La fête sur l'île

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Les articles du magasin défilaient à toute vitesse pour Nicolas et Seb. Ils traversaient les couloirs du centre commercial, poursuivis de près par notre vigile habituel. Celui-ci ne se laissait plus berner par nos escapades et pour cause, Nicolas avait été pris en flagrant délit quelques jours plus tôt. Seul, il avait essayé de dérober plusieurs paquets de cigarettes afin de les revendre à des étudiants de notre institut.

La caissière l'avait repéré se servir abondamment et alerta la sécurité. Face à ses responsabilités, Nicolas eut ordre de dévoiler le contenu de son sac, remplis des méfaits de ce jour-là.
« Ils étaient énervés au début, mais je leur ai souri en mode beau gosse et je leur ai montré mon porte-monnaie pour qu'ils comprennent bien que j'avais les moyens d'acheter c'que je voulais. Alors ils m'ont simplement donné un avertissement oral - rien à foutre quoi - attend, c'est pas comme si j'étais Gilles ! Et puis, je prendrai bientôt ma revanche sur ce trou du cul ! » nous avait-il raconté en revenant, sans les articles volés.

Et cette revanche, c'était aujourd'hui. La raison ? Une fête, en cours de préparation sur l'île. Selon Seb, tout cela était habituel. Les francophones adoraient se retrouver plusieurs fois à cet endroit pour « s'éclater et choper des meufs », comme il le disait tout le temps.

Le manque cruel de discrétion les avait conduits à se faire poursuivre pendant de longues minutes. Lorsqu'ils arrivèrent sur une impasse, Nicolas s'arrêta. Seb, trop craintif, tenta de s'enfuir par un autre côté. Le vigile emprisonna de ses doigts une partie de son t-shirt. Calme, mais sévère, il le retourna en les fixant droit dans les yeux. C'était une erreur d'y être retourné, évidemment. Mais l'île avait ses exigences : nous ne pouvions repartir sans un nombre conséquent de bouteilles d'alcool.

Seb rejoignit Nicolas, au fond de l'impasse, et se colla contre le mur. Ensemble, ils se laissèrent fouiller avec minutie.

— Regarde ce petit con Seb... Il est si fier de nous avoir attrapé.

Seb pouffa de rire en observant le vigile. Ce dernier souris, sans comprendre de quoi ils parlaient. Les voleurs étaient neutralisés et cela démontrait l'immense compétence du service de surveillance. C'était peut-être ce que le vigile devait penser, lorsqu'il raccompagna les deux compères vers la sortie en leur interdisant de revenir.

Seul, dans les allées, je saisissais pendant ce temps, les bouteilles et les snacks nécessaires. C'était moi, le joker de la fête de ce soir. Nicolas avait prévu le comportement de l'équipe de sécurité et m'avait désigné comme voleur unique de la journée. Alors, le sac lourd, je me déplaçai vers la caisse pour y présenter un simple paquet de chewing-gum, comme je l'avais bien appris. Sans ne rien soupçonner, la caissière me sourit, probablement parce que je n'étais pas Nicolas, Seb, ou Gilles.

Au moment de quitter le couloir principal, le vigile me croisa sans prêter attention aux nombreuses bosses sur mon sac. Je le voyais rayonner, excessivement satisfait d'avoir attrapé les fauteurs de troubles. Franchissant les portes de la sortie, je traversai le parking, jusqu'au stand où l'on vendait des nouilles grasses. C'était là-bas que m'attendaient Nicolas et Seb. Ils s'avancèrent vers moi et contemplèrent mes affaires. Sans commenter quoi que ce soit, Nicolas arracha mon sac et l'entrouvrit légèrement. À la découverte de son contenu, ses lèvres se courbèrent vers le haut, reflétant une extase soudaine.

— Mec, c'est grandiose. Bravo ! Avec ça, on a de quoi tenir des heures !

Au même instant, Seb regarda par terre, sans partager l'enthousiasme de Nicolas. Le ton soucieux, il l'interpella.

— Nicolas... La dernière fois, on a...

« Tais-toi ! » rétorqua-t-il. Avant que je ne dise quoi que ce soit, Nicolas reprit la parole.

Six semaines en AllemagneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant