Aslan. Non, je ne suis pas dans Narnia. Enfin. Je crois.

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- Hélène, attends !

- Va te faire foutre, balançai-je. Fou-moi la paix !

- Hélène !

Ses pas précipités faisaient échos aux miens. Je ne voulais pas le voir. Je ne voulais pas l'entendre. Je ne voulais pas savoir. Il pouvait se garder ses excuses, il pouvait se garder ses explications et il pouvait même se garder sa soi-disant volonté de me protéger. Qu'il aille pourrir au fin fond du Nil.

Il savait. Il savait. Il savait. J'allais exploser. Comment avait-il pu ne rien me dire ? Comment avait-il pu me cacher la vérité ? Il m'avait menti. Utilisé. Trahi. Des larmes de rage voulaient envahir mes yeux tandis que je marchai, aussi vite que mes jambes me le permettaient, vers une direction inconnue. Je ne connaissais encore que mal ce lieu et je me fichai, en réalité, d'où j'allais. Tout ce que je désirai s'était m'éloigner de lui. Ma colère ne cessait de croitre, encore et encore. Elle finirait par me dévorer et, à cet instant, il fallait mieux pour lui qu'il ne soit pas dans mon champ de vision. Mais il ne semblait pas avoir conscience de ce fait, s'obstinant à me poursuivre, vociférant mon prénom dans les couloirs que j'arpentais, sans me soucier des quelques personnes que nous croisions et qui nous dévisageaient avec incrédulités ou intérêts.

- Hélène ! Brailla-t-il pour la cinquantième fois. Laisse-moi-t'ex...

- Tu l'as déjà fait ! Braillai-je à mon tour, me stoppant soudainement pour lui faire face. Qu'as-tu à rajouter de plus ? Tu m'as déjà sortie toutes les excuses possibles du monde, non ?

- Hélène, murmura-t-il, ses traits se tordant dans une peine que je ne pouvais m'empêcher de penser réelle. Je comprends que tu sois en colère, mais je ne v...

- En colère ? Coupai-je à nouveau. Ce n'est pas juste de la colère. Tu savais. Tu savais ce que j'étais, tu savais que tout cela se produirait. Et tu m'as laissé me le prendre en pleine tronche sans m'avertir, sans me dire que cela allait arriver. Tu sais ce que cela fait d'avoir le sentiment de tout perdre ? Mes amis, ma famille, ma vie. Plus encore. Celle que je pensais être ?

Ma voix s'étranglait entre colère et angoisse. Gabriel se tenait devant moi. Ce Gabriel pour qui j'avais toujours eu des sentiments. Ce Gabriel qui m'avait rejeté quelques temps auparavant. Ce Gabriel avec qui j'avais grandis. Avec qui j'avais partagé tant de fou rire, tant de soirée, tant de week-end, tant de moment heureux. Ce Gabriel en qui j'avais pleinement confiance.

Je me souvenais encore de chaque moments. La première fois que ma mère me l'avait présenté, il m'avait jaugé froidement du haut de ses dix ans tandis que je n'en avais que cinq. J'avais été certaine que mon entrée dans sa vie l'importunait plus qu'autre chose. J'avais mis cela sur le compte de notre différence d'âge. Après tout, quel gamin de dix ans pouvait souhaiter ce voir affublé d'une gamine ? Pourtant, après que nos mères aient insisté pour que nous passions un peu de temps ensemble, il m'avait adopté. Il m'avait traîné avec lui dans chacune de ses sorties. Il m'avait présenté à ses amis comme sa « petite-sœur ». Il m'avait fait découvrir bien des choses. Il m'avait fait me sentir particulière. Aimée. Choyée. Ecoutée. Il avait toujours été là. Dans les moments de doute, de tristesse, de bonheur, d'inquiétude. Tous. Sans aucune exception. 

Et, aujourd'hui, ce Gabriel me dévisageait sans savoir quoi dire ou quoi faire. Il restait immobile, les yeux rivés sur le sol. Il fallait dire qu'il ne m'avait que rarement vu dans un tel état. Je n'avais que rarement pleurée devant lui. Plus encore, je ne pleurai que rarement. Du moins, avant de me retrouver perchée dans un temple flottant et de me transformer en fontaine. 

The last sunOù les histoires vivent. Découvrez maintenant