Je demeurais là, encore sous le choc, figé au beau milieu du village. Je m'étais trompé. Pour la première fois depuis que la traque avait commencé, j'avais eu tort. Nous avions mis à mort un innocent. J'étais pourtant convaincu qu'il s'agissait bel et bien d'un loup-garou. Comme toujours, les autres m'avaient suivi dans le vote matinal. Je venais lamentablement de perdre leur confiance. Je m'en allais la tête basse, mort de honte et de remords. Comment avais-je pu être si certain de mon vote ? À cause de moi d'autres innocents allaient mourir cette nuit des griffes de ces monstres !À nouveau chez moi, je m'allongeai et fermai les yeux afin de me remémorer chaque détail du procès qui aurait pu m'échapper. Je revis alors le moment où j'avais quitté le lieu d'exécution et qu'un regard bien plus lourd que les autres avait pesé sur moi. Celui du jeune homme le plus mystérieux du bourg, un certain Erian, si j'en croyais les archives. Il ne sortait quasiment jamais de chez lui, excepté pour le vote obligatoire du village. À bien y réfléchir, il était trop discret pour être innocent. Ce fut alors décidé : j'allais mener mon enquête !
La nuit tomba et la pleine lune se leva. Les loups ne tarderaient pas à se réveiller. D'un pas rapide et vigilant, je me faufilai dans les rues désertes en direction du domicile du fameux associable. Je n'étais pas très serein quant à me promener ainsi dans l'obscurité tout en sachant ce qui pouvait potentiellement m'attendre. Une fois sa maison en vue, je m'en approchai lentement, aux aguets. Il était le seul de son voisinage à ne pas avoir allumé les lumières. Étrange, n'était-il donc pas chez lui à une heure pareille ? Je collai mon visage à l'une des fenêtres et portai mes mains en visière pour tenter d'apercevoir quelque chose. J'avais beau essayer, je n'y voyais toujours rien. J'allais abandonner l'idée quand soudain du mouvement s'inscrivit dangereusement dans les reflets de la vitre. Quelqu'un était brusquement apparu derrière moi. Avant que je n'eusse le temps de faire quoique ce fût, une main se posa sur ma bouche et me tira en arrière. J'abandonnai vite l'idée de me débattre quand je sentis le métal froid de la lame d'un couteau glisser contre ma gorge. Mon agresseur pencha son visage en avant et chuchota contre mon oreille :
- Qui t'a permis d'espionner ma demeure ?
Erian. Il était là, derrière moi. Je me figeai, ne désirant surtout pas faire le faux mouvement qui me coûterait la vie. Celui-ci retira sa main de ma bouche pour me laisser parler.
- Je suis... commençai-je, paralysé par le danger. Je suis venu enquêter sur l'identité des loups-garous.
- Et c'est en fouillant chez moi que tu crois trouver quelque chose ?
Sa voix était étonnement calme, ce qui fut d'autant plus effrayant. Le souffle chaud et dangereux qu'il laissait rouler sur ma peau, contrastant avec l'air frais de cette nuit de printemps, me perturba d'autant plus. J'avais l'impression d'être la proie fraîchement chassée d'un prédateur. Un prédateur joueur qui cherchait à me faire languir dans une horrifiante peur jusqu'à ce que je le supplie d'enfin me dévorer.
- Je te soupçonnais voilà tout, affirmai-je trop franchement.
- Moi ? Un loup ? répéta-t-il.
À travers le reflet de la vitre, je pus voir sa bouche s'entrouvrir et ses dents briller dans un rictus amusé, presque goguenard. Sans prévenir, il retira son arme de ma gorge pour la porter à mon dos et me pousser à entrer chez lui.
- Eh ! Attends ! Qu'est-ce que tu me veux ? protestai-je.
Il ne répondit rien et ferma la porte derrière nous. La pièce était plongée dans l'obscurité, seuls quelques rayons lunaires me permettaient de percevoir les contours du décor.
- Que me veux-tu ? insistai-je.
Le jeune homme rangea son couteau et affirma :
- Nous sommes du même avis concernant le village, nous devons arrêter les loups-garous coûte que coûte.
VOUS LISEZ
À la Merci des Loups [BxB]
WerewolfDu jour au lendemain, le village fut envahi par les Loups-garous. Des mangeurs d'hommes, aux traits humains le jour, que les habitants tentaient d'éradiquer par des votes matinaux dont le désigné était jugé coupable et brûlé au bûcher. Puis je suis...