La Destinée d'Ova

Chapitre 6

J-10 (suite)

C'est l’après-midi et je n'ai pas quitté la maisonnette. Je me suis calmée depuis ce matin. Nous nous sommes mis d’accord sur le fait qu'il ne doit plus m’enfermer dans cette chambre et en contrepartie je dois me tenir à carreau. Oui, je me suis décidée à coopérer avec un homme que je ne connais pas mais qui semble en savoir plus sur moi qu’il ne laisse penser. La tempérance n’a jamais été mon fort mais ici j’y suis bien obligée. On ne s’est pas adressé la parole depuis ce matin, et en ce moment, occupé à cuisiner, je n’ose rien dire pour l’instant. C'est une atmosphère pesante et gênante qui s’installe, en tout cas dans mon point de vue car ça n’a pas l'air de le déranger. Depuis tout à l'heure, il est comme plonger dans ces pensées en étant présent physiquement mais absent à la fois.

Debout sur la terrasse extérieure, je regarde vers l'étendue de forêts qui se présente à moi. Je n'ai qu’une envie à cet instant précis, celle de prendre mes jambes à mon coup et de m’enfuir pour de bon. Mais ça ne servirait à rien car je sais qu’il me rattrapera à coup sûr. Ryo m’appelle pour me dire que le repas est près. Je le rejoins en essayant de masquer ma faim. Il est vraiment très beau comme homme, s’en est agaçant. Je scrute son visage parfaitement symétrique caché par ses cheveux mi-longs qu’il rabat derrière son oreille. Oreille qui semble être habillée d’une oreillette. C’est étrange car jusqu'à présent je n’ai remarqué aucun appareil technologique dans cette maison. À moins que je n’aie pas regardé au bon endroit. C’est vrai aujourd'hui qui n’en possède pas . J’ai finalement un espoir de m’en sortir plus vite que je ne le pense. Je décide de briser ce silence interminable.

- Tu vis tout seul ici, au milieu de cette forêt ?

- Il me regarde d’un air étonné et finit par hocher la tête.

- Et depuis combien de temps ? Poursuivis-je.

Il s’arrête de manger et là me dévisage de la tête aux pieds.

- Depuis bien assez de temps. Dit-il en reprenant son déjeuner.

- Et tu n’as pas de famille ? Insistai-je.

- Qu’est-ce-que tu veux Ova ?

- Je veux juste en savoir un peu plus sur l’homme que j’ai en face de moi et avec qui j’habite.

- Mange ça va être froid.

Je me décide à manger. Je ne sais pas si c’est à cause de mon jeûne mais ce plat est un vrai délice.

- Tu auras les réponses à tes questions bien plus tôt que tu ne le penses. Reprend-il.

- Ce qui veut dire ? Tu ne m’éclaire en rien en me disant ça Ryo.

- Mange et reposes-toi. Je te promets que bientôt tu auras tes réponses.

- Pourquoi te ferai-je confiance ?

- Parce que tu n’as pas le choix. Il n’y a que nous deux ici.

- Mais tu dois t’ennuyer ici tout seul. Être totalement coupé du monde est un peu déprimant, non ?

- Tout le monde ne voit pas la vie comme tu l’as vois Ova. Cela dit j’ai quelques fois recours à de l’aide venant de dehors.

- De dehors ? Tu veux dire via internet ?

- On peut dire ça comme ça mais n’imagine pas que tu peux en avoir l’accès.

- Je fais des efforts, maintenant à ton tour d’en faire Ryo. C'est du donnant-donnant. Dis-je agacée.

- Même si je le voulais je ne pourrais rien faire pour toi. Cette connexion n’est pas technologique, elle est psychique.

- Ne me raconte pas de bêtises tu veux? Et cette oreillette c’est  psychique aussi ?

Il me prend vraiment pour une imbécile ce mec.

- Tu communiques avec quelqu'un d'autre, mais qui ?! Dis-je fermement.

- Tu le sauras bientôt Ova. Pour le moment tu dois te reposer.

Me reposer ? Et puis quoi encore. Il me prend pour une gosse ou quoi ?

- Pour qui tu te prends ? Répliquai-je

- Je suis celui qui te feras dormir que tu le veuilles ou non.

- Mais qu’est-ce…

D’une vivacité, il se retrouva derrière moi et posa ses mains contre mes tempes. Les objets de la pièce, pendant un instant, sont en lévitation mais je n’en suis pas certaine. Ma vue me joue sans doute des tours tant ma tête tourne. Ryo que m’as-tu encore fait.