17 juin 1940, Rennes(France)
Ça y est. J'y suis.
Mon anxiété est si grande que je sens le tissu de ma robe blanche s'humidifier sous mes fesses. J'ai toujours eu horreur de cette sensation de chaleur lorsque je suis assise depuis trop longtemps sur une chaise. En plus d'être désagréable, j'ai toujours cette peur que lorsque je me relèverai il y ait une tache sur mon vêtement. Je ne me vois pas sortir dans la rue avec une tache laissant penser que je me suis urinée dessus. Rien que d'y penser, mon esprit n'est pas tranquille.
— Catherine ? Demande Jean à côté de moi.
Jean et moi nous sommes rencontrés il y a cinq jours chez l'épicier.
— Tu ne m'écoutes pas. S'énerve-t'il.
Je tourne mon visage vers lui. Ce jeune homme de cinq ans mon aîné est blond comme moi. Ses yeux bleus et son corps sportif remplissent tous les critères pour être un parfait petit « Aryen ». De loin, nous pourrions le prendre pour un d'entre Eux. D'ailleurs, comme les allemands qui font des rondes dans les rues, il est aussi froid que la pierre. S'il n'avait pas répondu à mes questions sur les personnes qui se faisaient emmener par les occupants, jamais je ne me serai approchée de lui. Jean fait partie de la Résistance. D'après ce que j'ai compris, il écrit pour le journal et accroche les tracts un peu partout dans Rennes. —Catherine ! Réitère-t-il en élevant la voix malgré le fait qu'il chuchote. — Oui ? Je ne m'excuse pas. Il est tellement désagréable et imbuvable que déroger aux règles de la politesse m'enchante grandement. — Rappelle-toi que si tu passes le pas de cette porte, me dit-il en me montrant la porte du bureau en face de nous, tu ne seras jamais la même. C'est le moment de te désister. Je souffle de frustration. Il me répète cette stupide phrase depuis que j'ai décidé d'apporter mon aide au groupe clandestin.— Tu dramatises. J'ai passé de nombreuses fois des portes de bureau et je n'ai pas changé.
Tu remarqueras que la dernière fois que tu as attendu devant un bureau, tu as quitté l'Angleterre. Remarque ma petite voix intérieure. Un sacré changement.
—Je retire ce que j'ai dit.
Jean tourne sa tête vers moi et me lance un regard noir.
— Tu es trop bavarde.
Simple. Clair. Jean est efficace, il ne faut pas le nier.
La porte s'ouvre devant nous. Un homme souriant se déplace pour nous laisser passer.
Jean rentre le premier. Je vérifie discrètement si ma robe a une tache. Il n'y a rien et je peux enfin adresser un sourire sincère à la personne qui nous reçoit.
D'après la plaque en bois qui se trouve devant son bureau, il est le directeur de l'université. — Mademoiselle, Adrien Bellevoie, se présente-t-il.Il s'assoit en face de Jean et moi. Ses yeux me scrutent. Je cache mes mains qui tremblent. D'une voix peu assurée, je lui dis mon nom: Catherine Baille.
— Vous êtes bien jeune pour rentrer à l'université. Quinze ans tout au plus...
Je me doutais bien que mon âge causerait des problèmes. — L'âge ne fait pas tout.
Je le regarde et il hausse un sourcil. Un rictus moqueur se dessine sur ses lèvres. Comme beaucoup d'adultes, il ne me prend pas au sérieux.
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Grâce à la guerre
Fiksi Sejarah10 mai 1940, les allemands attaquent la France. Catherine se trouve alors dans un pensionnat en Angleterre. Elle ne se doute pas de ce qui va frapper son monde. 8 décembre 1941, les Etats-Unis commencent à se battre dans le Pacifique. Ayden n'est...