"- Oh non, il me semble que c'est notre dernière séance aujourd'hui!
- Bonjour à vous aussi mademoiselle.
- Oups, aha. Excusez-moi, bonjour.
- Installez-vous, ne perdons pas de temps dans ce cas.
- Alors... Ah oui, l'été de passage à la troisième! Après la soirée, nous ne nous sommes pas parlées des vacances, comme si nous n'avait jamais existé. Je me suis surprise à ne pas y penser plus que ça, à ne pas ressentir le besoin d'aller vers elle, à ne pas me sentir mal de n'avoir aucun contact avec elle. Comment dire... J'avais comme un poids en moins sur les épaules, je ne me souciais plus de cette relation qui ne menait de toute façon à rien.
Une semaine avant la rentrée des classes, j'ai reçu un message de sa part. Mon cour avait raté un battement. Je savais déjà ce qu'elle allait me dire. Le message était le fameux 'faut qu'on parle'. J'ai relu toute la discussion avant de venir, histoire de ne pas m'embrouiller ou modifier les évènements en ma faveur. Son message était plutôt violent, me disant que je ne l'avais pas respectée, ce qui n'est pas complètement faux, mais je ne m'en suis rendue compte que plus tard. Elle me disait aussi qu'elle ne savait pas comment elle avait pu se contenir si longtemps, pour ne rien me balancer dans la gueule surtout, avec tout ce qu'elle avait à dire. J'avoue que le petit 'pour qui tu te prends' a fait mal. Ce qui me fait rire, c'est qu'elle a ponctué ce message avec un 'je serai toujours là pour toi, je t'aime'. Je me suis écrasée face à elle encore une fois, après tout, j'étais en tort. Mais j'aurais aussi pu lui dire ma façon de penser et lui répondre avec le même ton qu'elle avait employé avec moi. Hors je ne l'ai pas fait, j'ai été douce, lui faisant gentiment comprendre que si elle voulait partir, et bien qu'elle parte. Car comme promis, je ne la retiendrai pas.- C'est donc comme ça que tout s'est arreté entre vous.
- Disons plutôt que c'est comme ça que nous avons cessé d'être meilleures amies. En soit, nous nous parlons toujours, comme si rien n'était jamais arrivé. Je veux dire comme si nous n'avions jamais été meilleures amies. C'est fou comment on dirait que pour elle, toute cette situation est normale, elle a l'air d'être passée à autre chose si rapidement, presque instantanément. Alors que moi, même un an et demi plus tard, j'ai toujours cette boule au ventre quand je dois lui parler. C'est léger, mais présent.
- Maintenant, quand vous regardez en arrière, que pensez-vous de son comportement? Et du vôtre?
- Je pense que nous étions des gamines, et que nous ne nous rendions pas compte de l'impact de nos actes ou de nos paroles sur l'autre. Elle avait un pouvoir, une emprise sur moi qu'elle ne soupçonnait pas et que je n'osais pas m'avouer.
- Ce ne sont pas les personnes mais les amitiés qui peuvent être toxiques. C'est exactement ce qu'il s'est passé dans votre cas.
- Vous avez raison. C'est surement pour ça que je ne peux pas me résoudre à lui en vouloir après toute cette souffrance que j'ai vécu. Je pense qu'à cette fameuse soirée, j'ai juste évacué la frustration que je retenais depuis toutes ces années. Je me suis montrée pour la première fois après tout ce temps passé dans son ombre. Je vivais à travers elle au lieu de vivre par moi même. Et quand cette amitié s'est terminée, j'étais enfin libre d'être moi. Ma personnalité s'est affirmée, je n'avais plus peur de me dévoiler. J'allais enfin vers les autres, et ils me parlaient parce qu'il voulait discuter avec moi, et non pour parler d'elle, non pour l'atteindre, mais vraiment pour ma personne. Les gens venaient d'eux même pour moi et moi seule. Je me suis enfin sentie importante,je me suis enfin sentie comme une vraie personne. J'étais libre... Je suis libre.
- Etes-vous heureuse?
- Oui, je suis heureuse. Je suis entourée de personne qui me pousse vers l'avant, qui m'encourage, qui ne me juge pas et me comprennent. Je peux m'exprimer franchement avec eux, même les insulter, ils ne le prennent pas mal et font de même, sans jamais que personne ne soit offensé. Aucune hypocrisie, que de la sincérité; aussi bien dans les insultes que dans nos sentiments. Je ne suis plus enfermée à une place prédéfinie, je suis acceptée et aimée comme je suis. Et je pense, en tout cas j'espère, que je le rends bien.
- Dans ce cas, mon rôle s'arrête là. Vous êtes heureuse, libérée, et vous allez de l'avant.
- Merci de m'avoir écoutée Docteur.
- De rien, c'est tout naturel. Je suis ravi d'avoir pu vous aider.
Au revoir"
Nous sommes toutes, à des degrés divers, nacissiques, dépendantes ou passives-agressives.

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You are toxic
Fiksyen RemajaJe la connaissais depuis si longtemps, elle était devenue une partie de moi. Cependant notre organisme n'accepte pas les corps étrangers, alors la garder me faisait aussi mal que l'enlever. Finalement je n'ai pas eu le choix, cette toxine est partie...