33 - The Last Wish

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DUNCAN

Le corps frêle de Charlie contre le mien me rassure sur le fait que tout va bien. Mais je sais qu'elle ne va pas bien. Ses aveux m'ont fait l'effet d'un coup de couteau en plein cœur. J'ai eu l'impression qu'elle prenait mon cœur pour jouer avec. Un coup elle me fait sourire, un coup elle me fait rire. Juste après, elle me fait pleurer, rire, et pleurer de nouveau. C'est ce qui m'a toujours plu chez elle. Elle a le don de vous mettre à l'aise et de bonne humeur en un rien de temps.

Je crois bien que je n'ai jamais été amoureux de ma vie. Mais avec elle, c'est différent, je sais que je le suis. Les sensations et les sentiments ne trompent pas. Croyez-moi, si c'était son cœur ou son poumon qui était en mauvais état, je lui aurais offert le mien. J'aurais tout fait pour la maintenir en vie au péril de la mienne. Je sais ce que vous vous dites. Que je suis un pauvre gars éperdument amoureux d'une fille qu'il a rencontrée il y a un mois de cela. Et je vous répondrais que vous avez raison. Mais qu'est-ce que ça fait ?

L'amour peut prendre du temps à venir, comme il peut être foudroyant. Il peut être compliqué comme il peut être facile. Avec Charlie, tout est à la fois si facile et compliqué. Elle est simple et de ce fait, on s'amuse bien ensemble. Mais sa vie est tellement compliquée. Sa maladie aussi. J'aimerais plus que tout retourner au jour où elle m'annonçait dans sa chambre qu'elle était malade. Je ne l'ai pas crue. Dans mes rêves, elle se met à rire et m'annonce qu'elle rigole. Seulement voilà, ce n'est qu'un rêve.

Disons que ce que je vis avec Charlie aussi ressemble à un rêve. Mais je dirais plutôt que c'est un rêve qui est proche de virer au cauchemar. Mais j'ai décidé de tout ça. Quand elle m'a mis en garde en me prévenant qu'elle était malade, elle m'avait prévenu qu'elle était condamnée et que ça ne servait à rien de l'aimer. Mais c'était trop tard, je l'aimais déjà.

Je suis heureux d'avoir fait cette liste. Je suis heureux d'avoir fait tout ça pour elle, mais aussi pour moi. Je ne sais pas vraiment de quoi ma vie sera faite après ça, je ne sais pas combien de temps je prendrai à m'en remettre ou même si je m'en remettrai. Je ne sais rien de ce qu'il adviendra. Mon cœur est presque déjà en miette, je n'imagine pas dans quel état il sera. Mais j'ai décidé de tout ça, je dois en assumer les conséquences et je savais pertinemment que je ne m'en sortirai pas indemne.

Alors je profite de l'instant, je profite d'elle tant qu'elle est là. Elle ne dit rien, parce qu'elle est trop fière et qu'elle veut me préserver, mais je sens que quelque chose ne va pas. Je sens que ses muscles se contractent un peu trop, je sens son dos trembler et je sais qu'elle ne pleure pas que parce qu'elle est triste. Charlie va mal, mais ça devait arriver.

Je repense à cette fois où elle m'a demandé de ne pas l'emmener à l'hôpital à sa prochaine crise. J'ai trouvé sa demande horrible et égoïste. Il était hors de question que je la regarde souffrir, c'est impossible pour moi. Mais elle m'a fait comprendre qu'elle ne voulait pas qu'on décide pour elle quand il était temps de partir. Elle doit partir, qu'on le veuille ou non. J'ai compris que je devais accepter sa décision. Je sais que se battre lui fait mal, je sais que ce monstre qui est en elle lui fait du mal et je ne peux rien faire pour la défendre. Quel petit-ami minable je fais !

Un spasme lui parcourt le corps, je le sens, mais elle ne dit rien et moi non plus. Je la serre juste plus fort et nous continuons de danser doucement, comme si cet instant devait être éternel et ne jamais s'arrêter. Un deuxième spasme, elle gémit de douleur. Je caresse ses cheveux.

— Chut, je suis là, murmuré-je.

Je pleure. Je pleure parce que je sais ce qui est en train d'arriver. Je sais que cette fois elle ne s'en remettra pas, que j'appelle les urgences ou non. Cette fois, c'est celle de trop. Je sens son cœur battre contre mon torse et ça me réconforte, ça me rappelle qu'elle est encore en vie. Parfois, je me suis demandé pourquoi je tenais tant à faire tout ça. La réponse est simple : parce que je l'aime. Alors je reste près d'elle, j'ai l'air complètement maso, mon cœur se tord dans tous les sens, j'ai mal au ventre et ma tête tourne. J'ai peur. Je ne veux pas qu'elle parte.

Elle tremble et gémit de plus en plus de douleur, je suis totalement impuissant face à ça, tout ce que je peux faire, c'est la protéger de mes bras et la calmer. Je lui caresse les cheveux, le dos, je lui apporte autant de tendresse que je peux pour contrer le mal qui la ronge. Mais d'un coup, elle ne bouge plus et son corps a l'air de peser plus lourd. En fait, elle se serait écroulée à terre si je ne la tenais pas.

— Charlie ?

Elle ne répond pas et son corps est toujours aussi lâche. Je la pose délicatement à terre et pose une main sur sa joue.

— Charlie, est-ce que tu m'entends ?

Elle ne répond pas. En fait, elle semble dormir. Elle a l'air paisible. J'aimerais m'allonger à côté d'elle et la regarder dormir, puis m'endormir à mon tour. Mais je sais que contrairement à moi, elle ne se réveillera pas. Je suis aveuglé par mes larmes qui semblent couler par litres, j'ai l'impression qu'elles ne pourront jamais s'arrêter de couler. Je ressens un mélange d'émotions, elles m'assaillent, toutes en même temps. De la peine, du chagrin, de la douleur.

— Charlie, je suis là, d'accord ?

Je pose ma main au niveau de son cœur et je ne le sens pas battre. Alors je prends son pouls sur son cou, je ne sens toujours rien. Je hurle. Peu importe qu'on m'entende, peu importe que ça ne la ramène pas. La rage prend le dessus et je ne peux m'empêcher d'hurler. Je hurle et je pleure. Je ne pensais pas que ce serait si douloureux, je ne pensais pas que ça me ferait l'effet d'un déchiquètement de tous mes organes en même temps. Je ne savais pas que ma tête, mon cœur, mes poumons allaient me faire souffrir en même temps. Je savais juste que je l'aimais.

Je pose sa tête sur mes genoux et caresse son visage, ses cheveux. Mes larmes tombent sur son magnifique visage qui a l'air si paisible. Elle ne se réveillera pas et il semblerait que je sois pris au piège dans un cauchemar.

— Je t'aime Charlie, tu sais ça hein ?

Je la serre dans mes bras et pleure. Ce soir était la dernière fois que je la voyais sourire. J'entends encore le son de sa voix dans ma tête, la mélodie de son rire. Je devrai garder ce souvenir intact parce que c'était également la dernière fois. C'est la dernière fois qu'elle entendra que je l'aime. Je ne viendrai plus chez elle pour lui faire une surprise, je ne la taquinerai plus sur le bordel de sa chambre. Je ne l'embrasserai plus.

J'espère que maintenant elle est en paix, j'espère qu'elle ne souffre plus. J'espère au plus profond de moi qu'elle sait que je l'aime et que je l'aimerai toujours.    

Média — It's OK, Tom Rosenthal

Publié le 28/02/18

MY LAST WISHOù les histoires vivent. Découvrez maintenant