« Conduis prudemment, chérie » dit ma mère de la porte d'entrée, son tablier de cuisine toujours accroché à son ventre, légèrement engraissé. Je souris aux simples cheveux bruns tombant sur son visage et à son regard de mépris -elle a travaillé dur pour faire ce dîner de Thanksgiving pour toute la famille et, je peux dire avec fierté qu'elle a réussi son coup.
Je penche ma tête par la fenêtre. « Je ferais attention ! Assure-toi que Jack soit au lit à 21h s'il te plait ! »
Mon fils de cinq ans sort derrière ma mère, avec des restes de tarte à la citrouille sur les coins de sa bouche. Ses minces cheveux blond clair semblent si fragiles dans ce vent glacial et mon instinct maternel aimerait lui ordonner de rentrer au chaud. Ici, dans la banlieue de Boston, les intempéries de l'hiver apparaissent beaucoup plus tôt que ce que j'aimerais.
Ma mère pense exactement la même chose que moi puisqu'elle enveloppe Jack dans une étreinte et protège ses yeux du vent. Il s'échappe de sa poigne, comme n'importe quel enfant nourrit par le sucre. Avant qu'elle ne puisse l'arrêter, les jambes minces de Jack court où ma voiture est garée. Il fond en larmes quand il arrive à ma vitre.
« Maman, s'il te plait, ne pars pas » gémit-il et je peux sentir mon cœur se briser en morceaux.
J'ouvre ma porte pour qu'il puisse s'asseoir sur mes genoux. « Je ne serais pas partie longtemps, je te le promets »
Jack se frotte les yeux. « Où tu vas ? Pourquoi je ne peux pas venir avec toi ? »
Je me mords la lèvre et cherche une excuse suffisamment convaincante pour un enfant de cinq ans. Je vais profiter du Black Friday qu'offre cette ville, ce soir. Je ne peux pas le dire à Jack. Ce Noël, j'ai enfin assez d'argent pour faire des achats sans prendre un prêt.
« Je vais à l'atelier du Père Noël » dis-je avec enthousiasme, avec un sourire lumineux. Bien qu'il soit sombre à l'intérieur, je peux voir les yeux de Jack s'illuminer à l'entente du Père Noël.
« Le Père Noël ? » sourit-il. « Pourquoi tu vas à son atelier ? »
« Parce que...Parce que je veux lui donner la liste que tu m'as donné, tu te souviens ? Je dois être sûre que les elfes sachent exactement quoi faire pour toi ! »
Les rouages tournent dans sa tête. « L'atelier est au Pole Nord, maman. C'est à des milliards et des milliards de kilomètres d'ici ! »
Je baisse la voix. « Je ne t'ai pas dit ? »
« Me dire quoi ? ». Il me regarde avec fascination.
« Le Père Noël a fait un atelier ici, à Boston ! »
« Il a fait ça ? »
« Il a fait ça » je répète, avec le plus grand enthousiasme. « Mais les mamans et les papas peuvent seulement y aller si leurs enfants sont sages ! »
« Je vais être sage, je le promets ! ». Il saute de mes genoux et retourne au près de ma mère, jacassant déjà sur ce nouvelle atelier du Père Noël, à Boston.
« Je t'aime » je hurle après lui.
Il se retourne et me souffle un baiser exagéré. Je rends la pareille et fais un signe à ma mère avant de mettre la voiture en route et me diriger vers le centre-ville -cette partie de la ville sera, j'en suis sûre, remplie de parents fous et de gardes de sécurité.
