Miroir

10 _Bientôt

Je me sens tellement bien que je refuse d'ouvrir les yeux pendant quelques secondes. Toujours enroulée sous la couverture, je dois avouer que ce canapé est bien plus confortable que mon lit. Je me souviens parfaitement de la fin de la soirée. Aussi, lorsque je consens enfin à ouvrir les paupières, je distingue Eliott, accroupi à mes pieds, remettant des bûches dans la cheminée.

— Salut, murmuré-je, encore endormie.

Il pivote vers moi. Toujours vêtu d'un jogging et d'un sweat, ses yeux vairons m'observent curieusement. Finalement, je m'assois en bâillant. Il s'approche de moi et remonte le pull que je porte, qui était trop descendu, menaçant de laisser apparaître mes seins.

— Merci, bredouillé-je en croisant les bras sur ma poitrine.

Me rappelant qu'il s'agit de ses vêtements, mes joues rosissent. Du coin de l'œil, j'aperçois Chester qui saute sur le matelas pour me rejoindre. S'allongeant, il pose simplement sa tête sur mes jambes. Mes doigts se perdent dans ses poils doux et tricolores.

— Je ne veux pas que Lexie s'imagine des choses et qu'elle souffre parce qu'elle sera déçue, chuchote alors Eliott.

Mon cœur s'emballe à l'idée qu'il me demande de ne plus jamais revenir. C'est également la peur que j'ai : qu'elle se fasse des fausses idées. Malgré moi, je lui prends la main, entremêlant nos doigts. Il ne s'y oppose pas.

— Je sais. Je lui ai toujours dit qu'il ne se passerait rien entre toi et moi mais, que tu trouverais quelqu'un, un jour, parce que tu es quelqu'un de bien, expliqué-je.

Il fronce les sourcils, comme si ce n'était pas la réponse qu'il souhaitait. Alors, j'essaye de me rattraper :

— Elle est persuadée que je vais rester ici, que je vais vivre avec vous. Avec toi. Du coup, j'ai essayé de lui faire comprendre que non.

Brusquement, il relâche ma main comme si cette dernière l'avait brûlée. Surprise, j'étouffe une grimace de douleur face à son expression déçue.

— Ok, marmonne-t-il simplement avant de partir dans la cuisine.

Ok?

Comment ça, ok?

Déroutée par la tournure qu'a pris cette discussion, je me lève et le rejoins rapidement. Se préparant son café, il me tourne volontairement le dos.

— Eliott? J'ai dit quelque chose qu'il ne fallait pas? Je suis désolée...

— Laisse tomber. Je pensais que... Rien.

— Si tu as besoin que nous mettions certaines choses au clair alors, fais-le.

Ses mains enserrent l'évier et il le serre jusqu'à ce que ses phalanges deviennent blanches. Son dos se contracte, j'ai peur d'avoir fait quelque chose de mal sans le vouloir. J'ai toujours agi en souhaitant protéger Lexie. Bien qu'elle semble mature pour son âge, elle possède tout de même une certaine sensibilité.

— Ne joue pas avec moi, prononce-t-il difficilement, toujours dos à moi.

— Oh, Eliott... Ce n'est absolument pas mon but. Je t'apprécie vraiment, tu sais, affirmé-je en m'approchant de lui.

— Alors, arrête de me faire croire des choses qui n'arriveront jamais, s'énerve-t-il. Un jour tu me prends dans tes bras et le lendemain tu me répètes qu'il n'y aura rien. Arrête ça bordel!

Merde.

— Je... Je ne fais pas exprès, bredouillé-je, mal à l'aise.

Puis, je décide de jouer carte sur table. Je me suis beaucoup trop accrochée à eux deux pour m'imaginer les perdre ainsi.