Chapitre 1, Nyle

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"Eh tu m'écoutes ?" demanda Lacey en claquant ses doigts devant les yeux du garçon blond qui était assis sur le banc à ses côtés.

Nyle cligna des yeux, se rendant compte qu'il s'était laissé zoner et n'écoutait absolument plus sa petite amie.

"Pardon, tu disais ?" lui demanda- t-il distraitement.

"Je disais, que cette pétasse de Charlotte a eu le culot de revenir en cours cette après midi après la misère que je lui ai mise ce midi. Elle doit vraiment être cinglée pour oser me confronter. Je veux dire, je lui ai ruiné son nouveau haut répugnant et c'est comme si elle en voulait encore. Tarée de merde" repris Lacey.

Mais de nouveau Nyle ne l'écoutait plus. Il se revoyait assis à sa table habituelle de cafétéria, entouré de ses amis de l'équipe de football et des amies de Lacey qui se racontaient des ragots en touchant à peine aux 3 grains de quinoa sur leur plateau. D'un coup, elles s'étaient toutes arrêtées de parler et c'est à ce moment précis que Nyle comprit que quelque chose allait se passer. Il leva la tête et jeta un coup d'œil à Lacey. Un large sourire était figé sur son visage maquillé. Il suivit son regard et la vit enfin : Charlotte Colton.

Charlotte Colton ne lui était pas inconnue, loin de là. Elle était non seulement le souffre douleur désigné de Lacey et sa troupe de pom-pom depuis le début du lycée, mais avait été dans les même établissements scolaires que lui depuis son premier jour d'école. Ils ne s'étaient jamais vraiment parlés mais elle lui avait toujours souri même lorsqu'il avait commencé à sortir avec Lacey, son bourreau depuis son premier jour à Eastfield. Malgré cela, Charlotte ne s'était jamais plaint une seule fois, elle ne ripostait pas, ce qui faisait pitié à beaucoup de personnes. Nyle ne savait pas vraiment quoi penser de cette fille mince d'environ 2 têtes de moins que lui. Elle était timide, utilisait ses longs cheveux bruns comme rideau pour passer inaperçue. Elle s'effaçait du monde quand Lacey ne la persécutait pas. Nyle l'enviait pour cela.

Mais à ce moment précis dans la cafétéria, quelque chose de négatif allait se produire et encore une fois, Lacey en serait la cause et Charlotte, la victime. Nyle remarqua qu'elle portait un haut qui sortait de son style de vêtements habituels. Un haut blanc bardot, assez similaire à un haut rose que Lacey possédait. Inhabituel pour elle...mais il était indéniable que ce vêtement lui allait comme un gant.

Et puis Lacey échangea de place avec Amber, une de ses amies, et se retrouva assise à l'extrémité de la table. Nyle fronça des sourcils. Lacey se tourna légèrement vers la droite et étendit gracieusement une jambe dans le passage. Charlotte qui passait exactement au même moment et ne pouvant pas voir la jambe tendu de la pompom en dessous de son plateau, trébucha. Un masque de surprise recouvrit son visage pendant un court instant avant de se métamorphoser en une expression que Nyle ne pouvait décrire. Le moment d'après, elle s'étala de tout son long sur le carrelage de la cafétéria, son plat de lasagne s'écrasant directement sur son haut blanc. Une seconde de flottement passa avant que la cafétéria entière résonne du rire moqueur de tous les élèves présents.

Lacey se leva et surplomba Charlotte qui se relevait péniblement.

"Quelle tête en l'air tu fais à tâcher un si joli haut...c'est vraiment dommage" dit elle avec un ton faussement triste.

De nouveaux rires.

"Ta gueule Lacey" lâcha une voix de l'autre côté de la cafétéria.

Elle leva un sourcil impeccablement dessiné et fixa la personne qui venait de lui parler.

Sawyer Chandler.

Si chaque établissement se devait d'avoir un badboy cliché, Sawyer Chandler était la personne qui s'en rapprochait le plus, du moins physiquement. Écarteurs, tatouages, veste en cuir... Et c'était aussi une des seules personnes sur terre capable de tenir tête à Lacey.

Il quitta sa table et vint s'accroupir auprès de Charlotte, lui offrant sa main. Il la releva et avec un regard brûlant de haine envers Lacey, toujours en lui tenant la main, l'entraîna hors de la cafétéria.

"Tu déconnectes totalement Nyle !" s'écria Lacey en lui pinçant le bras, le tirant hors de son flashback des évènements de ce midi.

"Je...suis fatigué, je vais rentrer, désolé Lacey" soupira-t-il, se levant et passant son sac de cours à son épaule.

Elle le regarda fixement.

"Tu es sûr que tout va bien ? Tu es vraiment bizarre en ce moment" dit elle.

"Oui, t'inquiètes" répondit-il en l'embrassant sur la joue avant de lui tourner le dos et de s'éloigner.

Non, tout n'allait pas bien. La façade de golden boy heureux, populaire et parfait qu'il s'était forgé depuis le primaire était lentement en train de se fissurer et peut importe ce qu'il essayait d'y faire, rien n'aidait. Nyle aurait préféré rester avec Lacey quelques heures de plus, non pas parce qu'il appréciait sa compagnie, loin de là,mais parce que ce qui l'attendait chez lui était bien pire.

Son pas était lent, traînant. Dans ses oreilles, ses écouteurs diffusaient au maximum de leur volume les rythmes posés des titres qui défilaient automatiquement sur son téléphone, la musique avalant le bruit des rues, des autres humains, du monde entier.

Mais à peine une dizaine de minutes plus tard, sa clé tourna dans la serrure de la porte d'entrée de sa maison. Elle s'ouvrit lentement lorsqu'il la poussa. Il rentra et sa clé tourna de nouveau dans la serrure, il venait de verrouiller la porte, un de ses échappatoires. Un clou qu'il enfonçait lui même dans son cercueil. Il retira ses chaussures et les porta à la main, marchant doucement pour ne faire aucun bruit. L'escalier était à 5 pas de lui.

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Son pied se posa doucement sur le parquet, c'était son dernier pas, passé ce pas il serait en sécurité.

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Craquement du parquet.

"Nyle ?" demanda une voix rauque depuis le salon.

Mais Nyle n'attendit pas d'en entendre plus.

COURS. Le mot clignotait vivement dans son esprit et c'est ce qu'il fit, il couru, monta les escaliers 2 par 2 et se jeta dans sa chambre, verrouillant la porte derrière lui.

Des pas lourds mais rapides résonnent dans les escaliers puis jusque devant sa chambre.

"T'as fermé hein ?" demanda de nouveau la voix rauque.

Nyle se tenait face à la porte, mains tremblantes et ses yeux bleus emplis de peur.

"Un jour tu rentreras et cette porte ne sera plus là pour te protéger" dit la voix.

Le garçon essaya de bouger mais son corps en alerte était figé.

"Ce jour là, tu écouteras ton père Nyle, plus d'échappatoire" rit l'homme derrière la porte avant de lentement redescendre les marches qui le séparaient du rez de chaussé.

Ses lèvres tremblèrent et quelques secondes plus tard Nyle se roula en boule sur son lit en hoquetant.






Ira (FR Version)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant