Chapitre 1.1

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La lettre

Le soleil se levait sur la ville. Marien se levait et enfila ses vêtements de sport. Il ouvrit la porte à la volée et emprunta la rue à sa droite comme il le faisait chaque matin depuis qu'il avait fuit son père. Il chassa son père de son esprit et se concentra sur sa course. Cela faisait depuis ses dix ans qu'il ne l'aimait plus, il l'avait laissé tomber. Jusque ses quinze ans s'enchaînaient les disputes avec son père et son compagnon qui venait de plus en plus régulièrement chez son paternel. Puis, lorsque son père avait été largué, Marien avait espéré une amélioration dans sa relation avec son père, mais au contraire, celle-ci empirait. Son père débuta une dépression où son père l'accusait d'avoir détruit son couple, à cause de sa réticence à accepter un troisième homme à la maison. Le jeune homme, âgé de seize ans, décida de de se renseigner sur les emplois disponibles. Il disposerait donc enfin du même salaire, et donc des mêmes conditions de vie que tout le monde, sans avoir à assumer les conséquences des actes de son aïeul.

Seulement, la réalité était plus compliquée. Marien avait peut-être réussi à trouver un appartement, mais pour le travail, c'était plus compliqué. Il avait trouvé un petit boulot de serveur à ses débuts, mais il fût vite renvoyé lorsqu'on avait su que son père endurait encore la peine de son ancêtre. La loi lui donnait certes le droit de travailler et de recevoir le même salaire que tout le monde, mais lorsqu'on savait qu'une personne avait des ancêtres au passé criminel, on ne voulait pas risquer d'entacher sa réputation. Il avait donc été renvoyé. Tout le quartier le connaissait ; personne ne voulait de lui. Il réussissait de temps en temps de travailler au noir pour rendre service à quelques personnes. Ces services n'étaient pas souvent légaux, mais de toute façon, dans ce quartier où les hommes n'avaient rien à se reprocher, il y avait toujours quelque chose d'illégal à faire. Les criminels venaient généralement de ce genre de quartier : ceux où vivent ceux qui sont en légalité. Dans le quartier de son père, ce sont les descendants de ces criminels, qui sont généralement ceux qui suivent le droit chemin, sous la honte de leurs ancêtres, voulant épargner leur progéniture du sort que leurs ancêtres leur avait fait subir.

Il s'était mis à courir tous les matins pour pouvoir se muscler et trouver un métier nécessitant un bon physique, car dans ces domaines, on employait beaucoup de monde, sans faire attention au passé, il suffisait juste d'avoir un corps solide et une santé d'acier. Il allait aussi souvent à la salle de musculation, le gérant lui payant l'accès, en échange de quelques services comme lui faire les courses ou l'aider à programmer quelques robots ménagers, ce qu'il n'arrivait pas à faire car il était né avant l'arrivée des cours de programmation, les robots étant avant livré déjà programmé, des choses légales, ce que Marien préférait, car malgré tout, il détestait faire ces choses illégales qu'on lui demandait régulièrement.

Le gérant s'appelait Ethan et avait la soixantaine. Ethan gérait la salle mais n'était pas du tout sportif. Il en avait hérité de son père et en faisait tout une histoire ancestrale d'héritage sacré. On le décrivait comme assez borné et assez drôle. Il avait un côté "père-poule". Il avait rencontré Marien lorsqu'il rentrait du collège et l'avait vu dépité.

"Qu'est-ce qu'il ne va pas petit ? Tu n'as pas l'air d'aller bien." lui avait-il dit. Marien s'était mis à sangloter et d'instinct, il l'avait prit entre ses bras. Marien avait senti que malgré le corps squelettique qui l'enlaçait, cet homme lui promettait un cocon accueillant et chaleureux. Le jour suivant, l'homme décida de revoir le gamin tous les jours après ses cours, pris d'une soudaine affection pour l'enfant. Depuis, Ethan était comme le grand-père de Marien.

Marien, en repensant à ces beaux souvenirs, ne fit pas attention à l'homme qui passait juste à côté de lui. Il le bouscula et tomba.

"Désolé Monsieur !"lui-dit-il, mais l'homme avait continué son chemin.

Il se releva et remarqua une enveloppe. Son nom y était inscrit. Intrigué, il l'ouvrit. Il y était simplement écrit : "Veuillez me suivre." La lettre avait du tomber de l'homme que Marien avait bousculé. Il regarda devant lui. L'homme allait tourner à droite. Il courut pour le rattraper. Il lui posa la main sur l'épaule, essoufflé.

"Attendez-moi, M'sieur."

L'homme se dégagea de la main de Marien et continua son chemin. Marien le suivit pendant longtemps, entre pleins de ruelles larges de deux mètres, et les ruelles bondées de monde, tentant de temps à autre de le faire parler.

"Hé, vous vous appelez comment ? Pourquoi voulez-vous que je vous suive ? J'aime bien les sandwichs à la tomate et vous ?"

Il arrêta de poser toutes ces questions sans aucune logique, comprenant que l'homme ne dirait rien. Il essaya aussi des contacts physiques, rien n'y faisait. A court d'idées, il essaya même de se planter devant l'homme, les bras en croix.

L'homme réagit enfin. Marien n'eût pas le temps de comprendre ce qui lui arrivait qu'il finit à terre. Il lui avait fait une technique de judo. Il se releva, sonné. L'homme lui tendit la main. Marien la saisit et tenta de mettre à terre celui qui l'avait fait précédemment, mais au moment où il tira sur la main de l'homme, il senti une épine pénétrer dans le milieu de sa main. Il tenta de retirer sa main, mais son bras ne lui répondit plus. Il recula, mais il n'y avait que son côté droit qui répondait.

"Merde, j'y suis allée un peu fort. Désolée. Enfin, n'essaye pas de parler, tu ressemblerais juste à un escargot bavant vraiment beaucoup. Tout ton côté gauche est paralysé pour un moment."

Marien n'essaya pas de parler car il bavait suffisamment sans parler. L'homme qui portait jusque là un haut-de-forme, le retira. En dessous se cachait de longs cheveux châtains avec quelques reflets roux. Marien fut intrigué par ces cheveux si longs et soyeux. Et son visage n'était pas aussi anguleux que ceux dont il avait l'habitude. Ses lèvres étaient étrangement pulpeuses. Et Marien comprit assez tard. C'était une fille.

"Apparemment je suis la première fille que tu vois. Enfin ta tête à moitié paralysée au début c'était bizarre, mais là, encore plus. On dirait une grenouille-escargot qui veut ma mort. Enfin, moi c'est Lydie."

Marien eût un rire qui ressemblait plus à un étouffement qu'autre chose à cette parole. Pendant ce temps, Lydie souleva Marien comme si c'était un poids-plume et le prit sur son épaule. Elle avait une odeur de rose. Il l'aimait bien, cette première fille.






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