Angus - (BxB)

Chapitre 5 - A cœur ouvert

Je suis resté assis sur un banc sous le préau, seul, avec mes écouteurs et ma musique. Je n'avais pas envie de penser à Parker. Je n'avais pas envie de parler à Parker et je ne voulais même pas le voir...ne serait-ce que de loin. Pourtant, il était là. Pile dans mon champ de vision. Il était là avec Mona. Ils riaient ensemble, ils souriaient ensemble. Je ne savais pas ce qu'ils se disaient et j'en voulais à mon manque de savoir lire sur les lèvres. Quel incompétent je vous jure ! Il ne lui a sans doute pas parlé de moi. Pourquoi le ferait-il ? Parker ne parle jamais de moi, lui.

Alors que moi...

Je ne sais même pas comment j'en suis venu à le placer en tant que centre de mon univers.

« - Vous vous êtes disputés ? »

Au début, elle a un regard dubitatif comme si elle remettait ma version des faits en question puis finit par éclater de rire. Assez fortement pour que les quelques clients du bar se retournent certainement trop curieux de voir Jo' rire ainsi.

« - Sérieusement, on dirait un vieux couple ahahaha !

- Ça n'a rien de drôle !

- Angus...Parker et toi vous avez passé votre vie à vous battre. Ce n'est pas une petite dispute pour un devoir qui va vous séparer quand même ? Tu n'as qu'à monter le voir, il est dans sa chambre.

- Je ne veux pas le déranger.

- Tu ne le dérangeras pas. Tu n'as qu'à dire que je t'envoie récupérer un truc à la maison s'il te pose des questions. Aller...File va ! »

Pourtant, je suis resté collé à mon tabouret, la peur au ventre. Rien que l'idée de croiser Parker m'angoissait.

« - Angus.

- Je sais, je sais, j'y vais. »

Si j'étais majeur, j'aurais descendu un verre de je ne sais quelle liqueur, j'aurais pris mon courage à deux mains et j'y serais allé.

Sauf que là, mon courage s'est fait la malle et tout ce qu'il me restait été un soupçon de peur.

Alors, j'ai quitté le bar, empruntant les escaliers conduisant à l'appartement se trouvant au-dessus. Leur maison. Sa maison. La demeure du loup. La taverne de l'ours.

Je toque et entre quelques secondes plus tard. Parker ne me répondra pas. Il doit savoir qu'il s'agit de moi.

« - Parker ? C'est moi. »

Je m'en doutais : Pas de réponse.

Je m'aventure un peu plus dans l'appartement, m'arrêtant quelques secondes sur les quelques photos ornant les murs. La plus part étaient avec Jo', mais celles que je préférais été celles de Parker.

Parker bébé. Parker petit. Parker à l'école maternelle. À la plage.

On aurait dit la série des « Martine ». C'était drôle.

Il n'avait pas du tout la même aussi. Il avait les cheveux blonds comme les blés, bouclés, de grands yeux verts pétillants et un large sourire enfantin.

Parker ne sourit plus vraiment et ses cheveux sont coiffés à coup de gel sur sa tête.

« - Qu'est-ce que tu fiches ici ? »

Sa voix me fait sursauter comme si j'étais pris en plein flagrant délit de matage de photos. Il se tient au niveau de l'encadrement de sa chambre. Son regard est sombre. Ses mains sont rangées dans son sweat.

Était-ce là, le fameux moment où je dois lui dire que Jo' m'envoie ?

Non.

Je ne peux pas lui mentir.

« - Je viens en paix. »

Lui dire ça était-ce réellement une bonne idée ?

« - Je viens m'excuser pour...

- Pourquoi ? Pour avoir triché ? »

Vraiment, ce gars me tape sur les nerfs par moment. Pourquoi me regarde-t-il ainsi ? Comme si je valais bien moins que lui ? C'est vrai je n'ai pas la moitié de son cerveau et je passe mon temps à rêvasser, mais ça ne méritait pas un tel regard. Je ne méritais pas ça.

« - Oui. »

Suis-je censé me mettre à genou ? Le supplier ? Écrire une lettre ? Qu'est-ce qu'il veut à la fin ?

« - D'accord. »

Il s'en retourne dans sa chambre et me laisse au beau milieu du couloir parmi les photos comme si de rien n'était. Son ignorance à mon égard me blesse plus que sa colère précédente.

M'apprêtant à repartir tel un chien abattu, je croise Jo' adossée au mur du salon, les bras croisés, l'air agacé. On aurait dit une cocotte-minute prête à exploser.

« - Ah. Ce petit con me fatigue vraiment. »

Elle se détache de son appui et se précipite dans la chambre de Parker, l'en sortant par l'oreille.

« - Aïe ! Aïe ! Arrête !

- Je n'ai pas élevé un petit con comme toi à ce que je sache ! Angus a fait tout ce chemin pour s'excuser alors pourquoi t'agis comme un débile mental hein ? Tu es qui pour pouvoir te permettre un seul jugement à son égard ? Je t'ai déjà dit quoi ?! Hein ?! Qu'est-ce que je t'ai dit ?!

- Arrête ! Jo' arrête ça !

- À toi de t'excuser espèce d'écervelé...Avoir un tel frère imbu de sa personne me fait honte. N'oublie pas que quand tu n'avais pas tout ce succès dans ton petit lycée de bourgeois, t'avais Angus ! Excuse-toi je te dis ! »

Elle lui claque l'arrière de la tête au moins cinq fois avant que ce dernier n'approche de moi tandis que je me tenais là, tout silencieux. Jo' faisait peur une fois en colère. Vraiment. Ce n'était pas quelqu'un que l'on voulait comme ennemie, mais j'étais bien heureux de l'avoir en amie.

« - Je suis désolé Angus.

- Plus fort je n'ai rien entendu !

- Je suis désolé...

- PLUS FORT !

- JE SUIS DESOLE ! »

Si le voisin d'à côté ne l'a pas entendue celle-là.

« - C'est bon...C'est rien. De toute façon, il se fait tard, je devrais rentrer maintenant.

- Minute papillon »

À peine avais-je fait volte-face que Jo' me saisit par le col, manquant de m'étrangler au passage.

« - Parker, raccompagne-le jusqu'à chez lui.

- Hein ? Mais...

- Tu veux manger ce soir ? Raccompagne-le. »

Elle insiste expressément sur le mot « raccompagner »

« - Et au pas de course ! Puis pendant que tu y es...Tu me ramèneras de la crème fraîche. Sale gosse va... »

Tandis que Parker enfile ses baskets, Jo' me glisse un clin d'œil lourd de sous-entendus. Elle venait de me créer là l'occasion parfaite pour discuter avec lui le temps du chemin.

L'occasion de discuter à cœur ouvert.