CHAPITRE 9: Liés

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   Jenny s'inclina devant son maître puis sortit de la salle du trône les épaules hautes. Elle travaillait pour les Ombres depuis maintenant deux ans. Avant cette date, elle ne se souvenait de rien. Lorsqu'elle s'était réveillée, on lui avait dit qu'elle avait subi un choc crânien qui lui avait fait perdre la mémoire. Elle n'avait à ce moment que douze ans. Son maître avait été franc avec elle : c'était les Ombres qui avaient assassiné ses parents. Cependant la jeune fille n'avait nulle part où aller, et il lui avait proposé de vivre au château. Pendant ses missions, elle était retournée en ville dans l'espérance de retrouver des visages familiers, en vain. Personne n'avait l'air de la reconnaître. En réalité, elle détestait ces salles crapules d'Ombres, bien qu'elle se soit trouvée des compagnons parmi eux, mais tant qu'elle gagnait de l'argent, jouer l'espion pour des criminels ne lui dérangeait pas trop. De plus, le maître de la forteresse lui payait un excellent prix. Avec l'argent, elle finançait des recherches sur son passé. Pour l'instant, lors de ses voyages elle n'avait encore rien découvert, mais Jenny gardait espérance de retrouver bientôt des traces.

   L'avantage de ne se souvenir de rien, était de n'avoir aucun remord à voler, usurper ou même tuer. Elle avait déjà effectué plusieurs missions d'assassinat pour gagner la confiance de son maître. Ce jour-là, la jeune fille avait reçu l'ordre de se rendre à la capitale afin de remplir une simple mission qui consistait à voler une flûte dans un musée. Jenny ignorait pourquoi son maître réclamait cet instrument de musique, mais cela lui importait peu. Elle profiterait de son séjour à Djavyn pour continuer ses recherches et se détendre un peu. La jeune fille prit son léger sac et posa à l'intérieur quelques armes, une gourde et une petite bourse remplie d'argent. Elle revêtu une tenue simple et classique lui permettant de se fondre facilement dans une foule de visiteurs. Jenny effectuerait la mission de jour. Avant de partir, elle s'observa quelques instants dans le miroir. Ses cheveux blancs comme la neige retombait souplement sur ses épaules. Cette couleur n'était pas des moins originales. De plus elle avait de grands yeux noirs qui formaient un contraste parfait avec sa chevelure. La petite Jenny s'était toujours questionnée sur ses origines, et cette couleur lui permettrait peut-être de reconnaître un membre plausible de sa famille. Enfin, si bien-sûr elle en avait une...

***

   Anaïs sortit de la douche en soupirant de plaisir. De la vapeur d'eau se répandit dans la chambre lorsqu'elle sortit de la salle de bain, et disparut presque aussi vite qu'elle était apparue. La jeune s'habilla, enfilant une tenue des plus sobres que Jellan leur avait donné. La chambre où elle séjournait avec ses amies en attendant que Jellan se rende à la réunion était situé au sixième étage d'un grand hôtel luxueux en plein centre d'une ville nommée Sertice, à Djavin. Elles n'étaient arrivées seulement trois jours auparavant et pourtant Anaïs avait déjà exploré la ville de fond en comble. La chambre, très chaleureuse, comportait trois lits et une salle de bains équipée d'une baignoire, où Anaïs s'était détendue à l'instant même. Zoé et Ivana étaient restées à la salle d'entraînement, pendant que celle-ci était remontée faire sa toilette. Anaïs resta un moment couché sur le lit. Elle avait peur. Peur de ce qui allait arriver, peur de ce monde, autant de ses alliés que de ses ennemis. La jeune fille avait du mal à comprendre son amie Zoé. Contrairement à cette dernière et quoi qu'elle dise, pour l'instant Anaïs ne prêtait pas confiance à Jellan. Elle soupira. La situation était si compliquée !

   Au bout de quelques instants, la jeune fille se leva en sursautant. Elle était sûre d'avoir entendu un bruit au dehors. Elle jeta un coup d'œil par la fenêtre, septique, puis ouvrit finalement la porte du balcon. Il devait être aux alentours de vingt heure, donc ici le soleil était déjà couché. L'air frais était agréable. La jeune fille observa quelques instants le ciel. Il n'y avait aucune étoile dans les cieux de ce monde. Toutefois, on pouvait y observer un phénomène tout aussi magnifique qu'on appelait l'élphèrogène. Le ciel, non uniforme, était composé de violet et de bleu. En plus de cette anomalie, on voyait aussi un phénomène légèrement semblable aux aurores boréales de la Terre, seulement elles étaient plus petites et plus claires, et formaient des lignes de couleurs toutes différentes.

   Anaïs secoua la tête afin de sortir de sa rêverie. Elle allait renter à l'intérieur lorsqu'un grand oiseau se posa sur le balcon, avant de se transformer dans une nuée de petites étincelles en un jeune garçon. Anaïs eu un cri de surprise et bondit en arrière tout en se frottant les yeux. Avait-elle rêvé ? Le garçon la regardait attentivement. Il avait de grands yeux clairs et des cheveux blonds en bataille. Il inclina la tête et demanda :

- Qui es-tu ?

   Anaïs, toujours ébahie devant cette apparition, répondit timidement :

- Ce serait plutôt à moi de te poser la question. Qu'est-ce que tu... es ?

   Le garçon hocha pensivement la tête, toujours accroupi sur le rebord du balcon :

- Vu la suite des évènements, je pense que tu as raison. Dans ce cas, je me présente : je suis un Anilohus.

   Remarquant le regard interrogateur de la jeune fille, il continua :

- Tu ne sais pas de quoi il s'agit, n'est-ce-pas ? Un Anilohus est un être créé par Pahana, le dieu des animaux. Personnellement je suis capable de me changer en aigle.

   Anaïs hocha lentement la tête. Le jeune garçon s'assombrit et attendit quelques instants avant d'annonçer :

- Bien, maintenant, passons aux choses sérieuses. Est-ce toi qui m'a appelé ?

   Anaïs balbutia :

- Que... Comment ?

   L'Anilohus continua :

- Je repose ma question : est-ce toi qui m'a appelé ?

   Anaïs murmura :

- Je ne crois pas...

   Le jeune garçon leva les yeux au ciel :

- Tu n'as pas l'air de comprendre, dit-il en plongeant son regard dans celui de la jeune fille. Dis-moi, quel est mon nom ?

   Anaïs répondit naturellement :

- Ensso, pourquoi ?

   Le jeune homme eu un faible sourire :

- Comment le sais-tu ? Je ne l'ai jamais mentionné.

   La jeune fille sursauta en remarquant qu'il avait raison. Le dénommé Ensso continua :

- Tom nom est Anaïs, n'est-ce-pas ? Pourtant tu ne t'es pas non plus présentée, remarqua-t-il en souriant. Je t'ai quelque peu menti sur les Anilohus. En réalité, ma forme initiale est l'aigle. Je peux me transformer en homme, mais très peu de temps. Si je conservais cette forme trop longtemps, je perdrais mes forces et finirais par mourir. Seul avoir un maître permet à un Anilohus de garder une forme humaine à volonté. Mais en trouver un n'est pas une mince affaire, expliqua-t-il en sautant de la rampe. Il faut que les liens soient compatibles et que les deux être s'acceptent. Tu m'as senti et tu m'as appelé. Je t'ai répondu.

   Ensso s'approcha de la jeune fille éberluée et lui la regarda droit dans les yeux :

- Anaïs, veux-tu devenir ma maîtresse ?

   La jeune fille recula en rougissant :

- Attends, tu veux que je devienne ta maîtresse dans quel sens ?

   Ensso fronça les sourcils :

- Que veux-tu dire ?

- Eh bien, je ne sais pas si c'est le cas ici, mais de là d'où je viens, une maîtresse est, comment dire... une sorte d'épouse.

   Le jeune garçon sursauta et recula :

- Mais bien-sûr que non ! Pas ici du moins. Une maîtresse est une personne qui a des serviteurs qui lui sont dévoué selon leur confiance en leur maître.

   Anaïs réfléchit quelques instants. Le jeune garçon n'avait pas l'air d'être convaincu par sa propre version d'un maître. Enfin elle sourit et dit :

- Bien, dans ce cas-là, et même si je ne sais pas trop en quoi cela m'engage, je suis d'accord.

   Ensso sourit et lui désigna son bras nu, car la jeune fille ne portait qu'un T-shirt. A la plus grande surprise de la jeune fille, un tatouage pâle, de la forme d'une plume, était apparu.

- En fait je ne te l'ai pas dit, mais tu l'es déjà. 

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