Promesse morte

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C'est la troisième fois que je répète l'opération : je verse, j'appuie puis je serre les dents. C'est la troisième fois en deux minutes, mais il continue de couler le long de ma jambe, laissant une trace sinueuse et pourpre sur ma peau écailleuse, il se fraye un chemin jusqu'aux dessous de mes cuisses et s'accumule doucement, les molécules s'organisent, s'assemblent et fusionnent pour former une structure parfaite semblable à une perle.

Là , alors, d'autres gouttes dessinent paisiblement leur chemin, formant une multitude de perles prêtes à s'échapper du bloc de glace que formait ma jambe. C'est à travers ce liquide pourpre que s'échappe le peu de chaleur que contenait encore mon être. C'est à travers ces ouvertures profondes ,qui, du derme à l'épiderme forment de multiples failles rocailleuses, que jaillit l'essence de mon corps, la chaleur de mon être.

Alors j'arrête, je retire la compresse imprégnée du mélange d'alcool et de sang. Ce dernier reprends alors de plus belle, et je l'observe, dubitatif, je ne sais plus quoi penser, toute ma raison et toute ma sensibilité semblent s'échapper par ces fissures dans ma peau.
J'ai froid, je ne sais plus ce qu'il se passe, j'observe alors la lame qui était soigneusement rangée dans son tiroir.

Quelle ironie, toute ma rage, tout mon dégoût, toute ma culpabilité s'étaient évaporées à travers le flux pourpre et incessant que j'avais provoqué en un instant avec ce bout de métal. Pourtant celui-ci brillait encore de milles feux, l'action avait été violente mais suffisamment rapide pour que celui-ci en reste indemne.

J'y vois alors le reflet de mes yeux où perlent encore quelques larmes de rage. Dans cette image me suis-je alors perdu, observant le reflet aliéné de ma personne, le visage tremblant, la mâchoire serré, les veines sorties faisant des soubresauts sous mon œil.
J'y aperçoit alors son ombre, elle était là aussi, elle m'appelle , elle me parle, muette, avec ses yeux, les miens avaient disparus et le reflet des siens y brillent désormais, c'est mon reflet et c'est le sien, je ne peux me résoudre à l'affronter, son regard, car c'est dans celui-ci que je voyais la vérité: j'ai échoué, j'étais redevenu ce que j'avais détruit et elle le devenait aussi... Mon corps ne tremble plus, je n'ai plus froid, je n'ai plus mal, je ne ressens plus.

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