assez bizarre, je me dirige pas après pas vers le lycée. Le silence est tellement pesant qu'on entend le bruit de mes talons sur le gravier se dépêchant le plus vite possible en espérant pouvoir franchir les portes en ayant aucun problème.

Un coup violent sur le nez, un croche patte par derrière, des chaussures venant s'abattre sur le ventre, 1, 2, 3 , 4 , 5 secondes. Plus rien. 1, 2, 3 secondes. Silence. 1, 2 secondes et un visage familier surplombe le faible individu étendu par terre.

" Meuf, t'es trop lâche. Tu te prends pour qui? Mdr partons les gars."

"Pauvre meuf."

"Miskine"

"Sale pute" *cracha*

Des pas et des rires disparaissent dans le lycée. 1, 2, 3, 4 , 5, 6, 7, 8 secondes. Silence. 1, 2, 3, 4, 5 secondes. Toujours du silence.
Trop tard Maya, tu n'as pas réussi à passer.

Je m'assois par terre, croise mes jambes. Le sang coule de mon nez.
Je réfléchie à ce qui vient de ce passer, et prend conscience de la haine qui habite Tom. Comment un être humain peut être aussi pourri de l'intérieur ? Pourtant mes parents eux-mêmes sont pourris jusqu'à l'os.

Le goudron est taché. Des tâches de sang le complète. Mon corps tremble. Ma vue se trouble, je ne vois plus rien. Mon esprit s'assombrit de plus en plus, les dernières tâches de couleurs qui le colorait, viennent de disparaître. Le désespoir, la colère et la tristesse hantent maintenant mon esprit. Le sombre règne.

Toutes mes émotions se manifestent en cri, comme des dessins à la craie qui illuminent les cours de récréations. Il se transforme en couteau pointu pour transpercer mes cordes vocales et finit en poussières dans le ciel qui s'étant au-dessus du lycée. Je me noie dans ma souffrance,  devant le bâtiment, seule.

Je pose mon sac devant moi, sors la cigarette du désespoir, les tremblements et la difficulté l'allument. La fumée s'échappe de ma bouche pour s'éclipser dans le vaste monde qui nous entour. Dès que la cigarette perds de son importance, ma force s'amplifie. A chaque bouffée de fumée inhalée, je me relève et renais comme un phœnix.

La cigarette s'écrase sous mon talon. J'arrache mon sac du sol et avance avec plaisir vers les toilettes du lycée. Je me place au-dessus du lavabo, soulève ma manche et sors de mon sac une de mes lames. Je retourne mon poignet, paume de la main vers le lavabo, et j'y plante ma lame. 1, 2, 3, 4, 5, secondes. D'un coup sec, je trace une ligne droite le long de mon avant-bras.

Les picotements se font ressentir, le plaisir est présent. Quel soulagement. Je jette ma lame dans le lavabo et regarde avec attention ma ligne. Des bulles de sang apparaissent à une vitesse folle. Le rouge s'enfuit, se balade sur mon bras, et se suicide dans le lavabo pour disparaître dans un trou. Plusieurs rouges font la même chose. Je les arrêtent en les bandant d'un gros tissu blanc.

Mes yeux laissent échapper des gouttes d'un liquide transparent qui coule le long de ma joue. J'arrache du papier toilette et nettoie mon visage sale. Je me remaquille et pars pour mon cours de maths. Monter les escaliers, traverser les couloirs, chercher le numéro de la classe, s'arrêter devant et se poser des millions de questions.

Voici mon occupation première le matin. Je toque, j'ouvre la porte, le prof et les élèves me défigurent, je m'assois à mon bureau et commence l'horreur.

Maya [En Pause]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant