J'étais assis sur un de ces fauteuils inoccupés, perdu dans mes pensées. La musique résonnait autour de moi et je contemplais au loin les silhouettes bouger sans vraiment prêter attention à l'ambiance qui régnait. Je n'étais déjà plus ici. Mon âme vagabondait dans un autre monde que celui que la vie m'offrait.Je n'avais jamais eu à me plaindre de la façon dont je menais mon existence, je revendiquais la chance que j'avais. Tout me réussissait depuis toujours, je ne devais pas avoir une, mais plusieurs bonnes étoiles à mes cotés. Je n'avais jamais connu la difficulté au sens propre du terme.
A 28 ans, je m'épanouissais dans un métier que j'adorais : Responsable dans un magasin de sport.
En parallèle, je faisais les événements pour cette boîte de nuit située à 800 mètres de chez moi, dans laquelle je me rendais tous les week-end depuis des années désormais.Je passais la majeure partie de ma vie à sortir, à fréquenter toutes sortes de filles toutes plus jolies les unes que les autres, je vivais sous une adrénaline constante. Je n'étais pas fait-je ne l'avais jamais été d'ailleurs- pour vivre cette fameuse routine, ce cercle vicieux, cette perte de passion et cette monotonie que je ne supporterais jamais.
Je me demandais toujours comment l'être humain pouvait se refuser de profiter des instants simples de la vie. Profiter, échanger, oublier le temps d'un instant d'être raisonnable.
J'aimais cette idéologie que je me faisais du vrai sens de la liberté, je faisais tout pour vivre chaque moment pleinement et ne jamais vivre sous un seul regret.
Pourtant, j'étais seul, entouré, mais seul. Je passais d'une conquête à une autre lorsque l'envie me prenait. J'étais regardé, admiré et parfois aimé, mais aucune d'elle ne me faisait vraiment vibrer.
J'étais de ceux qui vivaient de musiques, de dessins, de passions, de solitude finalement. Une vie d'artiste comme j'aimais tant à le dire.
Ma vie était rythmée par des reportages principalement basés sur le sexe, par des conquêtes sans lendemain. Une fille, ou deux... ou plusieurs... au même instant et au même endroit. Ce n'était pas l'acte en lui même qui me donnais des frissons, ce sont les circonstances, le scénario. Certaines d'entre elles prenaient parfois le temps de marquer leur prénom au rouge à lèvres sur mes fenêtres ou mes miroirs dans mon petit appartement en plein centre. Un 40 m2 que la moitié de la ville connaissait.
Le plus souvent, je ne demandais rien. Je n'en ai jamais vraiment eu besoin. Je leur offrais ce qu'elles voulaient, du moins, ce que j'acceptais de donner, c'est à dire une « simple baise », pas d'instant tendre, pas de mots doux, ni de petits bisous. La plupart du temps je priais pour qu'elles ne restent pas dormir chez moi, qu'elles repartent et ne s'attachent pas. Je ne suis ni plus ni moins qu'un consommateur capable de briser des cœurs malgré le respect que je pouvais leur donner.
Une fois de plus, en regardant une de ces jeunes femmes gesticuler devant moi, le regard salace, je me demandais à cet instant, ce que je désirais réellement. Je fermais les yeux et m'autorisais une seconde à m'imaginer dans mon salon au calme, sous la lumière tamisée d'une bougie, faire danser mes doigts sur mon piano dans l'attente peut-être, d'endormir celle qui aurait réussi à me faire perdre pieds un jour.
J'aurais pu passer des heures à dessiner chaque détail de son visage, bercé par une de ces mélodies douces et mélancoliques.Je m'imaginais au cotés d'une femme capable d'accepter et de comprendre mon passé, d'en sourire et peut-être même d'en rire.
Pourtant au fond, je savais que cette image presque trop parfaite n'était qu'un magnifique tissu de mensonges. Quelle femme normalement constituée et formatée pourrait tolérer tout ce que j'avais fait ?J'étais conscient d'avoir l'envie et le besoin de trouver cette âme parfaitement instable, intemporelle, pouvant comprendre l'esprit détraqué et fragile que j'avais, car au fond, je savais qu'elle existait.