Battement d'elle 2

Où ?

Un moment, ils se jaugèrent. Puis, ils tombèrent dans les bras les uns des autres.

_ On ne pouvait que être là. Tu nous as dit, hier, à notre arrivée, que tu venais. Sur le coup, on a plutôt été surpris, expliqua Xavier en lui tendant la main et en la gardant dans la sienne.

_ Mais on a réfléchi et on ne voulait pas être ailleurs. On veut t'aider à retrouver Katy, dit Daniel en posant sa main sur son épaule.

_ Si on avait su, on aurait préparé notre voyage en amont, continua Xavier. Aucun de nous ne trouvait le sommeil et mon père a réservé nos billets un peu sur un coup de tête, pendant la nuit.

_ On s'est juste mis d'accord sur qui partirait et on a pris le premier vol pour Porto, ce matin, continua Daniel. Et nous voilà.

_ Merci, dit Romain. Merci d'être venu pour elle.

_ On est là aussi pour toi, dit Daniel. T'es notre pote, mec.

_ Va falloir les séparer, dit Thomas en montrant Maya qui pleuraient avec Brooke et Bareth.

_ Je m'en occupe, dit Xavier. Eh les gourdasses !

Les trois filles se retournèrent vers lui, les yeux rougis par les pleurs. Maya se jeta dans les bras de Thomas, qui lui caressa les cheveux, en lui parlant doucement. Brooke regarda Xavier en passant devant lui. Elle lui tourna le dos, en même temps que Bareth. Elles se dirigèrent toutes les deux vers Romain pour le prendre dans leurs bras.

Romain se tourna vers le coffre de la voiture de location, où ils avaient entassé les valises, ce matin, en quittant l'hôtel. Une boule commençait à monter du fond de sa gorge, depuis quelques minutes. Il était touché par la venue des amis de Katy, il se sentait soutenu. Ils étaient tous réunis, sur ce petit chemin de terre et pourtant, il se sentait seul. Quand chacun d'entre eux rentrerait dans leur appartement, à Paris ou à New-York, aucun d'eux ne serait vraiment seul, face à lui-même. Les couples d'amoureux se retrouveraient en tête-à-tête. Et lui  ? Lui retrouverait un appartement désespérément vide. Vide d'elle. Vide de la seule personne avec qui il voulait vivre désormais. Vide de celle qui avait prévu de lui demander de partager son quotidien. Il s'accrocha à cette idée. A cette idée qui lui avait paru folle lorsqu'il avait découvert l'appartement pour la première fois. À ce secret qu'elle lui avait caché quelques mois, le temps de tout aménager et décorer. À cette question qu'elle n'avait pas eut le temps de lui poser lorsqu'ils devaient se retrouver et fêter la Saint-Valentin.

Il ouvrit son sac à dos, un des cadeaux de Noël de Katy, et sortit une rose qu'il avait achetée à Paris, avant de monter dans le taxi qui l'avait amené à l'aéroport d'Orly. Il avait préparé un mot, la veille dans sa chambre d'hôtel, sur son petit carnet de notes, qu'il amenait lors de tous ses voyages. Un mot qui demandait à quiconque savait ce qu'il s'était passé dans la nuit, de vendredi à samedi, de le contacter. Il avait écrit le message en plusieurs langues, sans doute par habitude. Il glissa le morceau de papier, sous le film transparent, qui tomba doucement vers la tige. Personne ne lui fit de remarque, car tous voyaient ses yeux embués. Eux-mêmes étaient émus d'être là et d'être tous réunis à quelques mètres du lieu de l'accident.

Doucement, Romain marcha de l'autre côté de la route et longea le bitume. Les autres le suivaient, de quelques pas, dans un silence religieux. Ils s'avancèrent tous vers le ravin, s'arrêtèrent face au vide. Romain constata que le poteau n'avait toujours pas été remis en place et penchait toujours dangereusement dans le vide. Il y accrocha la rose presque blanche avec une petite cordelette en coton blanc qu'il avait trouvé dans un tiroir de la cuisine.

Puis ses yeux se perdirent dans le vide. Où pouvait-elle être depuis son accident ? Est-elle blessée ? Est-elle encore en vie ? Mais il ne voulait pas penser au pire ? Si seulement, il savait par où commencer.