Chapitre 17 : Miséricorde

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Il y eu un moment de flottement, pendant lequel je ne savais plus quoi faire. Que faisait-il ici, nom d'un chien ? Etait-il prêt à mourir pour une Reine qu'il connaissait depuis à peine deux jours ? Quel imbécile... Je savais pourtant qu'il ne pouvait s'empêcher de jouer les héros, mettant constamment sa vie en danger. Mais là, sa protection allait devoir devenir ma mission principale. Je l'observai quelques instants, et ne pus m'empêcher de constater qu'il était un excellent combattant, qui n'avait rien à envier à l'armée de Daenerys. Il portait ses coups avec grâce, tout en sachant parfaitement comment se protéger des coups bien portés de ses adversaires. Sur un champ de bataille, il devait être redoutable.

Alors qu'il abattait son troisième homme d'un coup d'épée dans la gorge, il ne remarqua pas qu'un homme se tenait derrière lui et s'apprêtait à l'embrocher. Je parcourus la distance qui me séparait de lui et j'arrivai in extremis à lui lancer une décharge juste avant que son épée n'atteigne son but. Jon se retourna vivement vers moi, et me regarda droit dans les yeux. Puis son regard dévia vers mes mains, où des étincelles étaient toujours visibles. Il ne se recula pas, à mon grand étonnement, mais se rapprocha, comme intrigué. Alors qu'il s'apprêtait à dire quelque chose, son regard se dévia derrière moi, et lança alors son épée sur un homme derrière moi, qui s'écroula sur le coup. Il s'élança ensuite pour aller la chercher, puis se joignit de nouveau au combat, sans un regard pour moi.

Alors que je désintégrai un soldat, j'entendis enfin un son que je n'espérais plus entendre. Je m'entourai d'un bouclier transparent, juste avant de voir un brasier fondre sur la foule. Pendant un bref instant, je priai pour que Jon se soit suffisamment éloigné. Puis je constatai que Daenerys dirigea Drogon afin de ne pas brûler ses hommes. Je fis disparaître mon bouclier, et partis à la recherche de Jon. Tellement de choses peuvent se passer en quelques secondes dans un combat pareil... Je ne devais relâcher ma vigilance à aucun moment.

Je n'eu pas besoin de le chercher bien longtemps, il se tenait désormais à l'écart du combat, attendant que Daenerys ait fini de défendre son territoire. Nos regards se croisèrent brièvement et il détourna rapidement le sien. Je découvre alors que ma robe était déchirée en différents endroits, en particulier tout le bas, qui laissait désormais voir mes jambes. Voyant qu'il ne restait qu'un lamentable bout qui rattachait le tout, je décidai de l'arracher. Ce serait plus pratique si le combat reprenait. Il ne restait donc plus qu'un bout de tissu qui dissimulait le haut de mon corps, et s'arrêtaient un peu plus haut que mes genoux. A cette époque, seules les prostituées pouvait se permettre de se promener aussi dévêtue. Je remarquai également que j'avais perdu mes chaussures inconfortables dans la bataille. Une chose était sure, c'est que je n'allais pas les pleurer. Au bout de minutes interminables de cris et de corps qui tombent, le brasier pris fin. La chaleur commençait à se faire vraiment lourde, et la fumée avait commencé à envahir mes poumons. J'utilisai le tissu que je venais d'arracher pour m'en couvrir le visage, et invoquai un léger vent afin de disperser la fumée.

Drogon finit par atterrir à quelques mètres de moi, et Daenerys en descendis. Je remarquai alors que quelques hommes des Lannister étaient toujours debout, retranchés dans un petit coin non loin de là. Pourquoi Daenerys ne les avait-elle pas tués avec les autres ? Elle arriva bientôt à leur hauteur, d'un pas lent. Arrivée devant eux, elle s'arrêta, et Drogon s'agita. Pour la première fois depuis que je l'avais rencontré, elle avait tout d'une reine. Elle les regarda pendant un long moment, puis déclara enfin :

- Vous voyez maintenant ce qui se passe si vous décidez de vous battre contre moi. Je n'ai jamais eu l'intention de tuer qui que ce soit. Mais si vous vous attaquez aux miens, voilà ce qui vous arrivera. Je vous laisse une chance. Rejoignez-moi, pliez le genou et vous vivrez. Refusez de me servir, et je laisserai mes dragons faire de vous un tas de cendres.

Mon regard croisa celui de Jon un court instant, et il sembla ressentir la même chose que moi. Allait-elle les brûler vifs devant nous ? Les soldats s'interrogèrent du regard. Si ils décidaient de trahir Cersei, leur mort serait certainement bien plus douloureuse que celle de brûler vif. Mais elle devait forcément s'y attendre si elle les avais envoyés ici.

- Plutôt crever ! s'écria un courageux en s'avançant vers la Reine.

Drogon s'avança alors vers le malheureux, et Daenerys chuchota :

- Dracarys.

Je détournai le regard, mais cela ne m'empêcha pas d'entendre les hurlements affreux, et de sentir une odeur épouvantable. Tout à l'heure, dans le feu de l'action, je ne pensais qu'à survivre, sans penser à tous ces hommes entrain de mourir de la même façon que lui. Mais quand cela se produisait juste devant ses yeux, c'était très différent.

Je pris alors conscience de tout ce qui venait de se passer. Je venais de tuer des hommes sans même y réfléchir. Je regardai autour de moi, et je vis des cadavres encore en flammes. Je sentis l'angoisse monter. Etais-je entrain de devenir un monstre, moi aussi ? Je n'avais jamais voulu ça. Je n'avais jamais voulu devenir une tueuse. Je n'avais pas signé pour ça.

Les hommes encore en vie étaient en panique. Ils étaient clairement entrain de choisir leur mort. Seulement un des choix les amèneraient à la retarder. Deux d'entre eux décidèrentalors de plier le genou. Mais il en restait encore trois debout.

- Fais-le. Penses à Mélinda, dit le deuxième homme à un des hommes encore debout.

Les trois derniers hommes s'agenouillèrent alors, tandis que Drogon poussait un rugissement. Il étira ses longues pattes, puis ses ailes, avant de s'envoler pour rejoindre ses frères dans le ciel encore fumant. Daenerys se retourna vers un des dothrakis et lui donna un ordre. Ce dernier hocha la tête et, aidé de ses compagnons, il commença à transporter ce qui restait des cadavres. Mon angoisse continuait de monter, et je sentis que je commençais à avoir la nausée. Mes pensées partaient dans tous les sens, et je compris que j'étais en état de choc. Il vallait mieux que je m'éloigne au plus vite de cet endroit, de tous ces corps carbonisés, de l'odeur de la mort qui puait à plein nez. Je commençai à me diriger vers la forteresse quand je fus prise d'un étourdissement, et je sombrai.

Entre deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant