Interlude #2

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New-Seattle, Quartier A.6, Quartier Général de l'Héxaédron, 2 mai 2314



Alors qu'ils entraient dans les bains, le géant ne put que remarquer que les oiseaux y étaient déjà présents et 3 rouges grommelèrent avant de se retirer. Harfang, sans la moindre pudeur, sortit de l'eau dans le plus simple appareil pour venir faire la bise à plusieurs des poissons puis s'arrêta devant Éthan et lui mima de se baisser. Il mit un genou en terre pour être à sa hauteur.

— Arrête de mater ma cicatrice sinon Pygargue va être jaloux, lui susurra-t-elle à l'oreille.

Il vira au pivoine alors qu'elle retournait gaiement à l'eau.

— T'inquiète pas, lui glissa Barracuda. Moi aussi elle me faisait de l'effet, puis on s'y habitue.

Tous se déshabillèrent rapidement et les filles partirent vers un petit bassin. Océan en prit un autre avec Limande et les restants choisirent le grand bassin. Éthan s'y glissa et se laissa flotter sur le dos en essayant d'oublier les autres.

— Bien équipé, entendit-il fuser de la part de Murène sans comprendre.

Il se laissa couler sous la surface en vidant ses poumons. Sans vraiment parler de souvenirs qui remontaient, il retrouvait peu à peu des sortes de repères dans l'eau. Ses yeux se plissèrent légèrement pour voir à nouveau avec netteté. Lorsqu'il sentit enfin le fond contre ses épaules puis ses fesses, il se redressa calmement pour ressortir à l'air libre, quoique prisonnier de sa tignasse.

— Pas mal, commenta Barracuda. Mais tes cheveux ça doit être galère, non ?

— On y touche pas, gronda Éthan malgré lui. C'est ... un souvenir.

Les femmes semblèrent touchées et lui proposèrent de l'aider à tout démêler. Il accepta à condition de pouvoir d'abord se sécher. Après tout, pas besoin de savon alors qu'il s'était nettoyé moins de 24 heures plus tôt. Elles rirent de lui et après qu'il eut passé une serviette autour de ses hanches et se fut assis en tailleur, Limande, Carpe et Espadon s'attaquèrent à sa chevelure emmêlée. Puis, elle lui tressèrent d'un commun accord à la mode du Sud : des petites tresses servant à leur tour de brins et striant son crâne de l'avant jusqu'à la nuque où elle s'unissaient à nouveau jusqu'à ne faire plus qu'une seule énorme natte.

Le jeune homme devait l'admettre, ça changeait beaucoup son apparence mais plutôt en bien. Cela assombrissait aussi un peu sa chevelure et un peu sa peau, du moins en apparence. Il se rhabilla en ignorant les regards insistants et parfois un peu moqueurs. Puis, quand les oiseaux se furent habillés aussi, il accepta de les accompagner au réfectoire.

***

Alors qu'il racontait ses "exploits" avec les poissons, il vit que les oiseaux faisaient les gros yeux. Harfang finit par lui expliquer en profitant d'un souffle reprit.

— Nous ne jouons pas comme ça, chez nous la chute c'est une série de pompes pas juste un gloussement. Enfin pas toujours des pompes mais sinon c'est du gainage ou des tractions donc on y gagne pas au change. Mais ces dernières semaines ce sont plutôt les nuages qui pompent, pas vrai les gars ?

Les autres oiseaux sourirent en levant silencieusement leurs gobelets. Puis leurs visages se refermèrent un à un quand ils virent Blue en approche. Elle s'assit lourdement sur le banc face à Éthan.

— Excusez-moi de casser l'ambiance. Mais j'ai entendu que tu avais fini déjà deux de tes tests. J'aimerais prendre la suite si tu n'es pas encore trop fatigué. Oui vous pouvez partir, merci, ajouta-t-elle en direction des oiseaux. Si Saphir me cherche, je serai en salle C8.

— Juste en face du terrain où j'étais, demanda le géant.

— En effet, si tu veux je te laisse même nous y guider mais fini ton repas je t'en prie.

— Vaut mieux pas avant de faire du sport. Je préfère revenir plus tard.

— Sage décision, remarqua la trentenaire alors que les oiseaux s'éclipsaient. Mais ici pas de gaspillage, demande leur de tout te garder de côté.

Il se leva et alla voir l'un des hommes au service pour lui demander de garder le plateau de côté. Il ne reconnut pas tout de suite Bronze mais s'excusa ensuite en balbutiant.

— Je ... pardon, la colère est montée. J'ai pas l'habitude du combat ... c'est ...

— C'est pas fait pour toi. T'inquiète pas, tu m'as rien cassé. Mais n'écoute pas Grenat : t'es pas un Berserker. T'es pas un rouge malgré ta taille.

— C'est quoi un bière sert guerre ?

— C'est une brute sanguinaire. Enfin, si t'es des quartiers ici t'as dû en voir quand t'étais plus jeune, non ?

Éthan confirma en silence puis fit un signe avant de retourner voir Blue.

— On peut y aller, lâcha-t-il.

— Pas la peine de grogner, je sais très bien pourquoi ils ne te veulent pas, et on va y remédier.

— Mais ...

— Mais rien du tout, si tu deviens mon garde du corps ... protecteur, je veux que tu saches te battre. Ce n'est pas une option.

— Bien, accepta-t-il, toujours boudeur.

***

Blue le laissa les guider et il ne se trompa qu'une fois mais dû revenir dans le hall puis aux quartiers bleus afin de se réorienter. Les couloirs sinueux et irrégulier semblaient se confondre et donnaient un aspect de dédale à la gare. Le jeune homme regrettait tant la surface, le ciel ouvert, le soleil comme repère.

La salle dans laquelle Blue voulait s'entraîner était bien plus petite et c'était peu de le dire. Six mètres sur cinq et un peu moins de trois sous plafond, Éthan se sentit à l'étroit mais retrouvait aussi les dimensions de la plupart de ses chambres et se sentit plus à l'aise après ce constat.

La pièce était recouverte par des tapis en mousse dure sur la quasi-totalité du sol et une partie de trois murs. Le dernier, celui de la porte d'entrée, affichait une sympathique collection d'armes d'entraînement. Éthan nota soudain que Blue retirait son haut et ses chaussures. Sur un signe il fit de même.

Elle passa ensuite des bandes par-dessus son soutien-gorge, sans doute pour mieux tenir sa poitrine pendant les effort à venir puis troqua son simili-jean pour un short moulant. Elle lui proposa un short presqu'à sa taille puis elle commença à passer des protections pour ses articulations.

Elle l'équipa ensuite, et il dut se retenir de grogner lorsqu'elle le frôla volontairement au niveau des hanches. Si elle devenait son chef, il devait savoir lui obéir. Et il espérait ne pas avoir mal compris le terme "garde du corps" mais dans le doute il saurait s'expliquer avec Christale ... et il se rendit compte que même s'il avait aimé cette seule autre personne au monde, il ne lui devait aucune justification. Tant que ça n'entravait pas ses plans.

Les Achroniques - 2314, tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant