Chapitre 5

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« Grands bois, vous m'effrayez comme des cathédrales ;

Vous hurlez comme l'orgue ; et dans nos cœurs maudits,

Chambres d'éternel deuil où vibrent de vieux râles,

Répondent les échos de vos De profundis. »

— Charles Baudelaire, Obsession


Aussitôt le jour levé, la vie s'animait dans le village aux quelques attraits touristiques. Des odeurs de pains et de brioche coloraient les rues de senteurs agréables et alléchantes, même pour un lycan se nourrissant presque exclusivement de viande. Au bar-tabac du coin, des français se chamaillaient verbalement pour ensuite rire à l'unisson. Les insultes s'entendaient dehors, dans la rue, mais personne ne s'en inquiétait. Cela paraissait être normal.

Nul besoin d'être ennemi ou d'avoir trop bu pour ainsi se quereller et se réconcilier tout aussi vite.

Un spectacle qui continuerait jusqu'aux coups de cloches de l'église signalant l'heure du midi. Sans doute qu'ensuite chacun rentrerait chez soi, affamé par un estomac criant famine.

Arian passa devant la fameuse boulangerie. Son odorat ne l'avait pas trompé. Devait-il en prendre pour Jehanne ? Cela aurait ressemblé à un petit-déjeuner après une nuit de plaisir. Il eut envie de rire de cette image qu'il se faisait. Celle de Jehanne, se réveillant dans un lit et dégustant un repas porté sur un plateau à ses côtés. Seulement, outre le fait que la créature s'avère être un vampire au régime hématophage, elle se trouvait également dans une tombe peu confortable et non pas un lit. Il grimaça d'avoir eu un comportement si cavalier. Néanmoins, il préférait qu'elle se sente mal à l'aise dans ce genre de lieu, mais protégée du Soleil. Pour le moment en tout cas.

Il réfléchissait à l'avenir, ce qu'impliquait d'avoir une compagne pareille. Dans l'immédiat, l'impossible restait impossible. Jehanne devait sans aucun doute ressentir quelque chose, a priori une soif de son sang et une attirance physique, pour lui. Et s'il s'y prenait correctement, ce sentiment changerait en sa faveur.

Étrangement, l'idée de détruire Jehanne, de s'en débarrasser, ne lui était pas venu à l'esprit. Pourtant, cela aurait été bien plus simple. Elle n'avait pas bonne réputation, elle était loyale envers les Idoles et elle était une assoiffée du sang. Et une toxico. Rien ne serait facile. Bien au contraire ! Ils ne partageaient pas le même régime alimentaire. Il vivait le jour, elle craignait le Soleil. Il s'évertuait à combattre les Idoles et leur haine à l'encontre des hybrides, Jehanne les aidait à étendre leur domination sur le monde humain et dans le Téras. Ils étaient opposés sur tous les plans.

Mais Arian voulait croire que le Destin ne réunissait pas deux êtres par hasard. Si Jehanne se présentait sur sa route, il y avait une raison. Une âme sœur brisée et destructrice. Était-ce son rôle de lui venir en aide ?

Une âme sœur qu'il rencontra affaiblit. Il avait encore en mémoire l'odeur putride qui se dégageait par moment de son corps. Des blessures internes, des guérisons lentes et une chair sensible. Le roich ne devait pas être à l'origine de ceci, mais devait être le coupable d'un ralentissement de son rétablissement.

Qu'une aussi grande guerrière, autant respectée que crainte, puisse être dans un état si lamentable avait de quoi susciter la pitié. Qu'était-il arrivé ?

Il se souvint que son dossier faisait mention d'une disparition de plusieurs mois du Papillon écarlate. Ce n'était pas qu'elle se cachait, mais bien une évaporation. Son hypothèse avait été que celle qu'il traquait s'était rendu dans le Téras pour une raison qu'il ignorait. Mais à présent, il en doutait.

Au rythme de la nuit 1 - Le Papillon écarlateOù les histoires vivent. Découvrez maintenant