Clairière

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Je descend doucement les escaliers.
J'entends mes parents qui discutent, en-bas.
Je tremble de peur à l'idée que les marches grincent.
Je me fige. Raclements de chaises. Les voix se dirigent vers moi.
Je remonte précipitamment et ferme la porte derrière moi, je n'ai rien fait.
Ils n'entendent rien et vont se coucher.

J'attends, debout dans l'obscurité, que la maison soit silencieuse.
Enfin, j'ouvre la fenêtre avec précaution.
Je marche sur le toit de l'abri et saute dans l'herbe humide.
Je me redresse et jette un regard vers la porte d'entrée, tout est calme.
J'entends une chouette qui hulule au loin.
Je me précipite vers elle, grelottante, et entre dans les sous-bois.

Je cours à perdre haleine, cherchant la clairière de l'autre soir.
Mes pieds nus sur la terre mouillée font une agréable musique.
Les branches me fouettent le visage, mes cheveux volent avec le vent.
J'essaie vainement de me repérer, et vais au gré de mes envies.
J'écoute le bruissement de la brise dans les feuilles.
Les bruits de la forêt ne me font pas peur, au contraire, ils me grisent.

Essoufflée, je finit par m'arrêter pour regarder la lune.
On dirait qu'elle me sourit, qu'elle m'attend.
Je continue plus tranquillement, en m'appuyant sur les arbres.
Soudain, la végétation se fait moins dense, la lumière me parvient...
Et je la vois. Toujours aussi belle que la dernière fois, même plus.
Ma clairière à moi, seul endroit où je peux être moi-même.

J'ai l'impression de rentrer dans un lieux saint.
Le souffle me manque. Je retiens ma respiration et vais vers le centre.
Le bassin d'eau ressemble à du cristal, c'est un vrai miroir.
Je me regarde dedans et je ris, je ressemble vraiment à un démon!
J'essaie d'arranger ma coiffure comme une grande dame mais c'est perdu d'avance.
Je prends des poses méprisantes et fais semblant de donner des ordres.

Je me lève enfin et vais prendre une branche pour faire semblant de me battre.
Mon ennemi en question est un colosse aux armes d'or.
Je l'envoie voler à l'autre bout de la clairière et me démène avec une mèche récalcitrante.
Si j'avais été un garçon, j'aurais été écuyer, c'est sûr.
Je suis déçue mais ne regrette pas, au moins, je ne risque pas de mourir dans une guerre de territoire!
J'abandonne le bâton et commence à faire des roulades.

La lune est déjà aux trois quarts de son chemin, il faut que je rentre.
Je regarde une dernière fois la clairière et entame le chemin du retour.
J'entends le coq chanter et me met à courir, je devrais déjà être là-bas!
A la maison, j'escalade l'abri, retourne dans ma chambre et m'habille pour aller travailler.
J'étouffe un bâillement et dévale les escaliers, la prochaine fois, je rentrerai plus tôt.
Je prends mon panier et vais nourrir les poules, impatiente d'être ce soir.

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Celui là est assez long, peut-être pas assez 'fini', mais le thème me plaisait beaucoup.

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