Elle

840 81 3
                                    

Comme il le lui avait clairement fait comprendre, elle resta derrière lui, mettant ses pas dans les siens, se laissant envelopper par ce brouillard dense et humide.

Elle ne voyait qu'à peine par dessus l'épaule de Daryl, droit devant eux, ce monde terne, sans contour défini et si silencieux ; se contentant de fixer l'aile de son ange, protégée par son bras droit, tenant l'arbalète en joue.

Au bout d'un moment, Daryl accéléra sensiblement le pas, sans prévenir, et elle trotta pour le rattraper et se mettre au même rythme, venant shooter parfois contre son talon.

Mais il ne montra aucun agacement ni impatience. Elle ne risquait pas de le faire trébucher, inébranlable qu'il semblait être dans cette position de vigilance absolue qui paraissait être si naturelle pour lui.

Le brouillard augmentait encore l'ambiance froide et inerte de ces bois qui lui glaçaient déjà les sangs habituellement. Elle se savait seule depuis des semaines qu'elle s'était enfuie de l'hôpital, à fuir Dawn et surtout Gorman. Elle n'avait rien prémédité, juste fuit lorsque la seule occasion s'était présentée. Pour finalement se retrouver dans ces bois. Seule au monde, quoi ou qui qu'elle rencontre. Elle se savait seule au monde. Jusqu'à Daryl. Et pourtant elle luttait, pour ne pas lui être un fardeau, mais surtout pour ne pas avoir besoin de lui, pour ne pas s'attacher à lui, pour ne pas céder à sa solitude qui la torturait sans répit. Elle luttait de toutes ses forces. Et elle savait sa bataille déjà perdue.

Ils avancèrent de cette manière une bonne partie de la journée, bercée par le rythme de leurs pas à la fois rapides et lancinants. Cela lui permettait de ne pas trop ruminer, et de rester concentrée.

A la mi journée, lui sembla-t-il, le brouillard se leva un peu alors qu'ils pénétraient dans une clairière.

Les premiers râles, déjà proches, se firent clairement entendre.

L'arbalète se redressa pratiquement toute seule et un carreau fusa avant qu'il ne dégaine son arme blanche et accélère encore le pas, courant droit devant.

Sans réfléchir, elle le suivit comme elle put, attrapant de sa main libre le bas de sa veste flottant au rythme rapide de sa course.

A elle de ne pas trébucher, sinon, elle savait que c'était la fin.

Pour elle en tous cas.

Les yeux vitreux -TWD - [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant