troubles de nuit

5| Amour

« Puis-je savoir ce qui te plaît chez une femme ? »

Le plus vieux hausse un sourcil. Il ne s'attendait pas à cette question venant du jeune homme. Il ne prend pas longtemps avant de lui délivrer une réponse.

« J'aime l'harmonie de son corps, ce qu'elle dégage. J'aime ses formes, sa différence de caractère avec nous. Cependant, je préfère lorsqu'elle me tient tête. C'est plus palpitant. » L'adulte a un sourire en coin, se remémorant les courbes pulpeuses dans le creux de sa main.

Joy fronce des sourcils. Cette réponse, il ne la comprend pas vraiment ou bien est-ce son esprit qui la rejette ?

« Parce que je ne suis pas différent de toi peut être ? »

« Pas tant que ça. » Lui répond Nao du tac au tac.

« Tu ne vois que le physique quand tu dis ça. »

Ils se regardent droit dans les yeux, veulent trouver la faille de chacun.

« Ne sois pas déçu, je ne suis juste pas attiré par les hommes. » La voix du plus vieux est calme. « Ce genre de choses ne se contrôle pas de toute façon. »

« Sur ce point, nous sommes d'accord. L'amour que l'on éprouve pour quelqu'un n'est pas qu'une réaction chimique mais également une sensation. » Déclare Joy sûr de lui.

Sa réflexion fait sourire le plus vieux, elle ne l'étonne pas. Il secoue la tête de droite à gauche, amusé.

« Au risque de te décevoir, je ne suis absolument pas de cet avis. »

Le regard du jeune homme s'appuie dans celui de son aîné. Il attend le point de vue de son compagnon, attentif. Sa curiosité est piquée.

« Je pense que quelque chose dans notre cerveau nous conditionne. Il y a un moment dans la formation du fœtus, quelque chose qui bascule. Je ne pourrais pas t'expliquer en profondeur car cela demanderait des connaissances sur le fonctionnement du cerveau humain mais pour faire simple, je pense qu'il se passe exactement la même chose que pour les gauchers et les droitiers. Tu nais en étant gaucher ou droitier, tu es conditionné pour. »

La pensée du plus vieux se heurte à celle du jeune homme, Joy fronce des sourcils.

« Je refuse de croire en cette hypothèse. »

« Elle est pourtant plus que plausible. Comment expliques-tu que des hommes et des femmes veulent changer de sexe quarante ans passés, disant s'être toujours sentis de l'autre sexe ? Dans de nombreuses espèces animales, il y a des hétéros et des homosexuels, ce n'est pas propre à l'homme. Je pense que nous n'exploitons pas assez ce champ de recherches mais il faudrait, cela apaiserait de nombreux conflits inutiles. »

Le plus jeune se pose un instant, garde le silence. Il est vrai que les gauchers à l'époque de ses grands-parents étaient maltraités, on les forçait à écrire de la main droite. Certains se pliaient à la règle tandis que d'autres voyaient leurs doigts se faire frapper jusqu'au sang. Pourtant, ils restaient gauchers, ils attrapaient toujours les objets de la main gauche mais écrivaient de la main droite.

« Je veux bien réfléchir à tes explications mais pour moi, il y a toujours cette sensation inexplicable que l'on ressent. Ce sentiment qui va parfois contre notre volonté. Dis-moi, combien de prétendus hétérosexuels se sont découverts homosexuels ? »

« Ils l'ont toujours été, c'est juste qu'ils ne le savaient pas. Toi, comment tu l'as su ? »

Le jeune homme scrute les traits de son aîné. Il est sérieux, intéressé. Ses yeux ne le trompent pas.