Chapitre 4 - Départ précipité

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Il devait parler à sa mère le plus rapidement possible. Il ne pouvait s'empêcher de se le répéter toutes les vingt secondes tant l'impatience était grandissante. Il avait eu beau appeler, sa mère n'avait pas daigné répondre. Il était maintenant assis à la gare centrale, en attente que son autobus soit prête à partir.

Il avait d'abord choisi de passer par l'Hôpital St-Luc dans l'espoir d'y retrouver Gabriela, mais on l'avait avisé qu'elle passait actuellement des examens et qu'elle en avait pour très longtemps avant d'être placée dans une chambre. Une gentille infirmière à qui il avait expliqué - en dénaturalisant un peu l'histoire - être le petit ami de Gabriela, lui avait fait part que cette dernière était dans un état stable, mais sombrait toujours dans ce qui semblait être un coma profond.

Tommy avait fait les cent pas durant un bon moment, mais ses pensées ne faisaient que s'assombrir. Il était passé des larmes à la crise de nerfs en voyant tout le personnel hospitalier qui ne lui apportait aucune réponse. Au bout d'un moment, il avait regardé sa montre et avait décidé de quitter. La raison étouffait ses envies. Il savait bien que rester là ne servirait à rien. Il ne connaissait ni les parents de Gabriela ni aucun membre de sa famille d'ailleurs. Attendre ne servirait qu'à partir plus tard sans plus de résultat. Mieux valait chercher plutôt des réponses et il avait le sentiment que sa mère en aurait.

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Sa mère était venue le prendre au village tout près de l'arrêt d'autobus. Elle lui avait d'abord semblé inquiète. Elle s'était approchée subitement de lui et son regard avait parcouru Tommy des pieds à la tête. Elle avait entouré son visage de ses mains et avait doucement déposé un baisé sur son front, comme quand il était petit. Il avait senti une chaleur profonde s'immiscer en lui et parcourir tous ses membres. Elle avait vérifié s'il avait toujours la pierre autour de son cou et semblait s'être calmée en la voyant. S'il avait voulu poser les millions de questions qu'il avait ruminées en chemin, maintenant il ne pouvait plus. Il se souvenait de choses qu'il tenait à discuter, d'un important sujet dont il voulait faire part à sa mère, mais le contenu de ses pensées s'étaient évaporées. Comme des objets vides. Un courriel portant un titre mais sans contenu.

Elle conduisit rapidement vers leur petite maison, passant devant la boulangerie de son père. La petite boutique affichait fermée sur la porte. À cette heure tardive, la cours asphaltée était vide depuis un bon moment. Madeleine se retourna vers son fils.

Les affaires vont biens cette année, il y a beaucoup de touristes. Je suis contente pour ton père.

Tommy regarda sa mère et lui rendit son sourire en quittant du regard la boulangerie qui s'éloignait d'eux à mesure que la voiture les dirigeait vers la maison de campagne qui les attendait. La nuit s'était levée il y avait déjà plusieurs heures et la fatigue commençait à gagner les paupières de Tommy. Son père serait déjà couché, car il ouvrait très tôt la boulangerie demain matin. Sa mère l'en avait avisé dès qu'ils s'étaient mis en route. Ils poursuivirent leur chemin durant un bon vingt minutes, baignés de silence. Madeleine semblait réfléchir, perdu dans le fil de ses pensées et Tommy avait le cerveau dans le néant et ne pensait qu'à dormir.

À leur arrivée, Madeleine insista pour s'occuperdes valises de son fils et ils grimpèrent ensemble les marches duportique. La maison ne semblait pasavoir changée. Il n'était pas revenudepuis Noël dernier. La neige avait cédésa place aux innombrables fleurs que nourrissait le jardin. Même sous la lueur de la lune, Tommy arrivaità s'imaginer les milliers de couleurs vives et l'odeur des rosiers en fleurséveillèrent en lui des souvenirs joyeux. Il monta à sa chambre comme s'il y était hier. Les murs avaient été repeints d'une couleurlavande très pâle et l'odeur de peinture fraîche avait remplacé celle de lasauge qu'abritaient ses souvenirs. Ils'endormit vite, beaucoup plus vite qu'il ne l'aurait cru. Étrangement vite, même. Et juste au moment où ses paupièress'abaissèrent pour se laisser porter dans les bras de Morphée, ses questionslui revinrent à l'esprit, mais il était déjà trop tard, la maison baignait dansun calme plat, ses parents dormaient et il se laissa emporter par les rêves.

OMBRE - Les âmes d'OmbreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant