Chapitre 21 : Dessins

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Nous avions passé une bonne partie de la nuit à discuter de choses et d'autres. J'avais appris beaucoup de choses sur lui, et constaté que sa famille avait une place très importante dans sa vie. Il me parla longuement de sa soeur Arya, qu'il n'avait pas revu depuis des années, et je compris vite qu'elle était probablement l'une des personnes auxquelles il tenait le plus. Nous n'avions décidé de retourner dans nos chambres respectives qu'à la levée du jour, et je m'étais rendue compte qu'en sa présence, je ne voyais pas le temps passer.

Ainsi, je l'avais aidé à établir un plan pour intégrer Port-Réal, mais il reposait en grande partie sur l'aide de Tyrion. J'aurais aimé convaincre Daenerys de me laisser y aller, moi aussi, mais je savais déjà qu'elle refuserait. Cette dernière me tenait désormais en meilleure estime. Elle avait pu assister en direct à mes exploits, et elle avait enfin compris que je pouvais lui être indispensable. Elle n'hésitait plus à me demander mon avis pour certaines choses, et même si c'était très souvent sans grande importance, ça me laissait de l'espoir pour la suite.

Elle et Jon semblaient bien s'entendre, et, par chance, ce n'était pas encore allé plus loin entre eux. Ce qui était assez étonnant, vu la façon qu'ils avaient parfois de se regarder. Jon avait extrait une grande partie du verredragon dans les grottes de la forteresse, Daenerys ayant déployé davantage de ses hommes après l'attaque dont nous avions souffert. C'était une bonne nouvelle pour Jon, qui semblait de plus en plus impatient de rentrer chez lui. Mais plus le temps passait, et plus mon humeur s'assombrissait. Je savais qu'il ne pouvait pas rester ici indéfiniment, mais je me demandais comment serait mon aventure quand il n'en ferait plus partie.

Je ne l'avais plus beaucoup revu depuis notre dernière conversation, en dehors des heures de repas. Il se plaçait toujours en face de moi, de sorte que si je relevais la tête, mon regard tombait à chaque fois sur lui. J'en étais venue à me demander s'il n'en faisait pas exprès. 

Les choses s'accéléraient, mais je ne savais plus vraiment où était ma place. Comment convaincre Jon d'accomplir son destin en restant ici ? Si il repartait pour le Nord, je n'aurais d'autre choix que de le suivre. Mon plan ne se déroulait pas exactement de la façon que nous avions pensé, Tommy et moi. Une fois sur place, les choses étaient vraiment différentes. Après des jours à assister aux conseils de guerre de la Reine, à la mine maussade de Jon, et à subir un ennui mortel, je décidai d'aller aider à extraire le Verredragon. Au moins, ça me tiendrait occupée, même si ça précipiterait le départ de Jon. Mon Dieu, quel bazar...

Lorsque j'arrivai sur place, avec de vieux vêtements d'homme, plus confortables, je trouvai des dothrakis en difficulté. Une partie de la grotte semblait condamnée après un éboulement. A mon grand étonnement, il ne me lancèrent pas les regards hostiles auxquels j'étais désormais habituée. L'un d'entre eux, qui parlait la langue commune, m'expliqua qu'ils avaient peur de creuser cette partie, de peur de faire s'écrouler la grotte toute entière. Le seul moyen d'en avoir le cœur net, poursuivit-il, serait de pouvoir voir ce qui se trouvait de l'autre côté. Sans cela, ils étaient bloqués. Ils s'étaient justement adressés à la bonne personne. Je me postai donc devant cet éboulis, tachant de me concentrer le plus possible. Je n'avais jamais fait ça, et si je me ratais, les conséquences pourraient être catastrophiques. Mais je si je pouvais vraiment contrôler la matière, comme prévu, je devrais pouvoir y arriver. Je posai donc ma main sur la roche, fermai les yeux, inspirai un grand coup... Et me retrouvai de l'autre côté. La température avait chuté d'un coup. Je fis apparaître une flamme dans le creux de ma main, et en jetant un coup d'œil autour de moi, j'eus le souffle coupé. J'étais dans une grotte immense, bien plus que celle que je venais de traverser.

Je passai ma main le long des parois composées incontestablement de Verredragon, et découvris alors des dessins. Ils se composaient sous différents formes, toutes plus ou moins reconnaissables. Je passai de longues minutes à les regarder, et compris qu'ils étaient ici bien avant l'arrivée de Daenerys. Peut-être même avant l'arrivée des Premiers Hommes. Mon regard fut alors attiré vers un autre dessin qui se trouvait plus haut. Et je découvris alors le moyen de convaincre définitivement Daenerys de l'existence des marcheurs blancs.

Je me dépêchai de ressortir, ordonnai aux Dothrakis de ne toucher à rien, et courus en direction de la salle du trône. Mais juste avant d'y entrer, je distinguai Daenerys et Jon en haut de la colline. Ils semblaient assez proches, je vis même Daenerys sourire à un moment. Je sentis ma gorge se nouer, et compris que je ressentais... De la jalousie. Pour cette femme d'une beauté surhumaine, qui arriverait forcément à conquérir le cœur de qui elle voulait. Après les avoir observé pendant plusieurs minutes, pendant lesquels Jon ne détacha pas son regard d'elle, cette dernière finit par se retourner, comme si elle avait senti ma présence.

- Majesté, excusez-moi de vous interrompre, mais je dois absolument vous montrer quelque chose.

Je vis clairement à son regard que je n'avais pas choisi le bon moment, impression soulignée par Jon qui refusa de croiser mon regard.

- Cela devrait pouvoir attendre encore un peu.

- Non, je ne pense pas, Majesté. Je viens de trouver... Une preuve irréfutable de l'existence des Marcheurs Blancs.

Cette fois, enfin, Jon me regarda. Je l'ignorai, et retournai en direction de la grotte, suivie de près par Jon et Daenerys. Une fois arrivés, je déclarai :

- L'entrée de cette grotte est condamnée... Je dois... vous emmener de l'autre côté.

Je jetai un regard à Daenerys, qui semblait ne pas comprendre. Je lui tendis la main, qu'elle finit par prendre, pris une profonde inspiration, et nous nous retrouvâmes de l'autre côté. J'allumai une flamme qui flotta au dessus de sa tête, et ressortis de l'autre côté. Je n'étais pas encore assez expérimentée pour emmener deux personnes à la fois, et je préférais autant éviter de blesser quelqu'un.

Je revins de l'autre côté, et découvris un Jon sidéré par notre soudaine disparition. Je lui tendis une main tremblante, qu'il finit par prendre après m'avoir jeté un regard interrogateur. Je sentis les battements de mon cœur s'accélérer légèrement à son contact, je me dépêchai donc de le rompre dès que nous fûmes arrivés de l'autre côté.

Entre deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant