Chapitre VI

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C'est une douleur au ventre qui me réveille à l'aube le lendemain matin. L'enfer d'être une femme me reprend à peine sortie du sommeil, quelle joie !

Je me lève en titubant. Cette connerie me rend toujours malade quand Elles sont en avance.

Après un rapide passage en salle d'eau, je descends dans la salle à manger. Il est suffisamment tôt pour que personne ne vienne me foutre les glandes...

Je sors mon lait de noisette, viva l'intolérance au lait, et m'en sers une tasse entière. Je râle jusqu'à perdre haleine parce que depuis que je ne supporte plus de boire du lait, je ne peux plus me faire de chocolat chaud : l'enfer est sous mes pieds !

Comme je suis la première levée, je suis dans l'obligation de préparer la table du petit-déjeuner sous peine d'être puni. Pour la énième fois...

Alors, alors, trois bols carrés au nom de mes parents et de mon frères, les petites cuillères et les couteaux à beurre. Hum, le chocolat en poudre pour Lauren et la chicorée pour mon père. Je prépare la théière et sort le thé au citron pour Madame Balai-dans-le-postérieur.

Puis, je m'assois pour déguster mon maigre breakfast. C'est mon jumeau qui me rejoint en premier. Il dépose un bisous sur ma joue avant de se préparer son chocolat chaud sous mes yeux envieux. Mon frère était habillé d'un T-shirt représentant un dragon rouge vif avec un sarouel rouge sang...

Je soupire devant cette tenue dépareillée. Bordel, mais qui lui a appris à s'habiller ?

J'ai rapidement la réponse quand mon père descend sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller le Dragon.

Sa tenue est encore plus à mourir de rire que celle de mon frère. Il porte un t-shirt avec un serpent dessiné derrière, une cravate jaune poussin et un jean déchiré aux genoux de couleur rose pastel.

- Déjà levés ? Si votre mère vous demande, vous ne m'avez pas vu ! Chuchote-t-il venant boire son café que j'avais déjà préparé en deux-deux. Puis il file comme un ouragan. En faisant tout tomber dans un bruit assourdissant !

- Merci. Crions simultanément mon frère et moi-même.

Un soupire s'échappe de mes lèvres tandis que je finis de boire mon lait.
Je grogne soudainement, après une vague de douleur.

- Je hais être une fille bordel, je vais devenir un mec se sera parfait.

- Le dit pas trop fort, maman pourrait croire que tu y penses sincèrement. Ricane mon frère.

Si seulement tu savais... Peut-être que j'y pense réellement frérot...

- Bonjour Lauren. Bonjour Lysandra. S'exclame ma mère de sa voix haut perchée en entrant dans la pièce. Où est votre père ?

- Bonjour mère. Pas vu. Répondit mon frère, véritable petit soumis, en baisant sa joue.

Quant à moi, je me lève pour poser ma tasse dans le lave-vaisselle sans lui répondre. Il est hors de question que je lui parle comme si de rien était.

- Lysandra. Répond.

- Parti voir une pouf. Soufflai-je avant de fuir dans ma chambre.

Vous pouvez penser ce que vous voulez mais c'est sûrement un peu une partie de moi, noire et profondément monstrueuse, qui a exprimée cette phrase.

Je cherche dans mon placard une tenue potable et prends un cachemire  gris souris sur un pantalon noir. Parfait.

Je mets rapidement mes chaussures blanches pour rappeler ma chemise et glisse un trait d'eye-liner sur mes yeux. Tient, aujourd'hui ils tirent plus sur le vert que sur le doré...

Une fois prête, je chope mon sac de cours dans lequel je n'ai que le stricte minimum et mes affaires d'histoire, évidemment.

Je sors en quatrième vitesse évitant ma mère qui me hurle depuis le paillasson :

- Et rentre immédiatement après les cours.

Le bus arrive devant moi. Je fais un signe au chauffeur, pour qu'il s'arrête, et monte dedans.

-Bonjour Luke !

-Bonjour Lys, tu n'as pas raté ton réveil aujourd'hui ? Me taquine le conducteur pendant que je passe ma carte.

Je ris doucement et vais m'installer derrière son siège. Le bus est composé d'une cinquantaine de sièges recouverts d'un tissu vert caca, et le siège conducteur n'est pas séparé avec l'habituelle plaque de verre. De cette manière, une discussion est possible et je n'ai pas le mal des transports.

- Tu veux rire... C' est l'horreur qui fait que je peux procréer qui m'a réveillé ! Il faisait encore nuit bordel !

- Je me disais bien que tu donnais l'impression d'être tombé du lit.

- Je hais être une femme.

- Tu n'as jamais pensé à devenir un homme ?

- Luke ne dit pas de connerie ! Je suis déjà assez horrible...

- Parce que tu aimes Violine ? Pourtant l'amour ne se choisit pas...

Il s'arrête à un nouvel arrêt et fait monté plusieurs jeunes. Je profite qu'il vérifie qu'ils passent leurs cartes pour réfléchir.

Bien évidemment que j'avais déjà pensé être un homme ou même en devenir un. Ressemblant à mon frère physiquement, et gardant mon intelligence. Ma puissance serait vu différemment et l'amour que j'éprouve pour la belle blonde serait normale...

Je suis vraiment un monstre de chair de penser ça.

Non seulement j'aime les femmes, mais, quand j'étais enfant, j'adorais jouer au foot et au rugby, j'aimais me promener torse nu, tondre le jardin, et faire plusieurs rêves ou j'étais homme.

Je sors mon cahier et griffonne doucement dessus, ne reprenant pas la conversation avec Luke, qui me laisse dans ma petite solitude.

" L'étoile dans le ciel
Ressemble à une hirondelle.
Est-ce toi dans ce silence
Qui veille sur mon innocence ?
Combien de temps me laisseras-tu encore ?
Combien de temps me penseras-tu assez forte ?

J'aimerai voler dans le plus profond de l'univers
J'aimerai oublier que c'est mon destin que je sers
J'aimerai t'aimer jusqu'à la fin du concert
Laisse-moi te demander, miss, de me mettre les fers !

C'est une question d'amour, ou de choix
Moi, je ne veux rien d'autre que tes bras,
Est-ce que tu peux le comprendre dans le froid
De l'hiver, qui fait crisser la neige sur les toits ?

J'aimerai voler dans le plus profond de l'univers
J'aimerai oublier que c'est mon destin que je sers
J'aimerai t'aimer jusqu'à la fin du concert
Laisse moi te demander, miss, de me mettre les fers !

Oh petit ange, petite fée devant moi
Réalise mon rêve rien qu'une fois
Je ne demanderai pas la lune
Mais sache que sinon je te fume... "

La dernière rime ne veut absolument rien dire, et ce texte bordel. Tellement dégoulinant d'amour. J'arrache violemment la page et la jette brusquement contre la vitre en retenant mon cris de dépit.

Au même moment, le bus arrive à son terminus : le lycée.

Point de vue interne, deux ans plus tard.

Si j'avais su que c'était la dernière fois que je l'emmenais. Je lui aurai dit que je la soutenais. Elle semblait si forte, que j'en ai oublié qu'elle n'avait QUE 17 ans... Si je le pouvais, aujourd'hui je lui dirai qu'elle n'avait pas à avoir honte d'elle-même, qu'elle n'était pas un monstre...

//1166 mots.

Ce n'est qu'un au revoir.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant