OMBRE - Les âmes d'Ombre

Chapitre 7 - Un destin scellé

Une odeur de menthe poivrée enivrait la cuisine. Madeleine était debout devant la fenêtre, le visage enveloppé par les chauds rayons du soleil. Une fine brume dessinait les contours du jardin qui se réveillait dans les premières lueurs du matin. Le jour était calme, trop calme. Elle contemplait le vieux pommier qui surplombait le jardin, perdu dans ses pensées. Elle ne cessait de se répéter cet adage que sa mère lui avait un jour enseigné.

-— Un matin d'été où le pommier, en fleurs sera pour la deuxième fois, notre destin maudit, scellé sera...

Elle joignit les mains autour de sa tisane fumante et laissa aller un long soupir. Tel était leur destiné, leur raison d'être. Tant de générations avaient été mises au monde, elle le savait depuis son enfance. Elle avait été éduquée en conséquence. Elle aurait voulu espérer un autre avenir pour son fils unique, mais l'avenir avait été dessiné dès sa naissance. Rien ne servirait aujourd'hui de se tourmenter, les heures étaient comptées et elle ne pouvait plus rien changer au destin. L'objectif avait été de le protéger jusqu'à ce jour et le jour était venu.

— En aucun moment n'éduquer sur sa destinée le fils que tu auras. Son innocence le guidera et le sauvera...

Les larmes coulèrent sur ses joues à ce souvenir. Il avait été si difficile et souffrant pour elle de ne rien dire tout au long de ces années. Elle s'était plongée dans un silence, récitant de temps à autre une formule contre elle-même pour s'obliger à conserver le secret. Jamais elle n'aurait cru que le moment ultime serait aussi prenant émotionnellement pour elle. Elle avait beau avoir été préparée pour cet événement, il s'agissait de son fils. Elle savait qu'elle devrait le laisser partir seul, suivre son destin, mais elle ne pouvait l'accepter.

Elle prit la dague qu'elle avait déposée sur le comptoir. Le symbole des trois lunes captèrent la lumière et projetèrent son reflet sur les murs de la cuisine. Elle ferma les yeux et prononça en elle la formule magique de réduction. La dague subit un léger tremblement. Madeleine sentit la chaleur passer du cœur à son bras, vers sa main, puis à ses doigts et l'énergie fut transférée dans la dague qui s'illumina et fondit littéralement dans sa paume, jusqu'à trouver la taille d'un pendentif. Elle prit une corde et fit un assemblage avec une plume de hibou et une écorce du pommier qu'elle avait pris soin de recueillir en se levant le matin-même. Des gestes acquis il y a longtemps, par l'enseignement de sa propre mère.

Elle se servit une autre tisane tandis que les pas de Tommy se faisaient entendre à l'étage. Elle leva la main droite et décrivit un cercle de son index en direction de la chambre où se trouvait Tommy en l'interpelant. Elle regarda de nouveau le grand pommier au fond du jardin, épanouis d'une floraison abondante pour la deuxième fois en ce début d'été. Leur avenir était maintenant scellé, il leur faudrait affronter la destinée.

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Sa tête était lourde. Il avait du mal à se souvenir du rêve qu'il avait fait durant la nuit, mais le visage de Gabriela baignait dans sa mémoire. Il se souvenait de sa tristesse qui l'avait poignardée en plein cœur et d'un grand froid qui l'avait envahi. Mais il avait beau y réfléchir, rien de plus ne lui revenait. Il prit de grandes respirations pour retrouver ses esprits et se leva.

Lorsqu'il sortit les pieds du lit, il fut stupéfait de remarquer les marques qui se traçaient autour de ses chevilles. On aurait dit des marques ensanglantées laissées par des chaînes. Il releva les draps dans l'espoir d'y trouver quelque chose qui l'aiderait à comprendre, mais rien. Seul de fines taches de sang souillaient le couvre-matelas beige. Il se passa les mains au visage, croyant qu'il rêvait toujours, mais en regardant de nouveau, les plaies restaient toujours visibles.