Chapitre 7: Sans pouvoir dire un mot

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Le groupe marchait dans l'avenue, arrivant enfin dans le quartier de Feliciano. C'était l'un des quartiers les plus calmes de la ville, le manque d'infrastructures contraignant ces habitants à travailler ou se divertir dans d'autres coins de la cité, faisant que les rues étaient quasiment désertes. Le lieu n'en restait pas moins charmant, les vieilles maisons qui y demeuraient ayant un je ne sais quoi d'agréable et de calme, et avait de plus le grand avantage d'être assez proche de l'Académie à seulement 15 minutes à pied. Cela n'empêchait cependant pas Feliciano de supplier Ludwig de le ramener chaque soir après les cours, l'italien ayant beaucoup trop peur de rentrer tout seul car abandonné presque chaque fois par son frère.
"- Nous y sommes presque ~ Plus que quelques rues ! Rassura le garçon aux cheveux caramels, sautillant presque.
À l'écoute de cette nouvelle, Alfred et Kiku furent soulagés, l'un de finalement pouvoir réaliser ce qu'il avait à faire et l'autre de pouvoir récupérer le fameux objet de ses tracas.
Le téléphone de Ludwig se mit à sonner, le blond regardant son portable.
- C'est pas vrai... Quand est-ce que Bruder apprendra que ce n'est pas moi qui vais indéfiniment lui préparer le repas?!
- Ahahah! Gilbert ne sait toujours rien faire tout seul? S'amusa Alfred.
- Nein. Il sait faire mais apparemment il se sent trop " génialissime" pour s'en occuper. La prochaine fois il se débrouillera sans moi."
Les trois autres rirent à leur manière de la bêtise de l'albinos. Ils avaient beau être frère, Ludwig et Gilbert étaient comme le jour et la nuit. Si le grand blond faisait preuve de rigueur, de discipline et de sévérité, l'autre préférait de loin être décontracté, irrespectueux et vulgaire au grand désespoir de son jeune cadet qui avait honte de savoir son aîné en même année que lui. L'allemand ne pouvait néanmoins pas y faire grand chose, aimant tout de même cet idiot qui lui servait de frère.
En quelques discussions, les étudiants arrivèrent enfin devant la maison des Vargas, une maison de briques rouges et au toit noir dont la boîte aux lettres présentaient un petit drapeau de l'Italie, en hommage à leur patrie d'origine. Il fallait dire que leur grand-père adorait raconter à quel point le pays était magnifique et prodigieux, devenant le plus grand patriote non américain du quartier.
"- Et voilà ! Vee ~
Feliciano pointa du doigt la maison en face tout en s'adressant à Alfred.
- C'est juste ici si ma mémoire est bonne ~ La maison avec le joli lierre tu vois ?
L'Americain se tourna vers l'endroit désigné, observant la demeure de celui qu'il cherchait à connaître. La couleur blanche légèrement ternie par le temps et le toit noir délavé renforçait l'idée d'une habitation négligée par l'ancien propriétaire, ajoutés à la plante grimpante qui escaladait jusqu'aux fenêtres. Cependant, derrière la grille noire qui bordait le terrain, des pousses commençaient à germer et des végétaux commençaient à s'épanouir doucement, donnant, malgré l'ensemble, un certain aspect entretenu.
- Auras-tu besoin de nous? Demanda Ludwig à l'étudiant américain.
- Je ne pense pas, sourit Alfred. Vous pouvez aller chez Feliciano, je vous rejoindrai plus tard.
Les trois acquiescèrent alors, les deux plus calmes se faisant tirer par le plus énergique vers la grande maison. Il ne restait qu'Alfred, qui se tenait au milieu de la rue, immobile. Il était horriblement stressé d'aller jusqu'à chez Arthur et de lui parler au point d'en être paralysé. Il secoua cependant la tête.
Enfin Alfred tu es un héros, ressaisis toi!
Alfred trouva le courage de marcher jusqu'au seuil de la porte de la famille Kirkland, sonnant. Il entendit un bruit d'escalier, puis des pas vers la dite porte avant que celle-ci ne s'ouvre sur un grand homme roux aux sourcils tout aussi impressionnants que ceux de l'anglais. Ce qui interpela l'Américain, ce furent les yeux de l'homme semblable à son Arthur, bien qu'ils soient légèrement plus sombres. Il devait avoir dans la vingtaine et avait une cigarette aux lèvres, cela devait être son frère.
- Qu'est-ce j'peux faire pour toi? Demanda le roux d'un fort accent écossais.
- B-bonjour, tenta d'articuler le blond, non sans se sentir mal à l'aise. J'aimerai parler à Arthur...
L'homme leva un sourcil tout en croisant les bras, intrigué par l'étudiant en face de lui.
- T'es un d'ses amis?
- Oui...
- T'fais quoi ici?
La méfiance régnait, le grand frère observant le lycéen d'un air mauvais. Alfred sentit un frisson parcourir son échine. Décidément, il n'allait pas l'aimer celui-là.
- Je suis venu présenter mes excuses... Avoua le blond.
À ces mots, le frère à l'accent écossais fronça ses imposants sourcils.
Aïe.
- J'comprend mieux... C'est toi...
Alfred n'eût pas le temps de rétorquer qu'il reçu une vague de mépris, la voix de l'Écossais devenant plus froide.
- C'toi qu'a fait du mal à Arthie ?
- M-moi? Non je-
- C'toi qui t'moque d'lui?
- Pas du tout! Se défendit le héros. Je suis venu m'excuser pour le comportement de mon ami pas du mien!
Le plus âgé ne semblait pas croire un mot de ce que débitait le blond. Il avait brisé son dernier espoir en parlant d'excuses directement. A tout les coups Arthur avait expliqué la raison d'une arrivée chez lui en début d'après-midi. C'était normal de s'énerver également contre celui qui avait fait cela, Alfred aurait fait la même chose si son frère était embêté.
Mais là il n'était pas coupable. Ce n'était pas juste.
- Si t'as rien d'autres à faire, va-t-en. J'ai pas envie d'te voir camper dans not' jardin.
- Je... Je ne peux pas. Répondit Alfred après avoir cherché ses mots.
- Et pourquoi ça ? Défia le roux d'un air sarcastique. T'as envie d'embêter à nouveau mon frère ?
- Non je lui dois des excuses en bonne et dû forme! Et ce n'est pas vous qui allez m'en empêcher !
- Essaie pour voir.
L'Américain sentait la frustration bouillir en lui. C'était rageant d'être aussi près du but et de se faire bloquer par un idiot qui ne voulait rien entendre. Il en serait sûrement venu aux mains s'il n'avait pas repensé à ses propres principes.
Un héros ne se bat pas pour quelques chose d'inutile... Un héros ne se bat pas pour un truc aussi bénin...
Ses muscles restaient tendues par l'énervement, mais il arrivait néanmoins à contrôler ce qui le parcourrait.
L'autre restait confiant, un sourire provocateur aux lèvres tandis qu'il prit une bouffée de sa cigarette. Bouffée qui fut soufflé sur le visage de l'adolescent, fumée toxique qui véhiculait tout les intentions de l'Écossais en face de lui.
Alfred n'avait malheureusement pas le choix, il ne pouvait pas finir sa soirée au commissariat du coin pour avoir frapper quelqu'un. Cela lui faisait mal de lâcher l'affaire à quelques mètres seulement de son objectif, mais avait-il le choix? Il n'arriverait à rien en forçant les choses.
Il fit une moue fâchée, et partit sans demander quoi que ce soit d'autre, laissant l'homme refermer la porte tout en achevant d'un ton froid.
- C'est ça, lâche l'affaire... Ça vaut mieux pour toi."
Dépité, l'adolescent se tourna une dernier fois vers la maison au lierre, observant d'un air abattu la longue colonne de verdure qui achevait sa course à la fenêtre du premier étage.
Ce fut à ce moment précis qu'il distingua par cette ouverture une ombre à moitié cachée par le rideau, faiblement éclairée sous le coucher de soleil par une lampe à l'intérieur. La forme ne semblait pas très âgée. La simple silhouette lui permis même de comprendre qui l'observait en silence derrière la vitre.
Arthur. Il regardait depuis le début. Et leur regard se croisèrent à nouveau, celui qui faisait tout pour être discret comprenant bien vite qu'il ne l'était plus, tirant le rideau pour définitivement masquer sa présence.
Alfred demeura un moment à fixer la fenêtre pour guetter la moindre apparition, jusqu'à être interrompu par la forte main du président du club de journalisme.
"- Alors? Tu as réussi à le voir?
L'Américain sursauta, se retournant brutalement pour voir ses 3 amis, et au loin sur le seuil d'en face Lovino qui boudait et Antonio qui faisait de grands gestes pour le saluer.
- Vous avez fini?
- Oui, confirma le japonais, un cahier fermement maintenu et caché contre sa poitrine.
- Si ~ Acquiesça Feliciano de son ton joyeux. Je voulais qu'ils restent plus longtemps mais dès que Kiku a récupéré son cahier il a voulu partir...
- Excuse-moi Feliciano-kun... C'est simplement que je veux vite remettre à sa place ce précieux document pour mon prochain exposé...
- Oh tu fais un exposé sur les pays du monde? C'est marrant j'aime beaucoup ton personnage principal ~
Le japonais secoua la tête, embarrassé.
- J'avais raison... Tu en as trop vu
... Je t'avais pourtant dit de ne pas le lire...
- Maiiiis! Ça avait l'air beaucoup trop génial ! Et puis il y avait cette romance entre le-
- Stop. S'il-te-plaît arrêtons là.
L'italien fut attristé de ne pas pouvoir parler de cette histoire que le brun tentait de cacher aux autres.
- Sinon Alfred, soupira l'allemand qui commençait à en avoir assez, tu as réussi oui ou non?
- Eh.... Pas du tout... Rit le blond pour couvrir sa honte. Je me suis fait remballer par son frère probablement.
- Son frère? S'intrigua Kiku.
- Ouais... Il m'a repoussé et m'a accusé de tout ce qu'a fait Gilbert. Je suis parti avant de perdre mon sang froid.
Ludwig soupira encore, cette fois-ci de l'idiotie de son frère et de la punition qu'il allait subir.
Ce fut le moment choisi pour les deux plus éloignés de se rapprocher, Lovino particulièrement irrité.
- Putain! Vous avez fini de camper devant chez nous les cons? Il y en a qui veulent manger merde!
- Mais fratello... S'indigna l'autre italien. C'est important !
Le plus vieux des deux jeta un rapide regard sur la maison en face, avant de continuer.
- C'est sur le voisin chelou? Ils sont putain de bizarre pas vrai la tronche de tomate?
- C'est vrai que l'homme qui vit là-bas n'a pas l'air très sociable...
- Un homme roux ? Demanda Alfred, sûr de penser à la même personne.
- Nan teubé! C'est un connard avec des cheveux marrons, des putains d'yeux de morts vivants et des sourcils de deux mètres de larges! Et puis y'a eu les autres qui sont venus habités ici après... Tsh j'étais persuadé que personne serait assez con pour sortir avec un batard pareil...
- Fratello! Ça ne se fait pas d'insulter les gens même s'ils font peurs! Et puis ceux qui ont emménagés avec lui ont l'air plus gentils, ils m'ont même dit bonjour une fois!
- Il y a un mec louche là-bas? Balbutia Alfred, assez étonné.
Arthur vivait avec quelqu'un d'étrange ? Plus étrange que celui qu'il avait rencontré ? Décidément c'était une famille haute en couleur.
- C'est pas ton problème tu t'es fait jeter comme une vieille merde, répondit sèchement Lovino. Allez cassez-vous j'ai la putain de dalle.
Il prit son frère par le bras et le traîna jusqu'à chez eux, l'autre geignant de vouloir dire au revoir à Ludwig. L'allemand soupira une énième fois.
- Bon... Tu retenteras demain je suppose.
- Oui... S'amusa doucement Alfred. Il finira bien par venir...
- ¡ Claro ! Affirma d'un sourire Antonio, abandonné par son petit italien. Il faut positiver Alfred ~"
Le petit groupe se décida à partir, l'Américain laissant malgré lui sa tâche héroïque de côté.

- - -

Arthur se tenait affalé sur son lit, caressant son chat pour faire passer le temps. Il avait encore honte des regards braqués sur lui, même s'il faisait toujours semblant de ne pas être affecté. Encore une année qui s'annonçait radieuse. Génial.
Il n'avait pas envie de rester dans cette ville pourrie, il voulait retourner dans son vrai chez lui. Loin de son père. Loin de ces gens. Au moins là-bas il y avait sa grande maison, les roses qu'il avait planté, un hobby bien à lui qui faisait oublier les cours. Et il avait sa mère surtout. Elle lui manquait terriblement.
Une larme roula sur sa joue, tandis qu'il se redressa sur le matelas pour prendre le félin sur ses genoux. Allister s'était étonné de son arrivée malgré les cours, et il fut contraint d'expliquer ce moment gênant, ce qui mit le plus vieux dans un état de rage. Il n'aimait pas le dire à ses frères, mais Allister était celui à qui il arrivait à se confier le plus facilement malgré le caractère plutôt susceptible du blond. Ils avaient longuement discuté durant l'après-midi sur cet évènement, jusqu'à ce quelqu'un sonne à la porte. A présent il attendait depuis quelques minutes, s'occupant de l'animal en mal d'affection.
Soudain, il entendit la voix de son frère se hausser légèrement en bas, ce qui surpris quelque peu l'anglais. Celui-ci décida de se mettre à la fenêtre pour observer ce qu'il se passait sans se faire repérer, Oliver toujours dans ses bras. Là, il fut d'autant plus étonné que l'interlocuteur de son aîné soit Alfred, à qui il n'avait jamais donné d'informations personnelles. Curieux, il tenta de comprendre du regard l'échange houleux qui était en défaveur de celui qu'il avait rencontré.
Pourquoi était-il ici?
La scène semblait s'envenimer, Alfred paraissant se retenir de toutes ses forces face à un Allister confiant qui maintenait une stature supérieure à l'autre. Il le dominait largement, et cela ne saurait tarder avant qu'Alfred ne parte. Pourtant, Arthur s'interrogeait sur sa venue plus que surprenante. Cela ne pouvait être pour se moquer, une personne seule ne pouvant décemment pas se dresser devant la maison d'un autre sans avoir de sérieux ennuies. Peut être était-il plus honnête que le blond ne le pensait? Il n'avait vraiment pas l'air d'être du type à violenter les gens, l'anglais avait entrevu son regard triste avant de s'enfuir. Il ne pouvait juste pas y croire, comme s'il refusait d'admettre une vérité plus embarrassante. Néanmoins le contraire se déroulait sous ses yeux. Sa présence était la preuve qu'il y avait sûrement une once de gentillesse en lui.
La dispute se finit rapidement, l'Américain se rétractant pour laisser Allister seul, celui-ci fermant la porte. Arthur se colla d'avantage à la vitre pour apercevoir Alfred qui s'éloignait, visiblement dépité. Le britannique eut un moment de compassion, se sentant mal à l'aise de n'avoir rien fait durant cette altercation. Il se crut un instant coupable, et songeait même à envoyer un message au garçon si désemparé, voir même accourir jusqu'à lui.
Quoi?! Mais pas du tout Arthur tu délires !
Il lui avait fait du mal. Par sa faute, volontaire ou non, il venait sûrement de se faire ficher par un bons nombres d'élèves. Et qui sait ce qui se passera ensuite.
Cependant, nier ne signifiait plus rien, se rendant également compte de son attitude stupide. Il n'avait même pas tenter de clarifier la situation, il avait tout mis dans un même panier. Pour quelqu'un qui se considérait plus mature que la moyenne, c'était plus qu'impardonnable. Arthur devait comprendre, pas accuser. Il aurait fait honte à tous les policiers qu'il avait lu s'il ne faisait pas cela au minimum. Et peut être que le fond de sa pensée avait raison, il était innocent dans l'histoire.
En plein dans sa réflexion, le blond ne remarqua en aucun cas qu'Alfred c'était tourné pour observer et l'avait remarqué. Il eut besoin d'un certain temps pour se tirer de sa pensée avant de voir les deux yeux saphirs qui le fixaient, étonnés. De honte, Arthur se cacha rapidement derrière les rideaux, sont coeur s'accélérant de manière anormale. Il avait eu l'impression d'être pris sur le fait... Pourtant il n'avait rien à se reprocher.
Alors, pourquoi son cœur battait la chamade? Pourquoi ses joues étaient-elles en feu?
Il tenta de se calmer, songeant au devoirs qui l'attendaient.
Faisant abstraction de ce sentiment, qu'il ne voulait pas accepter, ayant trop peur de comprendre sa signification évidente.

Désolée pour l'attente! Beaucoup trop de travails à faire et j'ai du mettre de côté l'écriture (mais le problème est réglé ^^). J'espère en tout cas que ce chapitre vous a plu et rendez-vous au prochain!

Rainy DayOù les histoires vivent. Découvrez maintenant