Chapitre VII

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Je descends du bus en faisant coucou à Luke. Je me mets à marcher vers le lycée en démêlant mes écouteurs tout en traversant le parking, encore vide à cette heure-ci, et arrive devant la grille noire et or, imposante et remplis de tristesse. Les trois marches sur la droite donnent accès à l'enceinte de l'établissement. Je les grimpe en mettant mes écouteurs.

- Bonjour ! Lançai-je à la gardienne installée dans la loge.

- Saluuut ! Répond-t-elle de sa voix aiguë en me faisant coucou de la main tandis que je me dirige vers la cour.

Peu d'élèves étaient déjà présents, il n'était que 7h30, mais les deux amis que je venais voir étaient bien là. Amaury et Gino se trouvaient sur un banc juste devant les bâtiments scientifiques où ils avaient cours par la suite. Je mets la musique dans mes oreilles.


La musique me donne la force de traverser la court seule. Elisabeth n'est pas encore là, elle ne viendra qu'à 10h00. Et j'aurai dû faire comme elle, sans ces foutues bidules de fille.

En me voyant arrivé, Amaury, un grand brun aux yeux marrons et à la carrure légèrement carrée s'écarte doucement vers la droite tandis que Gino, le faux blond, aux yeux gris et au corps proportionnellement normal, avec des oréos dans la main et dans la bouche, se décalait vers la gauche.

C'est incroyable comme mes amis me connaissent par cœur. Mes yeux se lèvent en direction du ciel, et un rictus envahis mes lèvres roses. Je m'installe à côté d'eux après leur avoir fait un tcheq poisson.

Un tcheq poisson c'est un claquage de main à droite, à gauche, puis secouer la main contre le poignée de l'autre.

Oui, c'est vrai. C'est ridicule mais ça colle avec mon surnom de Sushi que m'a donné le blond un jour où il avait faim !

Je laisse la musique se terminer dans mes oreilles, faisant semblant de ne pas voir les coups d'œil inquiets que s'échangeaient les deux amoureux.

Bon, il est vrai qu'il est rare de me voir louper une grasse matinée. Bon, il est vrai qu'il est rare que je ne râle pas. Et puis, on est d'accord qu'il est encore plus rare que je me taise tout court !

"bye bye woop"

Les trois derniers mots de la chanson s'effacent. Je viens couper la musique sur mon téléphone et reste encore ainsi quelques secondes avant de retirer mes écouteurs.

- Bonjour Sushi...

- Bonjour Minimoys.

Je viens doucement, mais sans gêne, m'affaler contre Gino et poser mes pieds sur les genoux de Momo la mayo, alias Amaury. C'est d'ailleurs ce dernier qui vient reprendre la parole.

- Comment se fait-il que tu sois là de bon matin ?

- Joie et bonne humeur se sont données rendez-vous chez moi, et les anglais ont débarqué en Normandie...

- Tu m'as apporté à manger ?

Juste les gars, une question...pDois-je vraiment préciser qui m'a posé cette interrogation, remplis d'inquiétude à mon égard ?

- Non.

Il soupire et vient câliner mes cheveux. Je me demande s'il n'est pas entrain de se dire que mes boucles ressemblent à des tortellinis...

Les minutes passent, et nous on reste comme trois cons. En les observant bien, je remarque leur promiscuité encore plus appuyée qu'à l'habitude. Je l'ai compris à l'instant même où mes yeux se sont posés sur leurs corps bien trop proches. Ils sortent enfin ensemble. Mais je ne dis rien, ils parleront le moment opportun.

Mon frère arrive avec plusieurs de ses potes dont son meilleur pote Antoine. C'est lui qui emmène Lauren en voiture. Je vois mon jumeau me chercher du regard et lorsque ses yeux plus dorés que verts rencontrent les miens plus verts que dorés, il semble devenir énervé. Je le vois serrer des poings et je détourne le regard.

Mon frère n'aime pas les deux amants, probablement à cause de ce trait-là de leur personnalité.

Mais quand Amaury sort son téléphone et nous fait remarqué qu'il ne reste plus que cinq minutes avant la sonnerie, je capte enfin que je vais être seule pendant deux heures. Et c'est à ce moment précis que mes sanglots décidèrent de briser le silence.

Point de vue extérieur, deux ans après.

J'aurai voulu te rassurer, te dire qu'on t'aimait, qu'on serait toujours là pour toi. J'aurai dû savoir que ça ne s'arrêterait pas à une simple confiscation de téléphone, d'ordinateur et de tablette. J'aurai voulu chercher à briser ta solitude malgré tes paroles. J'aurai dû comprendre que tu étais juste brisée d'être ainsi rejetée. Mais j'étais trop heureux pour m'en rendre compte. Pardonne-moi, Sushi...

Retour point de vue initial, celui de Lys.

J'ai expliqué à mes amis ce qui s'était passé hier. À peine je finis mon récit que la sonnerie sonne. Je les délivre de mon poids.

La solitude me pèse, c'est pourquoi il ne faudrait pas qu'elle les imprègne aussi.

Ils n'ont pas le temps de me répondre, ils doivent aller en cours. Peut-être même qu'ils se fichent juste de ce qui m'arrive, de ce que je pense. Mon cœur se déchire, j'ai mal. Je pleure. Plus personne n'est dans la court, m'envoyant en pleine face mon isolement.

Qu'est-ce que je fou ici sérieux ? Je ne prends même pas la peine d'écouter les cours. Je fais semblant de rire, de m'amuser. Je fais des blagues pourries. Et le tout passe comme une lettre à la poste.

Je jette rageusement mon sac sur le sol recouvert de gravillon en soufflant un cris de rage. Je relève la tête et croise son regard océan. Qu'est-ce qu'elle me veut à me fixer comme ça ? Elle pouvait pas faire la grasse matinée comme tout le monde ? Elle croit quoi avec son petit haut moulant et son jean blanc ? Elle veut qu'on la prenne pour une pute ? La pute de son connard de copain ?

Et puis je comprends, lorsque Marc arrive derrière elle, la prends par les hanches et dépose des baisers dans son cou avant de lui rouler une pelle à la bave de crapaud. Elle est là pour cet enfoiré qui l'aime un jour sur deux. Elle est VRAIMENT là pour lui. Et ça, ça fini le boulot. J'enrage. Pourquoi ? Je ne sais pas, mais je le fais, et je n'ai qu'une seule envie : péter le nez de ce puant.

Sans plus rien contrôler de mes gestes, de mes pensées et des conséquences, je prends mon sac, traverse la cours du lycée au pas de course et entre dans la vie scolaire située juste en face de moi.

- Je rentre chez moi.

Annonçais-je avant de claquer la porte et de prendre mes jambes à mon cou.

Sort de ma tête, sort de mes pensées. Ne pose pas ton regard sur moi. Ne me tente plus de t'embrasser.
Sort de ma tête, sort de mon cœur. Ne pose pas tes mots sur moi. Ne me tente plus d'être ton bonheur. Arrête de briser mon cœur.

//1157 mots.

Ce n'est qu'un au revoir.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant