Dieu est un astronaute

21. Oz

Un enterrement, c'est vraiment étrange quand on y va sans vraiment connaître la personne qui est enterrée...

Le cercueil en bois rouge est descendu au fond du trou profond. La plaque de marbre attend que le nom du défunt soit gravé sur son gris pâle.

Nine essuie ses larmes. Elle avait beaucoup insisté pour que je l'accompagne.

- Il ira où à ton avis ? Me demande-t-elle.

- Là en quoi il croyait.

Elle hoche la tête.

- Et s'il ne croyait en rien ?

- On croit tous en quelque chose au fond de nous... Répondis-je en mettant ma main sur mon cœur.

- Même si on se rend compte que ça n'existe pas ?

Je plonge mes yeux dans les siens. Elle ne croit plus en Dieu ?

- Même.

Elle détourne son regard vers le cercueil.

L'Astronaute est déchu. Il vient de perdre la seule personne qui croyait en l'Astronaute Suprême. Ce Dieu qu'elle s'était inventé, qui la rassurait. Ce Dieu inspiré de celui que sa mère lui avait appris à aimer.

Pour elle, Dieu n'existe plus.

Les parents de Jonas se serrent l'un contre l'autre. Son père pleure à chaudes larmes. Sa mère soutient son mari.

Et il fait grand beau.

Nine me sert le bras, très fort. Puis les fossoyeurs commencent à remettre la terre en place dans le trou. Cette fois, la mère de Jonas aussi tombe en larmes. 

- Comment tu te sens ? Glissé-je à l'oreille de Nine.

- Bizarre.

Finalement quelques personnes s'éloignent de l'enterrement. Je regarde Nine, elle hoche la tête, et on les suit.

- On va où ? Demandé-je ?

- On marche un peu ?

- D'accord.

On commence à longer le cimetière. Une fois hors de vue, Nine m'attrape la main. Je la serre. On continue un instant sans parler.

Les cloches de l'église sonnent midi.

- Dieu n'existe pas. Lâche Nine, alors qu'on arrivent aux abords d'un sous-bois.

- Pourquoi donc ?

- Parce qu'il n'aurait pas tué un être aussi jeune, et en plein doute.

- Peut-être était-ce le bon moment pour lui de mourir ?

- Non.

Elle est catégorique.

- Et pour nous ? Commencé-je. Comment on va faire ? Est-ce que ça réussira à exister après... Après tout ça ?

Nine me regarde.

Elle se met face à moi et attrape mon autre main. Puis elle me tire contre elle, doucement. Nos fronts se frôlent, nos nez se touchent et nos lèvres s'attrapent.

- Tant qu'on le pourra, nous existerons.

Je réponds à son baiser en la serrant fort contre mon buste.

- Et peu importe qui n'existe plus autour de nous.